Coup de filet important dans les rangs des djihadistes maliens, qui sont néanmoins loin d’être essoufflés par la traque de l’armée et des forces internationales
Sept djihadistes maliens présumés, tous du sud du pays, ont été arrêtés la semaine dernière en Côte d’Ivoire et extradés vers le Mali voisin. Ce coup de filet, révélé par l’AFP, a été réalisé par les forces spéciales des services du renseignement du Mali qui ont travaillé avec leurs homologues ivoiriens.
Les personnes arrêtées auraient avoué et reconnu avoir appartenu, dans le passé, au groupe islamiste Ansar Dine ou à la police islamique de Tombouctou. Ils auraient créé, après le déclenchement de l’intervention militaire dans le nord du pays, une unité de combat baptisée Khalid Ibn Walid dont le chef serait un certain Souleymane Keïta, dont on ne sait que peu de choses.
Le front sud est devenu une vive source inquiétude pour les autorités maliennes et les forces internationales qui ont peur d’une contagion djihadiste aux pays voisins. Une franchise du groupe islamiste Ansar Dine y a perpétré cet été plusieurs attaques. Cette franchise serait composée d’une trentaine de combattants très mobiles, utilisant des motos, et équipés d’armes légères (Kalachnikov, AK 47 et grenades).
Elle s’est fait connaître dans la nuit du 9 au 10 juin en attaquant un camp des forces de sécurité maliennes à Misséni, ville frontalière de Côte d’Ivoire, en signant ses méfaits par un tract d’«Ansar Dine pour le Sud du Mali». La franchise s’est ensuite attaquée à Nara, le 27 juin, une ville proche de la Mauritanie, puis à Fakola, le lendemain, à quelque kilomètres de la Côte d’Ivoire. Un certain Moussa Sanogo, un citoyen malien, est suspecté d’avoir participé à l’attaque de Misseni avant de se replier à Korhogo, au nord de la Côte d’ivoire, où il a été arrêté le 28 juin. De nombreuses opérations militaires ont été menées durant l’été par l’armée malienne dans le sud du pays, pour réduire cette menace terroriste.
«Ansar Dine pour le Sud du Mali est la dernière franchise du réseau Ansar Dine, assure une source sécuritaire au Mali. On la suspecte de recevoir de la formation, de l’aide financière et logistique de la direction d’Ansar Dine et le renfort d’autres groupes djihadistes». Ansar Dine est dirigé par une ancienne figure de la rébellion Touareg, Iyad Ag Ghali, qui déstabilise le pays. Ce chef narco-djihadiste, baron du trafic de drogue, est très impliqué dans les recompositions des groupes djihadistes et figure parmi les cibles prioritaires des militaires français. Il se promène pourtant assez facilement du nord Mali à l’Algérie. Sa famille vit dans les villages jumeaux de Tinzaouatène, de part et d’autre de la frontière malieno-algérienne, au pied de l’Adrar des Ifoghas.
Exclu des négociations à Alger ayant abouti à la signature de l’accord de paix intermalien, il est le principal obstacle à son application sur le terrain. «Ansar Dine menace aujourd’hui la Côte d’Ivoire, le Burkina et la Mauritanie», explique un officier français au Mali, qui souhaite garder l’anonymat. Sa franchise, Ansar Dine pour le Sud, recrute ou a ponctuellement recours à des criminels du sud Mali et des radicaux religieux.
Certains pensent que le groupe a aussi des ramifications avec le Front de libération du Macina (FLM) d’Hamadoun Koufa. Ce dernier aurait envoyé un de ses lieutenants dans la ville de Sikasso, grande ville du sud sur la route du nord ivoirien, pour prêter main forte aux djihadistes d’Ansar Dine. La région de Sikasso n’est pas connue pour être fief du fondamentalisme. Mais, un imam radical, Biramé Koné, appartenant à la Dawa (une secte rigoriste d’origine pakistanaise), y prêche et convainc de plus en plus d’adeptes. Iyad Ag Ghali et Hamadoun Koufa supportent activement le processus de radicalisation en cours, une inquiétude pour les autorités de Bamako et surtout pour les populations du Sud qui y voient la faillite de l’Etat, incapable d’assurer leur sécurité.
Source: lopinion.fr