Lancé au nord Mali à l’insu du Mali pour libérer l’otage français, Michel Germaneau, des mains de AQMI : Le raid franco-mauritanien se termine en désastre

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Malgré six morts dans les rangs des terroristes, l’otage français n’a pas pu être libéré et est donc plus que jamais exposé à l’exécution. Le sort des deux otages espagnols ne tient plus qu’à un fil, d’où la colère noire de Madrid contre Paris. La fière Mauritanie, qui croyait  tenir là une magnifique occasion de démontrer à la face du monde que la méthode ATT, qui consiste à négocier avec les ravisseurs pour obtenir la libération des otages, relève de la forfaiture et de la compassion, fait piètre figure. Qui plus est, elle a dû dépêcher une forte délégation à Bamako pour présenter des plates excuses au même ATT pour avoir violé le territoire malien. Le président malien ne doit pas être trop mécontent : le raté franco-mauritanien avec, en arrière plan, l’Algérie étroitement associée à l’opération même si elle affiche un profil bas compréhensible après son échec retentissant, conforte l’analyse de ATT à savoir qu’aucun Etat sahélien ne peut, à lui seul, parvenir à bout du terrorisme sans l’aide de ses voisins immédiats.

 C’est ce lundi 26 juillet que l’otage français, Michel Germaneau, un ingénieur à la retraite de 78 ans, enlevé au Niger le 22 avril et détenu depuis par Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) doit être exécuté. C’est, en effet, à cette date qu’expire l’ultimatum de quinze jours lancé le 12 juillet par le groupe terroriste au gouvernement français pour obtenir de son homologue mauritanien la libération d’une dizaine de ses éléments, dont trois condamnés à la peine capitale pour l’assassinat de quatre touristes français, le 24 décembre 2007 à Aleg, dans le sud-est de la Mauritanie. Il s’agit de Sidi Ould  Sidna (22 ans), Maarouf Ould Hayba (28 ans) et Mohamed Ould Chabanou (29 ans). En plus de la remise en liberté de ces trois individus, qui avaient défié le tribunal de Nouakchott en revendiquant fièrement leur appartenance à Al Qaïda et avaient reconnu avoir subi un entraînement dans des camps sous son contrôle en Algérie, les ravisseurs de Michel Germaneau réclament au gouvernement français le paiement de plusieurs millions de dollars US. Faute d’une satisfaction intégrale de ces deux exigences, ce 26 juillet à minuit, l’otage français serait mis à mort.

Placé devant une situation similaire,  en févier dernier au Mali, le président Nicolas Sarkozy avait multiplié les pressions sur son ami Amadou Toumani Touré. Bernard Kouchner, le chef de la diplomatie française, avait effectué deux visites à Bamako en deux semaines. La deuxième fois, il était accompagné de Pierre Guéant, le Secrétaire général du Palais de l’Elysée, l’ombre de Sarkozy en somme. A la fois parce que Pierre Camatte avait fait du Mali son pays d’adoption (il avait choisi Ménaka comme lieu de résidence permanente) et que la vie d’un homme n’a pas de prix, comme il a tenu à le souligner à l’époque, ATT a réussi à sauver de la mort l’otage français et à le faire libérer, en y mettant les formes juridiques. Les terroristes d’AQMI, détenus par l’armée malienne ont été, de leur côté, rendus à la liberté après avoir été jugés et condamnés à une peine couvrant la durée de leur détention pour « détention illégale d’armes et de munitions».

Cette fois-ci, le gouvernement français n’a manifestement pas privilégié la voie de l’arrangement et lui a préféré celle de l’intervention militaire aux côtés de l’armée mauritanienne. Celle-ci a été un échec cuisant, qui met en péril la vie du quasi octogénaire Michel Germaneau. S’il est exécuté, Paris en endossera la responsabilité morale, ainsi qu’AQMI l’en avait déjà averti dès le 12 juillet. Le précédent Edwin Dyer, ce Britannique froidement abattu il y a deux ans pour refus du gouvernement de Londres de payer la rançon exigée, devrait lui servir de leçon.

En attendant de savoir ce qu’il va advenir du malheureux Germaneau, s’il ne va pas faire les frais d’une représailles sanglante après la mort violente de six terroristes lors du raid franco-mauritanien, l’on peut s’interroger sur ce qui a bien pu pousser M. Sarkozy, ses conseillers et ses généraux à se laisser tenter par une opération qui relève davantage d’une fiction télévisée américaine que d’un acte mûrement étudié et mis en route par un Etat-major. Il n’est guère besoin d’être sorti de Saint-Cyr, Sandhurst ou West Point pour savoir que le renseignement est capital dans toute opération militaire. Celui livré aux trente soldats français par leurs homologues mauritaniens n’était assurément pas le bon. Le commando mixte franco-mauritanien a frappé là où il ne le fallait pas. Et ont ainsi mis en danger la vie de l’otage qu’ils étaient censés sauver.

Pour maquiller leur cinglant revers, Paris et Nouakchott tentent de créditer l’idée selon laquelle l’opération du jeudi 22 juillet ne visait pas à libérer par la force armée Michel Germaneau mais « à faire échec à un projet d’attaque d’AQMI contre des objectifs mauritaniens ». Un raid préventif, en somme. Du bluff. Tous ceux qui connaissent un tant soi peu la carte militaire de la zone où a lieu l’opération savent qu’elle est sous étroite surveillance de la base de Bassikounou, tenue par un bataillon de cinq cent hommes lourdement équipés en armes, en munitions et en logistique. AQMI, qui n’a jamais constitué un gros effectif, opère par petits groupes de dix à vingt personnes, qui se déplacent constamment. Ils passent  rarement  deux nuits de suite au même endroit, de peur d’être découverts et anéantis. On les imagine mal s’en prendre à des objectifs militaires en Mauritanie. Surtout à la base de Bassikounou.

Outre la légèreté dont elle a fait preuve en s’associant à une opération mal goupillée, la France a commis une faute diplomatique en envoyant ses soldats et ses moyens militaires participer à un acte de guerre à 150 kilomètres à l’intérieur du territoire malien, sans en informer les autorités maliennes.

Car ce qui est choquant et inacceptable dans cette affaire, c’est que la Mauritanie, qui l’a inspirée, a réussi à entraîner dans son sillage la France et l’Algérie dans un complot qui a abouti à une violation caractérisée  du territoire malien. Lorsque Mohamed Ould Abdel Aziz a réussi, à la faveur de la célébration du 14 juillet à Paris, à vendre à Sarkozy, au cours d’un entretien entouré de la plus grande discrétion, son projet d’attaquer AQMI au Mali avec l’appui de la France, il a été entendu que Bamako n’en sache rien. Mohamed Ould Abdel Aziz et le président Bouteflika sont en froid avec ATT qu’ils considèrent comme le complice voire l’allié des terroristes. Depuis la libération de Pierre Camatte, voici cinq mois, ils ont rappelé leurs ambassadeurs au Mali et entretiennent avec notre pays le contact minimum. Feignant de ne pas s’en apercevoir, ATT continue à courtiser les deux hommes. Dernier geste de sa part, la désignation d’un nouvel ambassadeur en Algérie, il y a seulement quelques jours.

Le Mali ne doit pas être informé de crainte que des fuites dans l’entourage présidentiel, très peu fiable, n’alertent AQMI. L’opération se fera très vite, comme le Blitz allemand sur l’Angleterre durant la Seconde guerre mondiale. Avant que le Mali ne réalise ce qui se passe dans un coin de son immense désert, tout sera terminé. En tout état de cause, si d’aventure Bamako venait à protester de cette intrusion sur son territoire, il lui serait opposé le droit de poursuite qu’il a concédé à tous ses voisins dans le cadre de la lutte anti-terroriste. Peu importe que pour l’application de ce dispositif, il soit informé ne serait-ce que pour la politesse.

L’Algérie, elle, est mise dans le coup. D’après la presse algérienne, elle a fourni de la logistique et rassemblé ses troupes à la frontière au cas où les terroristes, fuyant l’assaut franco-mauritanien, tenteraient de se refugier sur son territoire.

Si l’opération franco-mauritano-algérienne avait été couronnée de succès, ATT ne serait plus bon à ramasser avec une cuillère à pot. Nouakchott et Alger l’auraient mis au ban de la communauté internationale, auraient pavoisé en criant sur toutes les tribunes du monde : « Nous avons toujours dit que les terroristes n’entendent que le langage de la force. On ne pactise pas avec le diable on le détruit ».

Au lieu de cela, pour leur infortune, les deux capitales sont réduites au silence. Elles doivent admettre, pour leur grande confusion, que ‘’la méthode ATT’’ a été, jusque-là, plus payante que la leur. Pierre Camatte est en vie dans sa France natale. Quid de Michel Germaneau ?

 Une autre vérité qu’il leur faut bien regarder en face : si l’armée malienne avait été associée à l’opération, ses chances de succès auraient été plus élevées.  Les terroristes auraient été pris en étau, certains auraient pu être capturés vivants et constituer une précieuse source d’information pour récupérer l’otage français.     

Saouti Labass HAIDARA     

 

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