Les affrontements entre les parties signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, ont freiné le processus, et posent plusieurs questions sur son avenir.
Il nous faut faire un bond en arrière, revenir en Mai 2014, lorsque des affrontements meurtriers opposent l’armée malienne et la Coordination des mouvements de l’Azawad à dominante Ifoghas, dans la ville de Kidal, suite à la visite du Premier Ministre Moussa Mara. L’armée malienne sera vaincue et boutée hors de la ville. Suite à cela la CMA décidera de “vider” la ville de tous les soutiens de l’Etat malien, parmi lesquels des membres de la Communauté Imghad, pas tout à fait acquis à leur cause.
Cet évènement, entrainera la création du Groupe touareg imghad et alliés, qui formera la Plateforme avec le Mouvement arabe de l’Azawad branche lemhar et le groupe d’autodéfense songhay CMFPR 1. L’objectif du Gatia était selon les dires de ses fondateurs, de protéger la communauté Imghad contre les “persécutions” des Ifoghas, détenteurs du pouvoir local. Cependant, il faut noter qu’un fort ressentiment existait déjà entre ces deux communautés.
De 2014 à nos jours, ces deux groupes, se sont affrontés à de multiples reprises, pour des raisons liées au partage du pouvoir politique, aux divers trafics dans la zone, et pour des vengeances liées aux évènements qui se seraient passés lors des soulèvements passés.
L’Accord pour la paix, connait des difficultés majeures, du fait de ce cycle de violence entre deux des principaux signataires. Toutes les mesures consensuelles ont été bloquées, ou vidées de leurs substances, ce qui n’est pas de nature à permettre une application efficiente. L’Accord est fortement impacté par le manque de confiance entre ces deux communautés, qui paraissent aujourd’hui irréconciliables.
Lorsque dans un pays, deux communautés fortement armées, décidées à en découdre menacent la paix et la stabilité, il est du rôle des pouvoirs publics d’intervenir et de tout faire pour rétablir la paix et la concorde. Sauf que dans le cas présent, l’Etat est plutôt en position de faiblesse, et semble reticent à s’impliquer dans cette crise.
L’Accord pour la paix et plus généralement, la Communauté internationale sont sous le feu des critiques, on reproche notamment à la Minusma et à la force Barkhane une forme de duplicité, et une prétendue volonté de maintenir le conflit au Mali pour des intérêts occultes. C’est trop vite oublier que si aujourd’hui l’Accord est dans l’impasse c’est le fait des parties elles memes, qui ont ignoré le calendrier de mise en œuvre de l’Accord, qui prévoyait le cantonnement, le DDR dans une période de 60 jours après la signature de l’Accord, et qui ont préféré débattre six mois des indemnités et de la prise en charge des membres du Comité de suivi de cet Accord, ainsi que de la place de chacun autour de latable, laissant la voie libre aux opposants de la paix.
C’est ignorer également que dans le même laps de temps deux initiatives, visant à contourner les dispositions de l’Accord pour la paix ont été prises par les parties, il s’agit de la rencontre intercommunautaire d’Anefis, puis du forum de Kidal, pour un résultat nul.
La paix ne reviendra pas dans le septentrion tant qu’on ne prendra pas en compte l’ensemble des facteurs régissant ce conflit intercommunautaire, et parmi ses facteurs, il y a la question d’Iyad Ag Ghali, dont on sait qu’il a mis en garde les leaders de la CMA contre l’installation du MOC à Kidal, qui signerait le retour de l’Etat et du Gatia dans la ville.
L’Etat doit s’impliquer dans le conflit et trouver une solution consensuelle qui permette de satisfaire toutes les parties, sans verser dans le cosmétique. La solution à ce conflit est un préalable pour l’application sincère de l’Accord pour la paix. La situation impacte toutes les régions, de plus, ces deux groupes étant au niveau politique de la mise en œuvre de l’Accord, mettront tout en œuvre pour bloquer le processus, tant que ce conflit ne s’éteindra pas.
Il y a besoin donc de définir une nouvelle stratégie entre parties maliennes, et un nouveau calendrier, pour d’une partie donner une reponse politique à ce conflit communautaire, puis débuter le processus de désarmement une fois la confiance installée. Le leadership appartient à l’Etat, aux décideurs deprendre les décisions adéquates.