La France est engagée depuis le 11 janvier 2013 dans une guerre contre le terrorisme au Mali et dans le Sahel en général pour, dit-on, annihiler en amont les actes terroristes susceptibles d’atteindre l’Europe et par la même occasion mettre fin aux prises d’otages dont les groupes terroriste qui opèrent dans le sahel en ont fait un fonds de commerce. On se souvient des otages français capturés soit au Mali soit au Niger et dont certains ont été échangés contre de fortes rançons et d’autres exécutés par ces groupes terroristes. Mais ce n’est pas pour cela seulement que l’armée française est aujourd’hui au Mali.
L’armée française est intervenue au Mali le 11 janvier 2013 à la demande express du président de la transition malienne Monsieur Dioncounda Traoré pour stopper l’avancée des hordes jihadistes et narcoterroristes, qui après avoir attaqué la localité de Kona fonçaient tout droit vers le sud du Mali : un scenario catastrophe pour le Mali et l’ensemble de la sous région que la communauté internationale ne pouvait accepter.
Cette opération de l’armée française baptisée «Opération Serval », en référence à un félin du désert, a été prompte, efficace et a certainement sauvé le bateau Mali de couler. En ce jour du 11 janvier 2013, les avions Rafales et les hélicoptères d’attaque Gazelles de l’armée française on décollé de leur base de N’Djamena au Tchad pour neutraliser les envahisseurs aux portes de Mopti la 5e région du Mali. Le Mali tout entier a poussé un ouf de soulagement car sans cette intervention, le Mali serait aujourd’hui le deuxième pays, et avant lui l’Afghanistan, d’être sous le contrôle total des terroristes et des djihadistes qui veulent imposer leur islam au reste du monde y compris le monde musulman.
Il faut tout de même rappeler que cette situation dans le nord du Mali est la résultante directe d’une rébellion récurrente au Mali depuis 1963 date de la première rébellion qui réclame l’indépendance ou a défaut l’autonomie de cette partie du territoire malien. Les rebelles touaregs du Mouvement de Libération de l’Azawad (MNLA) soutenu par la France de Nicolas Sarkozy ont déclenché une unième rébellion en janvier 2011, mais cette fois ci avec l’appui des terroristes et narcotrafiquants venus de la Libye du colonel Kadhafi dont la France venait d’attaquer, la suite est connue…
Mais, après cette victoire de l’armée française sur les terroristes à Kona, quelle suite pour l’Opération Serval maintenant que les terroristes ont été stoppés net dans leur offensive vers le reste du pays ?
La réponse à cette question dévoilera tout l’enjeu de cette guerre au Mali. Elle nous permettra de savoir que la France avait bien calculé son coup et va profiter de cette intervention militaire pour imposer au Mali un accord de défense. La France à longtemps lorgné le septentrion malien et ne pouvait aucunement laisser passer cette opportunité de sceller définitivement le sort du nord Mali. Suite à cette intervention, le Mali a été ainsi forcé de signer un accord de défense avec la France qui autorise l’armée française de disposer d’une base militaire au nord précisément à Tessalit.
Avant l’Opération serval, le Mali qui avait, un an auparavant, connu un coup d’Etat perpétré par le capitaine Sanogo et qui avait plongé le pays dans une crise institutionnelle et sécuritaire, était dirigé par un président intérimaire en la personne de M. Dioncounda Traore président de l’assemblée nationale. Le président ATT fut forcé à la démission après le coup d’Etat du capitaine Sanogo alors qu’il ne lui restait pratiquement que deux mois au pouvoir. Le président ATT était à son deuxième et dernier mandat comme le stipule la constitution malienne. Donc, le Mali traversait déjà en 2012 une période trouble avec ce pronunciamiento des soldats de Kati contre le régime démocratiquement élu. Ces deux événements (coup d’Etat et occupation du nord par les terroristes) étaient un cocktail mortel pour le Mali, mais du pain bénit pour la France.
C’est ce coup d’Etat « idiot » de mars 2012 qui a précipité l’effondrement de l’état central et favorisé la prise des trois régions du nord du Mali soit les 2/3 du pays par les différents groupes terroristes et narcotrafiquants qui l’on l’occupé 9 mois durant jusqu’à l’arrivée des forces françaises en janvier 2013. Pendant 9 mois le Mali était coupé en deux. Naturellement, le peuple malien s’attendait à une reconquête rapide des régions perdues de la part de son armée, mais malheureusement cette armée s’était automutilée et la défense nationale s’est écroulée comme un château de cartes laissant le Mali et le peuple malien dans le désarroi et à la merci des envahisseurs.
L’intervention de l’armée française en ce jour de janvier 2013 a été une fabuleuse occasion pour la France de prendre sa revanche sur le Mali. En effet, 50 ans jour pour jour après que la jeune république du Mali eut ordonné, le 20 janvier 1962, aux troupes françaises d’évacuer les bases de Gao et de Tessalit, voilà que le 11 janvier 20213 la même république du Mali faisait appel aux mêmes troupes françaises pour voler à son secours. Quelle ironie du sort !
L’Opération Serval a été une aubaine pour la France car elle venait t’offrir à la France l’opportunité de réaliser son vieux rêve celui de récupérer la base de Tessalit qu’elle avait évacuée il y a près de 50 ans avec beaucoup d’amertume et d’humiliation.
Jamais auparavant une ancienne colonie n’avait osé dire aux français de déguerpir son territoire, jamais un pays africain n’avait autant contrarié les ambitions françaises sur son sol et jamais la France n’a cessé d’œuvrer pour déstabiliser et faire plier une de ces anciennes colonies en occurrence le Mali. On peut logiquement résumer les relations franco-maliennes, avant cette intervention, comme boiteuses : de Modibo Keita, le premier président du Mali, en passant par le General Moussa Traore, Alpha O. Konaré et ATT, les relations entre le Mali et la France ont été toujours tumultueuses, parfois tendues.
Les forces françaises qui n’étaient au début de l’Opération Serval qu’un millier d’hommes sont montées en puissance pour atteindre 3000 soldats. Ensuite, de l’hypothèse d’un appui aérien à l’armée malienne, nous sommes passés à une intervention terrestre des troupes françaises pour reconquérir les régions nord du Mali avec en leur compagnie les forces maliennes.
Les occupants terroristes du nord du Mali furent chassés et le Mali récupéra seulement qu’une partie de son territoire car la région de Kidal n’a pas subit le même traitement que celles de Gao et Tombouctou en ce sens que seule l’armée française est allée à Kidal laissant derrière elle les forces maliennes.
Cette attitude de la France n’a pas échappé au peuple malien qui ne cessait de se poser la question pourquoi son armée était restée à la porte de Kidal et pourquoi les rebelles Touaregs flânaient dans Kidal avec leurs armées ?
Même aujourd’hui, la ville de Kidal reste toujours inaccessible à l’armée malienne, elle est toujours sous le contrôle des rebelles Touareg et leurs alliés terroristes d’Almourabitoune et d’Ançar dine. Kidal, un no man’s land, devenu le terreau fertile pour toutes sortes de crimes et de trafics. Conséquence directe de l’immixtion française dans cette partie du Mali et pire elle a permis aux nombreux groupes terroristes et narcotrafiquants de se recycler en rejoignant les rangs du MNLA : les protégés des français dans cette guerre contre le Mali.
François Hollande, le président français, a été célébré à Bamako après cette reconquête comme le sauveur et son armée comme des libérateurs. L’hystérie collective des habitants de Gao et Tombouctou était indescriptible lors de la visite de F. Holland dans ces 2 régions là. Le président Holland venait de ressusciter un grand pays en totale déliquescence, un pays qui a brillé pendant des siècles, un pays qui fut un temps le centre du monde intellectuel avec ses universités et ses grands savants. Il venait de redonner espoir à tout un peuple.
Cette euphorie passée, les maliens se rendirent à l’évidence que cette intervention des forces françaises n’était pas dépourvue d’intérêts et d’arrière pensée et qu’elles étaient là au Mali pour y rester. Mais comme le président français a eu l’honnêteté de déclarer que la France venait de payer une dette de sang envers le Mali alors, a partir de la, la France pouvait sans complexe ouvrir un nouveau chapitre dans ses rapports avec le Mali.
En effet, depuis la fin des opérations d’envergures au nord du Mali, la France va s’empresser de changer la mission de l’opération serval qui était sous la coupole de l’ONU pour créer une autre opération confiée cette fois-ci aux seules troupes françaises dénommée Opération Barkhane dont le commandement sera basé à N’Djamena, mais les troupes françaises seront stationnées a Kidal.
On comprend mieux maintenant que la région de Kidal ne sera pas de retour dans le giron malien d’aussitôt car Kidal et toutes les régions du nord de notre pays constituent un enjeu géostratégique, économique, idéologique et ethnico culturel. Kidal représente un enjeu majeur qui dépasse le seul cadre national.
Lors de l’élection présidentielle de 2012, il a fallu recourir à l’accord de Ouaga pour sauver le processus électoral car Kidal a tout simplement failli ne pas prendre part au scrutin. Aucun candidat à l’élection n’a pu mener campagne dans la ville de Kidal excepté le candidat IBK. Une situation ubuesque qu’aucun malien n’arrive jusqu’ici à expliquer. Les forces françaises de l’Opération Serval étaient entrées seules à Kidal sans les troupes maliennes contrairement aux régions de Gao et de Tombouctou conquises quelques jours plutôt.
C’est bien cette attitude française de bloquer les forces maliennes d’y pénétrer dans la ville de Kidal qui a trahi les français et mit à nu les vraies intentions de la France vis-à-vis des régions nord de notre pays et plus singulièrement celle de Kidal.
Aujourd’hui la question de la ville de Kidal reste une épine dans les pieds du président IBK car c’est sur cette promesse de récupérer Kidal qu’il a été presque plébiscité lors de l’élection présidentielle de 2013. Mais aujourd’hui aucune présence, ne serait ce qu’un drapeau malien, n’est visible à Kidal. La petite et timide présence de l’administration et d’un contingent de quelques 200 soldats maliens qui s’y trouvaient ont été chassés de la ville de Kidal lors de la visite inopportune de l’ex premier Ministre Moussa Mara. L’armée malienne a été défaite la -bas sans que personne ne sache comment cela a pu se produire.
De résolution en résolution devant le conseil de sécurité des Nations Unies, la France va subtilement se dérober de sa mission première celle qui consistait a aidé l’armée malienne dans la reconquête de son territoire pour changer de statut en devenant tout simplement une force luttant contre le terrorisme dans toute la bande sahélo saharienne(un territoire aussi vaste que l’Europe). Ainsi, l’Opération Serval est morte. vive l’Opération Barkhane !
Quelle prétention démesurer de sécuriser un espace plus grand que toute l’Europe occidentale avec seulement 3000 soldats ?
Personne n’est dupe ! Car si l’on analyse bien la situation sur le terrain, on voit qu’il est pratiquement difficile de contrôler efficacement la bande Sahélo- Saharienne qui comprend : le Tchad, le Niger, le Burkina, la Mauritanie et le Mali- un territoire aussi grand que l’Europe- avec si peu d’homme (3000 hommes). La France a tout simplement évolué sous le drapeau des Nations Unies pour ne pas être soupçonnée de recoloniser le Mali afin de mettre en œuvre son vieux projet des états riverains du sahel.
Nous assistons tous les jours à des actes meurtriers des groupes terroristes dans le nord du Mali ni la mission onusienne : la MINUSMA ni la force Barkhane ne sont capables d’arrêter ces actes ainsi que les tirs d’obus en direction de leurs camps. Toute la région est livrée aux bandits armés et groupes terroristes sans que la France n’arrive à les stopper. Boko Haram fait ravage au Tchad et au Niger sans que la force Barkhane n’intervienne là-bas. Pourtant ils font parti du champ d’action de Barkhane. Les patrouilles de l’armée malienne sont soigneusement encadrées par l’armée française histoire de s’assurer qu’elle ne puisse entreprendre des initiatives contraires au plan machiavélique de la France.
La France n’est pas sincère quant elle prétend surveiller l’ensemble de la bande Sahélienne ave seulement 3000 hommes. C’est un subterfuge cette opération Barkhane.
C’est sous le couvert de l’opération Barkhane que la France vient de faire mains basse sur les régions du nord du Mali dont l’objectif final est la partition du Mali aux fins de créer une nouvelle entité qui deviendrait une nouvelle source d’approvisionnement pour les entreprises françaises car on nous apprend que la région de Kidal regorge d’énormes ressources : gaz, pétrole, uranium, or et quoi d’autre. Pour s’en convaincre on voit que Total (la vache laitière de la France) fait pousser comme des champignons des stations d’essence partout à travers notre capitale Bamako et tout cela en prélude de l’exploitation prochaine du pétrole au nord du Mali.
La position stratégique de Tessalit est unique selon les spécialistes militaires, mais le Mali a manqué de vision politique quant il s’est agit de louer cette base aux américains. Tous les régimes successifs du Mali ont commis cette grave erreur d’appréciation, maintenant voila que les français ont réussi à s’installer là ou les américains auraient aimé avoir. Sans doute que le sort de la région serait différente que celle que nous connaissons aujourd’hui.
La région de Kidal représente un enjeu économique et stratégique pour les grandes puissances, qui se sont, malheureusement entendues sur le dos du Mali. La messe est dite et c’est à nous maliens de réinventer la roue. Ce que la France connait aujourd’hui sur le sous sol de Kidal si elle savait cela en 1960, le Mali serait indépendant sans Kidal.
Faisons maintenant un parallèle entre les différentes interventions françaises en Afrique Francophone
On constate partout en Afrique Francophone ou la France intervient que le mode opératoire est le même. En Cote D’ivoire nous avons l’ONUCI et puis l’opération Licorne des forces françaises, au Mali nous avons la MUNISMA et à coté l’opération Barkhane, en Centre Afrique il ya la MUNISCA et l’opération Sangaris. Toutes ces opérations françaises font suite à des conflits presque interethniques ou interconfessionnels : en RCI c’étaient les peuples du nord communément appelés Dioula contre les peuples du centre et l’ouest du pays c’est-à-dire les Bétés, au Mali c’est les Touaregs du nord contre le reste du pays et enfin en RCA c’est les chrétiens contre les musulmans.
La France n’a pas véritablement les moyens de sa politique expansionniste et néocolonialiste. Elle est incapable d’entretenir une expédition militaire d’envergure, mais à chaque fois la France se sert des Nations Unies pour supporter les dépenses engendrées par ses engagements militaires et par le même biais elle essaye de satisfaire ses besoins économiques et stratégiques. Car derrière ses interventions militaires ce sont les entreprises françaises qui bénéficient en premier des <biens faits> de ces conflits et de l’intervention de la France dans ces pays francophones en guerre.
Une stratégie qui tranche avec celle des Américains qui eux préfèrent tout simplement obtenir la caution morale des Nations Unies et procéder seuls à leur conquête. Ainsi, va le monde ! Il est donc clair que l’opération Barkhane est une leurre et ne pourra jamais garantir la paix ni la sécurité chez nous ici au Mali encore moins dans la bande Sahélienne.
C’est une méthode cynique et barbare que d’utiliser les pauvres populations des régions d’Afrique Francophone les unes contre les autres aux fins d’assouvir son appétit glouton. La France a trouvé dans les guerres fratricides en Afrique francophone, provoquées et parfois soutenues par elle, et les interventions onusiennes un moyens subtil de faire main basse sur les ressources naturelles des ses anciennes colonies afin d’assurer son développement économique et maintenir son rang de 6e puissance mondiale
D. MAO DIANÉ
Analyste politique