S’il est vrai que des lueurs d’espoirs de sortie de crise s’offrent à notre pays en vue de l’organisation de la présidentielle du 28 juillet prochain, à travers l’accord signé le 18 juin à Ougadougou, il faudrait reconnaître que c’est grâce à des hommes. Ceux-ci se sont illustrés soit positivement, soit négativement. Notre analyse.
Tiébilé Dramé :
L’émissaire et le patriote qui fait la paix
En choisissant Tiébilé Dramé, émissaire dans la crise du nord, le président de la République par intérim a vu juste et bien. Car, l’homme a réussi avec brio sa mission, en un laps de temps. Normal, pour qui connaît le combat que mène le président du parti Parena, afin que le septentrion retrouve sa quiétude d’antan. De son passage à la tête du département des zones arides et semi-arides, il a accumulé une riche expérience lui permettant de gérer la crise avec aisance. Pour l’histoire, Tiébilé Dramé était le seul Malien à être parvenu à faire parler les anciens rebelles publiquement, à travers un grand forum qu’il avait organisé.
Le dossier du nord, il en a fait son cheval de bataille et n’a cessé d’appeler les pouvoirs publics d’alors à accorder une attention particulière à une question aux ramifications diverses. Mais, hélas ! Il a été peu écouté. La suite, on la connaît. Le pays a basculé dans le chaos, faute de gouvernance et d’anticipation. Mieux, au moment où une bonne partie de l’opinion s’entredéchirait, Dramé avait créé avec d’autres Maliens soucieux de la stabilité du pays, la Coalition pour le Mali qui, à travers des assises de l’occupation, a permis de traiter de fond en comble les difficultés occasionnées par l’insurrection armée.
Les conclusions de ce forum ont été qualitatives dans la marche vers la sortie de crise. En clair, Tiébilé Dramé connaît, pour l’avoir géré à maintes reprises, la question du nord. C’est ce qui justifie son succès dans les négociations de Ouagadougou. Avec méthode et tact, il a fait entendre la voix du Mali écornée en signant un accord avec les groupes armés, pour l’organisation de la présidentielle de juillet, notamment à Kidal. Aussi, il a pu obtenir le cantonnement des éléments armés. C’est en raison de tous ses efforts que nous lui attribuons le titre de héros et de patriote. Car, tout au long des 30 jours qu’a duré sa mission, il a vu et tout entendu, mais il est resté serein et imperturbable.
Colonel Abdrahamane Baby
L’officier des missions difficiles
Ancien directeur du Prytanée militaire, le Colonel Abdrahamane Baby est depuis quelques mois Conseiller technique au ministère de la Défense et des Anciens combattants. C’est à ce titre qu’il était à Ouagadougou pour les pourparlers entre le gouvernement et les groupes armés du nord. Il fait partie des trois officiers supérieurs dépêchés sur place, pour gérer les questions militaires dans l’accord du 18 juin dernier.
Discret et effacé, mais très efficace à la tâche, le Colonel Abdrahamane Baby connaît parfaitement la question du nord et il l’a démontré face aux représentants du Mnla et du Hcua. Mieux, il a défendu avec énergie et abnégation la position du Mali, notamment le retour des forces armées et de sécurité à Kidal, le cantonnement et le désarmement des groupes armés. Membre de la Commission mixte de sécurité créée par l’accord, le valeureux officier veillera inlassablement à ce que la position du Mali domine.
Ahmed Ould Sidi Mohamed, Maa
Le doyen qui a déjoué les pièges du Mnla
Les pourparlers de Ouagadougou ont été riches en enseignements. Et comme on pouvait s’y attendre, la communauté arabe, à travers le Mouvement arabe de l’Azawad (Maa), a montré ses muscles. Dans ses rangs, un combattant pas comme les autres, le doyen Ahmed Ould Sidi Mohamed, qui s’est illustré par ses prises de position en faveur d’un Mali uni et indivisible. Il s’est démarqué catégoriquement de l’option séparatiste prônée par le Mlna et alliés. Ce qui a été bien compris par la médiation et la Communauté internationale, longtemps bernées par les groupes armés qui prétendent agir au nom des Touaregs. Tout comme à l’audience que le médiateur leur a accordée lors de la signature de l’accord, il a voulu faire passer un message, pour dire que cela suffit maintenant. Malgré son âge, 80 ans révolus, Ahmed Ould Sidi Mohamed a été très actif et a apporté la réplique, chaque fois qu’il le fallait, aux bandits du Mnla et alliés.
Ag Bibi en disgrâce
Nous étions l’un des rares reporters à reconnaître Hamada Ag Bibi, l’ancien leader rebelle de l’Alliance du 23 mai pour le changement signataire de l’accord d’Alger en 2006. C’est lui qui avait paraphé le document au nom des rebelles, aux cotés de Kafougouna Koné. Par la suite, Ag Bibi est élu député à l’Assemblée nationale, dans des conditions troubles. Porte-parole attitré de l’Alliance, il était très écouté par la bande de Bahanga. Mais, lors de pourparlers de Ouagadougou, l’homme bleu était presqu’oublié. Ce sont les enfants du vieux Intallah qui lui ont ravi la vedette. Marginalisé et sans poids véritable, c’est à la fin des travaux qu’Ag Bibi a fait son apparition. Du coup, l’on se demande ce qui a pu bien arriver à celui qui défiait le régime d’alors et qui était l’épicentre de l’attaque du camp militaire d’Abéibara en 2006. Hélas ! Même, étant député à l’hémicycle, Ag Bibi ne s’était pas empêché d’orchestrer l’insurrection armée de 2012.
Alpha Mahamane Cissé
Envoyé spécial à Ouagadougou