Les rideaux sont tombés samedi sur les travaux du colloque international dont le thème était : « Quelles constructions politiques dans la zone sahélo-saharienne ? Réflexion sur les pistes de solutions politiques et sécuritaires pour une sortie de crise au Mali et la stabilité de la zone sahélo-saharienne ». La cérémonie de clôture a été présidée par le ministre de la Réconciliation nationale, Zahabi Ould Sidy Mohamed, fraîchement rentré d’Alger, où il a pris part aux pourparlers entre le gouvernement et les mouvements armés du nord, et qui ont abouti à la signature de la feuille de route devant guider les futures négociations.
Le ministre de la Réconciliation nationale avait à ses côtés son collègue de l’Economie numérique, de l’Information et de la Communication, Mahamadou Camara, l’initiateur du forum et un parterre d’éminentes personnalités politiques, de la société civile et d’universitaires.
Les trois jours de travaux ont été sanctionnés par une batterie de recommandations parmi lesquelles, l’on retiendra la création d’une structure d’anticipation des crises autour des chercheurs maliens, la mise en place d’un code de bonne conduite pour les journalistes en temps de crise, ou encore la promotion d’un nouveau roman national incluant toutes les composantes communautaires du pays.
Le premier groupe de travail présidé par professeur Issaka Bagayoko, anthropologue-philosophe, et Khattali Mohamed Ag Ahmed comme rapporteur, s’est penché sur le thème « les défis politiques, économiques et sécuritaires dans la zone sahélo-saharienne ». Les panelistes étaient Ahmed Ould Abdallah, diplomate mauritanien et ancien représentant du Secrétaire général des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest, Abdoulaye Mohamadou, chercheur et directeur de cabinet au ministère des Affaires étrangères du Niger. Il a entretenu l’auditoire sur le sous thème » Développement local et pastoralisme : des opportunités multiples pour le Sahel ».
Michel Galy, politologue et sociologue, professeur de relations internationales à l’ILERI a exposé sur le sous-thème « les déséquilibres des territoires, géopolitiques de la déstabilisation, Nord/Sud, figures spatiales des guerres nomades ». Laurence Aida Ammour, experte en défense et sécurité au Maghreb et dans la zone sahélo-saharienne, a consacré sa communication sur « le défi de repenser les frontières dans la zone sahélo-saharienne ».
Alain Antil, chercheur et responsable du programme Afrique subsaharienne à l’IFRI s’est appesantie sur « la question de la citoyenneté à géométrie variables Sahel, une des matrices des crises. Exemple mauritanien et ses voisins ».
L’intervention de Georg Klute, anthropologue, professeur d’université à l’Université de Bayreuth a porté son intervention « le problème de la violence, des ordres sociaux en compétition et la politique locale. Perspectives anthropologiques sur le nord du Mali. »
Il s’agissait dans ce premier panel de répondre à une série de questionnements relative à la stratégie et au schéma d’accompagnement des négociations à proposer pour aboutir à des solutions négociées, acceptables et durables. Il s’agissait aussi de définir le rôle pour les acteurs internationaux engagés dans un soutien actif au processus de paix malien dans les négociations. Les panelistes devraient également réfléchir sur l’architecture permettant d’assurer l’inclusion de l’ensemble des Maliens dans un processus de dialogue, sur le double plan local et national.
Le deuxième atelier était présidé par le professeur Bintou Sanankoua, historienne chercheur en sciences sociales et ancienne professeure à l’Ecole normale supérieure (ENSUP) et ancien député à l’Assemblée nationale. Elle était assistée de Maïga Sina Demba, ancien ministre. La thématique traitée dans cet atelier était « Négociations et dialogue inter-malien pour une paix durable ». Les panelistes étaient Ahmed Baba Miské, diplomate et ancien ambassadeur de Mauritanie, artisan du Pacte national avec Edgar Pisani. Tiébilé Dramé, ancien ministre représentants du gouvernement dans les négociations qui ont abouti à la signature de l’Accord préliminaire de Ouagadougou en juin 2013, Acheikh Ibn Oumar, ancien ministre des Affaires étrangères du Tchad et Eric Blanchot, expert et formateur à la négociation ou à la médiation, enseignant à Paris I, à l’ENA et pour l’UNITAR et Mme Djourté Fatoumata Dembélé avocate et directrice de la Maison de la femme.
Ce groupe devrait répondre aux questionnements : Négociations et accord de paix : leçons et limites des crises précédentes et extérieurs ; quelle architecture d’un processus de paix porteur de légitimité et de solutions durables pour l’ensemble des Maliens ? ; Comment préparer les négociations ? Quels rôles pour les médiateurs et les facilitateurs officiels ? Comment le gouvernement et les ministères techniques peuvent-ils accompagner la préparation des négociations, la mise en oeuvre du dialogue inter-malien, et la mise en oeuvre de l’accord de paix pour favoriser la construction d’une paix durable ? Comment coordonner les autres politiques publiques à la préparation et à la mise en oeuvre des négociations ?
Le troisième atelier était présidé par le professeur Doulaye Konaté, historien archéologue, président de l’Association des historiens africains, assisté de Mahamadou Konaté comme rapporteur. Il a traité le thème de la « Recherche des solutions durables aux crises maliennes ». Les panelistes étaient Pierre Boiley, historien, Paris I, directeur de l’Institut des Mondes africains -IMAF. Il a épluché le sous-thème « Mali, quel passé pour quel futur ? ». Joseph Brunet-Jailly, économiste s’est penché sur les « Conditions d’une paix globale et définitive. Moussa Sow, ethnolinguiste, directeur de recherche à l’Institut des Sciences humaines du Mali. Il a traité du sous-thème « Quelques leçons à travers la tradition orale et la gouvernance locale ».
Les questions traitées dans cet atelier sont : quelles propositions de solution envisagées aux différents niveaux institutionnels et selon les zones géographiques, concernant les objets de négociations décrites dans l’Accord préliminaire de Ouagadougou ? Est-ce que d’autres thématiques qui représentent également des défis face à la résolution du conflit et au retour à une paix durable, doivent être envisagées dans la recherche de solutions durables aux crises maliennes ?
L’atelier 4, présidé par le professeur Issa N’Diaye, professeur à l’Université de Bamako, ancien ministre de l’Education, de la Culture et de la Recherche scientifique, assisté de Ali Sangaré, rapporteur. Le sous -thème abordé dans cet atelier est « Processus de réconciliation et culture de la paix : le rôle des acteurs institutionnels, des médias et autres acteurs de la société civile ». Les panelistes étaient Hamdaoun Touré, conseiller en communication du Premier ministre, ancien ministre de la Communication, ancien porte-parole de l’ONUCI. Il a travaillé sur le sous-thème « Le rôle des médias dans les conflits, réflexion sur la crise malienne ». Mahamadou Camara, ministre de l’Economie numérique, de l’information et de la communication ; Andrew Morgan, journaliste et écrivain ; Aminata Dramane Traoré, auteure et coordinatrice du Forum pour un Mali (FORAM) et directrice du Centre Amadou Hampäté Ba (CAHBA) ; Attaher Ag Iknane, secrétaire général du ministère de la Réconciliation nationale ; Gaoussou Drabo, ancien ministre de la Communication ; Sébastian Elischer, politologue, Institut des affaires africaines (GIGA) Allemagne. Il a exposé sur la « Culture de la paix, réconciliation et diversité musulmane au Mali et au Niger ».
LE DESIR DE VIVRE ENSEMBLE. L’atelier 4 devrait répondre à des préoccupations ainsi formulées « le discours des acteurs dans le paradigme de la crise malienne : quel a été le rôle des médias nationaux et internationaux dans la guerre au Mali ? », « Quels ont été les enjeux de la communication dans la crise malienne ? Architecture d’un processus de réconciliation : un processus interindividuel, intercommunautaire, local et national » ; « Quelles leçons peut-on tirer des processus de réconciliation nationale ailleurs et comment éviter les écueils dans la mise en oeuvre du processus malien ? » ; « Quels rôles les différents médias, locaux et nationaux peuvent-ils jouer dans l’accompagnement et le contrôle de la mise en oeuvre des différentes étapes du processus de paix, de la préparation aux négociations à la réconciliation nationale ? » ; « Comment le travail de communication gouvernementale peut-il accompagner les différentes étapes du processus de paix ?
A la cérémonie de clôture, le ministre de la Réconciliation nationale, Zahabi Ould Sidi Mohamed, a donné la promesse ferme du gouvernement va s’approprier les résultats du colloque, d’en faire une exploitation judicieuse durant les différentes étapes des négociations et d’en remettre aux mouvements armés pour qu’ils en fassent de même.
Zahabi Ould Didi Mohamed s’est montré très optimiste quant à l’issue des discussions en soulignant qu’à Alger, toutes les parties (gouvernement et mouvements armés) ont réaffirmé leur désir du vivre ensemble dans un pays Un et indivisible, laïc et pluriel. Elles ont également marqué leur détermination à rester dans les limites de l’intégrité du territoire national et se sont engagées à privilégier le dialogue comme mode de règlement du différend.
S’il se veut optimiste, le ministre, pense toutefois que les négociations à venir seront beaucoup plus dures que lors du premier round qui s’est achevé la semaine dernière. Avec ces négociations, l’on l’impression d’un répétition de l’histoire. Cela parce que les accords précédents ont été soit insuffisamment mis en oeuvre ou pas du tout, du fait parfois de la faiblesse des ressources de l’Etat. C’est pourquoi, cette fois, les négociateurs se montrent parfois trop exigeants sur des points précis. Le premier round des discussions qui a été obtenu à l’arrachée donne un avant goût des difficultés qui attendent les négociateurs maliens. C’est pour cette raison que les propositions et recommandations du colloque sont les bienvenues. Elles permettront d’outiller les négociateurs, d’arguments pour faire valoir certaines positions de l’Etat sur des questions précises, a assuré. « N’ayez pas le sentiment d’avoir perdu votre temps. Car non seulement le gouvernement fera siennes vos recommandations, mais s’emploiera à les partager avec les mouvements armés pour un usage bénéfique pour le Mali. » a t-il promis.
A. O. DIALLO