L’installation des autorités intérimaires de Tombouctou et Taoudéni a été une nouvelle fois reportée. Prévue pour ce jeudi, la cérémonie d’installation devrait finalement avoir lieu le 19 avril prochain selon les autorités régionales. C’est le 4e report de la mise en place des autorités intérimaires dans ces deux régions.
A Tombouctou, les autorités régionales justifient ce report par le remaniement ministériel survenu ce mardi. Selon elles, il s’agit de permettre au nouveau ministre de l’administration territoriale de s’imprégner du dossier des autorités intérimaires.
De leur côté, la société civile et le Congrès pour la Justice dans l’Azawad campent sur leur position. Selon eux, il n’y aura pas d’installation d’autorités intérimaires sans leur implication dans le processus de mise en œuvre de l’accord de paix et de réconciliation.
Leurs responsables ont organisé mercredi une marche pacifique pour protester contre la mise en place de ces autorités. Dans une déclaration remise au gouverneur de Tombouctou, le CJA estime que ses doléances n’ont toujours pas été satisfaites par le gouvernement après un mois de négociation. Les responsables du mouvement espèrent qu’une solution à l’amiable sera trouvée d’ici le 19 avril prochain.
La société civile de Tombouctou n’est pas en marge de cette contestation. Une centaine de personnes ont participé hier à la marche contre l’installation des autorités intérimaires de ces localités. Selon des responsables du forum des organisations de la société civile de Tombouctou, ces autorités ne sont pas représentatives de la population. Ils demandent au gouvernement de tenir ses promesses. Baba Moulaye est le président du forum régional des organisations de la société civile de Tombouctou :
« Nous allons continuer à battre le pavé. Vous avez vu, on ne se fatigue pas. Nos militants sont composés des femmes et des jeunes. Elles ne se fatiguent pas parce qu’il s’agit de l’avenir de nos enfants et de l’avenir de ce pays. Nous demandons d’être impliqués dans tous les organes d’exécution de l’accord de paix, dans tous les organes sans exception. Nous le demandons au nom du CJA et au nom de la société civile. Nous demandons l’inclusivité au niveau des autorités intérimaires. Nous voulons nous reconnaître dans ces autorités intérimaires. Parce que présentement, nous ne nous retrouvons pas dans la liste que nous voyons. Vous voyez, déjà des gens qui doivent œuvrer pour la cohésion sociale, si nous, population de Tombouctou, ne sommes pas là dans, comment pourrons-nous jouer notre rôle d’artisan de la paix et de la cohésion sociale ? Il y a eu violation, même si il y a de promesses, ce sont des promesses qui ne sont pas écrites. On s’en méfie.»
Pour certains analystes, ces reports se justifient par le jeu d’intérêt des parties concernées. Selon Ibrahim Ely Dicko, spécialiste des questions sécuritaires « au-delà de l’aspect sécuritaire, il y a d’autres enjeux géopolitiques qui boycottent ou qui retardent le processus » .
«Tout ça on est dans des jeux d’intérêts. C’est vrai qu’il y a eu des consultations par ci et par là pour trouver des personnes de consensus, mais la partie qui se sent lésée essaye de boycotter le processus ou le retarder pour finalement trouver le meilleur terrain d’entente. A défaut donc de voir son candidat nommé comme responsable intérimaire, il faut trouver d’autres contreparties qui peuvent être financières, ou qui peuvent être en termes de nomination dans d’autres postes. On est vraiment dans un jeu d’intérêt ce qui fait que les uns et les autres se servent des populations alors qu’au même moment ces populations souffrent. Même si le premier jour, les autorités avaient été désignées par Bamako ou par les autres parties et qu’on les avait installé le premier jour sans report, le problème n’allait pas être forcément résolu par ce que ce problème est assez complexe. Au-delà de l’aspect sécuritaire, il y a d’autres enjeux géopolitiques qui sous-entendent toute cette dynamique».
Avec Studio Tamani