Les vrombissements de la douzaine de véhicules 4X4 se font entendre sur la piste sablonneuse entre Gorom Gorom et Dori, située au nord-est du Burkina Faso, chef-lieu du département portant le même nom dans la province Séno, région Sahel. Nous sommes le jeudi 21 juin 2012 où trois membres du Gouvernement maliens sont partis à la rencontre de plus de 24 000 de leurs compatriotes ayant fui les régions nord du Mali pour élire, temporairement, domicile, dans les camps de Fererio et Gandafabou. Dans le cortège, l’ambassadeur du Mali au Burkina Faso, Mamadou Traoré, le Gouverneur de la région, le Colonel Makor Yougou Boureima, les responsables des Ministères burkinabè en charge de la question des refugiés à savoir le CONAREF (Comité national des refugiés), les organismes d’aide humanitaire (HCR, PAM…).
Vu l’ampleur de la situation, souvent pénible de ces maliens «dessouchés », au gré des événements, le Gouvernement a bien fait d’envoyer, sur le terrain, les Ministres de l’Action Humanitaire, de la Solidarité et des Personnes Agées, Dr. Mamadou Sidibé, de l’Education de Base, de l’Alphabétisation et de la Promotion des Langues nationales, Adama Ouane, et celui de la Famille, de la Promotion de la femme et de l’Enfant, Mme Alwata Ichata Sahi.
Il ne pouvait en être autrement, d’autant que le pays des hommes intègres accueille neuf (9) camps de réfugiés maliens qui se recensent principalement dans les provinces d’Oudalan, du Séno et du Soum, au nord du pays. Aussi, sont-ils présents à Ouagadougou dans le camp de Somgandé et à Bobo Dioulasso, dans l’enceinte du Stade Wobi. Les chiffrent varient. Ce dont on est sûr et certain : ce sont des milliers et des milliers de personnes (hommes, femmes, jeunes, enfants).
« Ce spectacle, avec toutes ses tentes alignées, me chagrine. J’ai le cœur qui saigne », confesse le Ministre de l’Education de Base, de l’Alphabétisation et de la Promotion des Langues nationales, Adama Ouane, le chef de la délégation malienne, au cours de la rencontre d’avec les réfugiés venus massivement à l’écoute.
L’officiel malien, tout comme ses autres homologues de l’Action Humanitaire et de la famille, a transmis le salut fraternel des autorités maliennes, avec en tête le Président de la République de la
transition Dioncounda Traoré, au Gouvernement du Burkina Faso pour avoir accueilli nos compatriotes.
Pour le Ministre de l’Action Humanitaire, de la Solidarité et des Personnes Agées, Dr. Mamadou Sidibé, le Gouvernement a tenu à organiser cette première mission officielle dans l’optique de recenser les besoins des refugiés, les écouter en vu d’y apporter, dans un bref délai, des solutions.
De son côté, la Ministre de la Famille, de la Promotion de la femme et de l’Enfant, Mme Alwata Ichata Sahi, a imploré le bon Dieu pour une résolution rapide de la crise afin que tous les maliens du Burkina Faso puissent, rapidement, regagner le pays. Elle s’exprimait le mercredi 20 juin 2012, à Djibo, au cours de la célébration de la 12ème journée international des nations unies pour les refugiés. Une cérémonie dont le Mali était l’invité, présidée par le Ministre burkinabè des Affaires Etrangères et de la Coopération régionale, Djibril Bassolé. La délégation malienne a saisi cette occasion pour remettre des dons aux réfugiés. Ils se composent de 10 tonnes de riz, 90 sacs de lait en poudre, 27 cartons d’huile, 36 sacs de sucre, 27 cartons de savon et 18 sacs de sel.
De l’avis du médiateur à la crise malienne, le Gouvernement malien, en envoyant trois de ces membres au Burkina Faso au chevet des réfugiés, mesure tout l’enjeu de la crise. Il a appelé tous les protagonistes au conflit au dialogue sincère et franc.
Au cours de plusieurs échanges que les Ministres maliens ont eu avec leurs compatriotes, nombreuses sont les préoccupations soulevées : problèmes de paiement des salaires des refugiés fonctionnaires, la scolarisation des enfants, problèmes de paiement des loyers pour ceux d’entre eux qui sont dans les grandes villes, la question du retour définitif au pays, le problème des animaux abandonnés au pays, l’intervention militaire étrangère, la venue tardive des autorités maliennes dans les camps…
A ces questions, les réponses des officiels maliens furent on ne peut plus claires. « Nous vivons le même drame que vous. Le gouvernement fera tout son possible pour vous apporter son aide. Personne ne sera oublié. Seulement, notre agenda nous imposait de faire face d’abord au flux de déplacés intérieurs. C’est pourquoi, nous nous attelions à envoyer deux convois humanitaires au nord du pays. Nous ne sommes pas là pour faire de la politique », indique le Ministre de l’Action Humanitaire, de la Solidarité et des Personnes Agées, Dr. Mamadou Sidibé.
« Avec votre venue, c’est maintenant que nous avons su que nous sommes réellement des maliens. L’on se sentait abandonnés. Il faut créer les conditions de la paix. Privilégions le dialogue. Nous ne voulons pas une intervention étrangère sur le sol malien », souligne Aminata Walett Fatoumata Baye, présente dans le camp de Somgandé, à Ouagadoudou.
Pour Mohamed Ould Mohamed, porte parole des réfugiés de Mintao, le désarroi est le lot quotidien de ces compatriotes. « J’ai du mal à comprendre que chaque fois qu’il ya un coup de feu au Nord de notre pays, nous devenons automatiquement des cibles. Nous sommes à notre énième fuite au Burkina Faso, un pays d’hospitalité. Nous nous sentons orphelins. Il faut définitivement trouver une solution à cette situation qui n’a que trop duré », dira-t-il.
« Ne rejetez pas votre pays, le Mali. Sachez que si ton couteau te blesse, l’on ne le jette pas. On le nettoie et le remettre dans son fourreau », a dit l’ambassadeur du Mali au Burkina Faso, Mamadou
Traoré. Cette pensée du diplomate malien a sûrement ramolli quelques énergumènes qui tenaient des propos va-t-en-guerre à profusion.
Une correspondance particulière d’Ibrahim Guindo