Gestion du pouvoir – crise de Kidal – Bande Sahelo-Saharienne : Les vérités d’ATT

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Notre pays a abrité, du 14 au 16 octobre derniers, la 3ème conférence bi annuelle du Forum des éditeurs africains (TAEF). Le thème : « les médias et la paix en Afrique ». Occasion pour le chef de l’Etat, Amadou Toumani Touré, qui a présidé la cérémonie d’ouverture, d’évoquer devant des journalistes de plus 40 pays africains, sa conception de la gestion consensuelle du pouvoir et de la rébellion armée au nord du Mali et de la situation sécuritaire dans la bande sahélo saharienne.

« Notre continent, l’Afrique, est-il en paix aujourd’hui ? » ; « Nos pays sont-ils plus sûrs aujourd’hui qu’hier ? » Deux questions posées par le président de la Maison de la presse du Mali, Makan Koné, pour dit-il, situer l’importance du sujet (qui a réuni à Bamako les plus grandes sommités de la presse africaine) : « les médias et la paix en Afrique ». Il n’y avait pas meilleur intervenant que le président de la République pour répondre à ces questions. Amadou Toumani Touré n’a pas ménagé ses efforts pour partager son point de vue avec les participants.

 

Le président de la République a entamé son intervention par des notes d’espoir qui semblent répondre à la préoccupation du président de la maison de la presse. Pour Amadou Toumani Touré, le continent africain est nettement plus sûr aujourd’hui que les années 90 avec son cortège de génocides, de guerres civiles et de rébellions. Le chef de l’Etat, qui a suivi ces douloureux évènements de près en tant que médiateur et facilitateur, a accepté d’intervenir (lors du forum) en tant que témoin et d’évoquer sa conception de la gestion consensuelle du pouvoir et de la rébellion au nord du Mali notamment la gestion de la crise survenue après l’attaque du 23 Mai 2006 de la ville de Kidal. Pour convaincre les éditeurs africains de l’importance de la communication dans le règlement de tout conflit, ATT a longuement cité le célèbre journaliste et écrivain sénégalais, El Hadj Hamidou Kassé, dont le dernier livre est intitulé « La Communication en temps de campagne électorale : le style ATT ». Impressionné par ce livre, ATT dit ne pas pouvoir s’empêcher de lire une partie de l’introduction pour soutenir son intervention et montrer l’importance des médias dans la construction de la paix. « La communication est sur toutes les lèvres. C’est l’un des vocables les plus visités et les plus usités du lexique contemporain. Entreprises, partis politiques, institutions publiques, organisations internationales, projets et programmes de développement, Organisations non gouvernementales, institutions religieuses, aucun de nos espaces d’expression n’échappe à l’emprise de cette notion aux frontières floues, glissantes et peu saisissables. Elle s’applique à tous les sujets, produits, services et secteurs de notre vie sociale, économique, culturelle, politique, diplomatique, scientifique et spirituelle.

 

Communiquer devient à la fois nécessité et directive, exigence et urgence. Elle se donne à travers plusieurs portes d’entrée : par les contenus, par les supports, formes et espaces d’information et d’échange, par les technologies dites nouvelles, par les actes et autres opérations destinés à influencer des décisions ou à changer des comportements, etc. Ou encore par les réseaux sociaux de type nouveau dont le web est le support privilégié.

 

Nous sommes à l’ère du « tout communication ». Dans le champ des pratiques politiques le « tout communication » se manifeste de façon saisissante. Les succès et les échecs d’un projet politique sont expliqués systématiquement par une bonne communication ou par une mauvaise communication…. », a cité, entre autres, le Chef de l’Etat.

Gestion consensuelle : les convictions d’ATT

S’agissant de la gestion consensuelle du pouvoir, le chef de l’Etat affirme ne rien regretté car c’est « une démarche consciente et volontaire », qui avait pour but le développement du Mali. Cette idée de gestion consensuelle du pouvoir ne date pas de 2002, selon le président de la République. Elle a commencé à prendre corps le lendemain du coup d’Etat de 1991 où le président du Comité de réconciliation national, Amadou Toumani Touré, a demandé à ses compagnons militaires de partager le pouvoir avec les représentants les plus en vue du mouvement démocratique. En retournant aux affaires en 2002, le président élu en tant qu’indépendant, n’a pas hésité à faire recours à la gestion consensuelle du pouvoir dont il a gardé de très bons souvenirs. L’homme dit avoir trouvé que la meilleure façon de gérer un pays, c’est de mettre ensemble toutes les énergies. «J’ai toujours souhaité que le pouvoir soit un facteur de cohésion et non de division dans le respect de toutes les libertés… », a précisé le Chef de l’Etat.

Crise du Nord : le dialogue comme arme

Concernant sa gestion de la crise du nord en 2006 avec l’Alliance du 23 Mai pour le changement, Amadou Toumani Touré a expliqué comment il s’en est pris au déclenchement du mouvement. « J’étais à Kayes quand on m’a informé de la situation. J’étais en communication directe avec ceux qui étaient sur le terrain. J’entendais même souvent des tirs et ceux avec lesquels j’étais en contact me rassuraient et me disaient que Kidal n’allait jamais tomber aux mains des insurgés qui se sont fait appeler plus tard Alliance du 23 Mai pour le changement. J’étais dans le véhicule en route pour Diéma et je me demandais quelle conduite tenir dans de telle circonstance. J’ai pris un bic et une feuille pour rédiger mon message à la nation. C’est à Diéma que je me suis adressé à la nation en demandant aux populations de ne pas faire d’amalgame. Ceux qui ont pris les armes ne sont qu’une petite minorité de la population de Kidal… », a expliqué le chef de l’Etat, qui a souligné toute l’incompréhension dont il a fait l’objet dans la gestion de cette crise. « Que voulez-vous, je ne pourrais pas aller expliquer tout ce qui entoure cette affaire au marché. Ce n’est pas une chose de ce genre. Nous avons privilégié le dialogue et la concertation pour venir au bout de cette crise…» a précisé Amadou Toumani Touré.

Bande Sahélo saharienne : le Mali n’est pas le maillon faible…

Evoquant l’insécurité dans la bande sahélo saharienne, Le président de la République a expliqué aux journalistes africains les efforts déployés par notre pays pour instaurer la sécurité dans la bande. « Ce que vous devez savoir, c’est que cette guerre dans la bande sahélo saharienne n’est pas malienne. Elle a été importée. Et aucun pays ne peut seul faire cette guerre dont les adversaires sont venus d’ailleurs. La bande sahélo saharienne couvre plus de 8 millions de km2. C’est pourquoi, j’ai réclamé depuis 2004, un sommet sur la paix et le développement des chefs d’Etat des pays membres de la bande sahélo saharienne. Nous avons franchi toutes les étapes, mais on n’arrive pas à regrouper les chefs d’Etats. Quand un dit qu’il va venir, un autre dit si tel chef d’Etat vient, lui ne viendra pas. Malgré tout, certains disent que le Mali est le maillon faible. Mais lors du défié du 22 septembre, beaucoup ont compris que nous ne sommes pas le maillon faible. Le problème, c’est qu’il n’y a pas de chaîne… », a fustigé le président de la République devant des observateurs avertis. Il conclut qu’aucun parti seul, ni aucun groupe de partis seul, ne pourra désormais gérer seul le pays. ATT conseille aussi de toujours mettre en avant dans les conflits armés, le dialogue et la concertation. Le chef de l’Etat n’était pas venu au forum en qualité de conférencier, mais son intervention aurait certainement donné un coup d’accélérateur au sujet du jour : les médias et la paix en Afrique.

 

Le TAEF a saisi l’occasion pour remettre, lors d’un dîner gala présidé par le Premier ministre Modibo Sidibé, des diplômes de reconnaissance à des dirigeants et journalistes africains, qui ont contribué à l’émergence d’une presse libre en Afrique. Ils sont, entre autres, les anciens présidents du Mali, Alpha Oumar Konaré, de l’Afrique du Sud, Nelson Mandela et Thabo M’Béki, du Ghana, John Kufuor et la présidente du Libéria, Ellen Sirlef Johnson. Sans oublier certains de nos confrères victimes de répression dans leurs pays notamment Pius Njawe du Cameroun ; Deyda Hydara et Chief Manneh de

 

la Gambie ; Jean Leonard du Rwanda et Nobert Zongo du Burkina Faso.

 

La conférence a entre autres procédé également au renouvellement de son bureau en reconduisant le sud africain, Mathatha Tsedu à la tête de l’organisation.

 

Idrissa Maïga

 

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