Gestion du dossier du nord par IBK : une stratégie rigoureusement cohérente.

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IBK
Le president malien, Ibrahim Boubacar Keita

De l’indépendance du Mali à nos jours, tous les régimes ont été confrontés aux rebellions successives du septentrion. Différentes propositions visant à endiguer ce fléau ont été proposées pour venir à bout de cette redoutable équation : solution militaire et répressive, tolérances de milices d’autodéfense,  négociations politiques, compromis laxistes, etc. En dépit de toutes ces stratégies,  la question de fond est restée entière jusqu’à son épilogue fatal de la crise politico sécuritaire de 2012, qui a failli faire disparaitre le Mali en tant qu’Etat.  

 

C’est dans un tel contexte chargé que le Président Ibrahim Boubacar KEÏTA a été porté au pouvoir par le peuple malien qui voit en lui l’homme capable de restaurer l’autorité de l’Etat, l’intégrité territoriale et la dignité nationale.   L’avènement de l’homme a eu comme marqueur politique fondamental ces besoins, témoignant ainsi d’une aspiration vigoureuse au  redressement national.

 

Alors que certains, par sincérité patriotique et d’autres, par calculs purement politiciens, relèvent de plus en plus, avec insistance,  de ce qu’ils considèrent comme des « lenteurs » dans la mise en œuvre d’une solution musclée de ce dossier, tant est-il que « la restauration de l’autorité » est assimilée ici à l’autoritarisme et la force brutale, il convient d’affirmer avec vigueur cette vérité incontestable : dans la gestion de ce dossier, la stratégie adoptée par le Président de la République est rigoureusement cohérente.

 

Cette stratégie globale, qui s’inscrit dans la durée, fait appel à plusieurs instruments  de gouvernance qui fondent, in fine, une vision qui se décline en plusieurs aspects complémentaires : agenda de solution politique, discours de paix et d’apaisement, réforme et équipement de l’armée nationale, redéploiement global de l’Etat, grands travaux.

 

La particularité de la crise politico sécuritaire de 2012 est la jonction entre la rébellion classique et le mouvement djihadiste international. Cette jonction inédite et redoutable qui faisait l’affaire du mouvement djihadiste international, aujourd’hui en phase de redéploiement vers le sud, notamment  dans la bande sahélo saharienne (après avoir été mis en difficulté en Algérie,  en Afghanistan et en Irak), a donné à cette crise septentrionale malienne une dimension géopolitique mondiale. Les partenariats et le consensus qui ont été  obtenus autour de ce dossier relèvent en grande partie de la crainte qu’inspire à la communauté internationale  le terrorisme djihadiste.

 

L’adoption par le Président de la République du schéma de solution politique consacre son  sens du discernement stratégique, en ce qu’elle permet de ramener la question de la rébellion dans ses proportions strictement nationales, d’isoler l’élément étranger djihadiste et terroriste et maintenir ainsi l’engagement et le soutien indispensable de la communauté internationale, dont la préoccupation majeure est la lutte contre le terrorisme.

 

Le discours de paix et d’apaisement que le nouveau Président de la République porte délibérément depuis son élection, au grand dam des va t-en guerre,  témoigne non seulement de l’engagement sincère d’un chef soucieux d’épargner le sang de ses concitoyens dans une guerre fratricide en utilisant les  ressources nationales dans les actions de développement, mais induit aussi   une autre portée. En effet , en freinant les ardeurs les plus belliqueuses,  ce discours contribuera à coup sûr au recul des justifications radicales de la cause des rebelles : les rebellions se nourrissent de malentendus, de vendetta, de mépris social et d’amalgame culturel que la société, dont elles sont issues, pourrait être « victime» même de façon marginale et isolée.  Elles exploitent les travers les plus dérisoires pour se présenter en héros défenseurs de la communauté, afin de se mouvoir au sein de celle-ci dans sa lutte comme un poisson dans l’eau. Le discours de paix et d’apaisement pourrait être efficace dans la durée en s’attaquant à la source de légitimation  du projet irrédentiste.

 

Qui veut la paix prépare la guerre a-t-on coutume de dire. Le Président de la République est loin d’être naïf sachant que l’ambition démesurée des uns et la convoitise des puissances étrangères sont souvent des facteurs de tentative de déstabilisation nationale. La loi de programmation militaire et la reforme de l’armée en cours participent de cette grande ambition de redonner au Mali un outil de défense à même de dissuader avec crédibilité tout ennemi interne ou externe. Toutes choses qui ont cruellement fait défaut ces dernières années.
La solution durable de cette crise implique une réadaptation hardie de notre architecture institutionnelle sous forme d’une décentralisation bien réfléchie, cohérente, opérationnelle et participative.  Le report des élections municipales, ordonné par le gouvernement, démontre la volonté   de mieux finaliser le nouvel ordre administratif, capable de  prendre en charge les aspirations des populations.

On se focalise souvent, en parlant du redéploiement de l’Etat au nord, dans son aspect purement administratif alors que cette opération implique une dimension plus globale de satisfaction urgente des besoins sociaux de base de la population : école, électricité, eau, soins, routes, sécurité, etc. En somme, obligations régaliennes de l’Etat qui ne doivent pas attendre l’instauration définitive de la paix pour être accessibles, mais qui font partie des facteurs fondamentaux de promotion de la paix. Le Président IBK qui a donné des instructions fermes dans ce sens a pris la juste mesure des véritables enjeux de la sortie de crise.

 
La satisfaction des besoins élémentaires de la population n’est qu’une étape, certes importante dans la résolution globale de la crise, mais au-delà, il est aussi indispensable d’engager des travaux d’envergure de développement et de désenclavement à même de reconnecter définitivement le septentrion à la mère patrie. Des chantiers structurants et consolidant à la hauteur de la mission historique que le président IBK s’est assigné pour rompre à jamais le cycle infernal de conflits sanglants.
Le traumatisme national, consécutif à l’occupation de notre territoire, et les humiliations  provoquées par la condescendance de certains médiateurs  au plus fort moment de la faiblesse du Mali ont crée un sentiment collectif de désir profond de l’affirmation de la dignité nationale. La décision du Président de la République  d’imposer désormais la tenue de toutes les négociations sur le sol malien répond de manière quasi thérapeutique à cette aspiration légitime d’un peuple dont l’épaisseur de la civilisation est universellement reconnue. S’agissant du cas Kidal, il faudrait, avant toutes choses, s’entendre sur le sens des symboles : la présence dans cette ville du commandement territorial de la République, le gouvernorat, a définitivement réglé et dans les formes et dans le fond  la question de l’appartenance irréfutable de cette portion du territoire à l’Etat du Mali.

 

Reste alors la question opérationnelle de gestion administrative et sécuritaire. La phase actuelle de gestion de ce dossier engagée par le Mali et la communauté internationale permettra à court terme de clarifier la situation, dans la mesure où le principe de cantonnement qui est au cœur des négociations, nous donnera l’occasion de jauger la bonne volonté des uns et des autres et d’identifier les véritables fauteurs de trouble qui devront être combattus en conséquence.

 

L’amalgame est entretenu à dessein entre  les impératifs de gestion politique, administratif et sécuritaire qui relèvent exclusivement des prérogatives sacrées de l’Etat et le processus de réconciliation qui fait appel, dans sa mise en œuvre, à l’implication de toutes les sensibilités, sans hiérarchisation de représentativité. Le mauvais procès qu’on fait au gouvernement de privilégier ceux qui ont pris des armes dans la gestion de la crise au détriment des populations loyalistes ne se conçoit que dans cette approche de confusion de mission, selon qu’il s’agisse de sujets relevant strictement de la sécurité et de l’avenir politico-administratif du Mali ou de l’agenda de réconciliation de cœurs et des esprits qui s’inscrit dans la durée. Encore une fois, l’Etat garant de l’intégrité territoriale et de l’unité nationale, prérogative sacrée, en est le seul à apprécier selon les moyens dont ils dispose  le choix des opportunités, du timing et du profil de ses interlocuteurs dans le vaste chantier de gestion de survie qui est engagée dans cette crise.
En un mot, le temps politique et sécuritaire relève souvent de l’urgence et de l’immédiat  alors que le processus de réconciliation, qui est aussi indispensable pour installer une paix profonde, s’inscrit dans la durée, compte tenu des rancœurs et des incompréhensions accumulées dans le passé.

 

Moussa SOUMARE, Chercheur en sciences sociales
Bamako.

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6 COMMENTAIRES

  1. Moussa Soumare cherche a se faire engager dans un programme de l’état. C’est compris monsieur soumare, Presi a reçu votre CV, il vous contactera. Mais en regardant dans google on ne voit aucunes de vos publications en sciences sociales. N’avez vous pas fait plutôt des études en griotisme ?

  2. Cette analyse est tres insuffisante.L’auteur ne parle pas de l’aspect
    geo-politique.Les MNLA-touaregs sont bien instrumentalises car Rien ne tient dans la reclamation de ces rebelles du MNLA.S’ils ont pu egorger plus de 100 soldats Maliens sans que personne n’eleve la voix ni de la France ni de l’Europe,s’ils ont pu s’allier avec les extremistes d’Al-Quaida et continuer a recevoir la protection de la France et de certains parlementaires Europeens,ce n’est pas par des bonnes paroles qu’on arrivera a s’imposer a ces gens et a leurs allies.Ceux-ci ont une armee sur le champ de theatre,ils ont le MNLA pour perturber le climat de paix et le MNLA a aussi les extremistes d’Ancar Dine pour faire entendre les armes lourdes.Autre chose,comme disait ce Francais,il ne faudra pas s’etonner de voir l’Algerie chercher a s’emparer de la region de Kidal.Et qui d’autre!Notre politique,notre reponse aux jeux machiaveliques qui se jouent au Nord est-elle un contrepoids pour stopper ces tentatives d’annexions de part et d’autre.Voici le fonds du probleme.Completez donc votre analyse et vos propositions pour permettre au Gouvernement de reflechir advantage a la bonne reponse.C’est le souci de tout le monde.Une bonne idee que je partage avec vous.La procedure doit isoler les irreductibles (Une fraction,j’espere)et demander a l’armee de les reduire.

  3. Monsieur le chercheur,ce raisonnement tenait,si notre tres cher president n’avait pas passait 6 ans a la primature avec un controle total de l’assemblee nationale par son parti…

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