Présente au Mali depuis 2013, la Mission intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) peine toujours à gagner l’estime des populations de Gao qui ne ratent plus aucune occasion pour exprimer leur mécontentement. Résultat : la présence des casques bleus censée être un gage de sécurité et protection pour les populations et leurs biens est autrement ressentie aujourd’hui.
Il suffit de les côtoyer pour sentir le chagrin et le presque déboire des Gaois. Aux yeux du visiteur qui débarque à Gao, les habitants de la cité des Askia affichent un air serein et imperturbable, jouant presque au « Héro ». Ce n’est que dans l’apparence, la peur est comme refoulée. En discutant avec les habitants, on découvre que le danger est réel et ils sont conscients des menaces Djihadistes qui planent. Se sentant sans défense, ils se battent au quotidien pour ne pas céder à la panique, l’objectif recherché par l’ennemi qui multiplie les attaques terroristes. Les circonstances obligent, explique un vieux notable de la ville, très sceptique sur l’avenir : « nous n’avons personne sur qui compter et nulle part où aller. Gao est notre héritage. Donc pas question de trembler sous les balles de l’ennemi. Elle nous tuera tous où nous existerons après la crise», explique le vieux songhoï avec un regard dubitatif et plein d’inquiétudes. Car malgré une forte présence des casques bleus qui quadrillent la ville, les rapts d’individus et de véhicules demeurent toujours le quotidien des habitants.
Deux ans après Serval et la Minusma, Gao est resté une ville assiégée en proie aux menaces terroristes qui se font chaque fois en pleine journée et au plein cœur du centre-ville. Pire, les assaillants disparaissent impunément dans la nature après leur forfait. La dernière attaque des terroristes dans la ville remonte au vendredi 20 mars 2015 où un véhicule du gouvernorat de Kidal a été enlevé au quartier château devant le siège de la représentation aux environs de 21 heures par des individus armés. Face à ces attaques à répétition et de façon gratuite, les autorités locales de la région tentent de calmer les esprits surchauffés des populations en reconnaissant les efforts consentis par la Minusma avec la mention « Peut Mieux Faire », comme a dit le Gouverneur de Gao. Mais les populations civiles de Gao, les plus exposées à ces menaces terroristes, elles, ne se voilent pas la face pour cracher leur vérité. « La Minusma ne fait rien pour ramener la paix à Gao. Elle travaille à son maintien dans la durée en laissant toujours les bandits terroriser la ville », estime Ibrahim Maïga, un jeune hôtelier à Gao. Conséquence : la réticence observée par les populations sous l’occupation demeure toujours. La chaleur humaine et le caractère hospitalier et accueillant qui sont le naturel de la cité des Askia, s’amenuisent quelque peu. On devient plus méfiant les uns les autres et les discussions sont toujours renfermées en présence d’un étranger. Pire aujourd’hui, la confiance s’est effritée entre les populations civiles de la ville et les forces onusiennes venues les assister. La réconciliation entre Gao et la Minusma, tant indispensable pour le retour de la paix, devient un défi de plus en plus difficile.
Gao vit de l’Algérie et du Niger
Si les conséquences de la crise politico-sécuritaire de 2012 continuent à frapper le Mali en maintenant la plupart de ses régions dans un marasme économique sans précédent, la ville de Gao semble échapper à la situation économique nationale. Elle résiste à la crise grâce aux pays voisins (l’Algérie et le Niger) qui approvisionnent le marché local. En entrant au grand marché de la ville, l’on a l’impression d’être dans un supermarché à Alger ou dans une alimentation en plein centre de Niamey. « Les Gaois mangent et boivent à l’algérienne ou à la nigérienne à bon prix », rigole Moussa Touré, un boutiquier au grand marché de Gao. Des boissons aux boîtes de lait, du thé en passant par l’essence et les couvre-lits, le grand marché de Gao est inondé de produits de premières nécessités importés de l’Algérie et du Niger. Dans ce marché, on ne sait pas ce que sait que la boisson Bra-Mali ou encore le thé Baro de Farako à Sikasso. « Tu n’en trouveras pas », répond Salif Diallo un étalagiste à l’entrée du marché. Cette absence économique de l’Etat dans la région s’explique, selon lui, par l’état infernal et désastreux de l’axe Sévaré-Gao (long de 555 km) qui ne laisse pas le choix aux commerçants qui préfèrent se ravitailler à partir de l’Algérie ou du Niger. Gao est déconnecté du sud du pays par l’état de l’axe Sévaré-Gao.
Le gouvernorat de Kidal en insécurité à Gao
Délocalisé à Gao depuis la visite controversée de l’ancien Premier Moussa Mara à Kidal dans le but de sécuriser le personnel, le gouvernorat de Kidal continue toujours à être la cible des groupes armés. Comme pour dire que son personnel n’est nulle part en sécurité, un véhicule du service déconcentré de l’Etat à Kidal basé actuellement à Gao dans le quartier Château a été enlevé le 20 mars 2015 devant son siège. L’enlèvement a eu lieu aux environs de 21 heures juste après la rencontre entre le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation et les autorités administratives de Kidal. Le vol du véhicule a-t-il un lien avec la rencontre entre le ministre Abdoulaye Idrissa Maïga et les autorités administratives de la région de Kidal au siège du Conseil régional de Gao? Aucune information n’a été fournie sur le triste incident. Pour exprimer sa compassion au gouverneur Adama Kamissoko et à ses collaborateurs, le ministre s’est rendu sur les lieux le lendemain quelques minutes avant son départ pour Mopti.
Youssouf Z KEITA
De retour de la Cité des Askia
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