Samedi dernier, des « bandits armés », j’allais dire, des rebelles, ont attaqué la région frontalière de la Mauritanie, Nampala. Le bilan est très lourd : 9 militaires, 11 assaillants et 5 civils ont trouvé la mort dans cette attaque revendiquée par l’Alliance du Nord pour le Changement de Ibrahim Ag Bahanga. Ce dernier vient de rejeter l’accord cadre d’Alger de juillet 2006 affirmant qu’il est caduc. Du côté des rebelles, on affirme que l’armée a perdu 19 hommes. Face à ce jeu de ping-pong, le gouvernement, comme à son habitude, a condamné l’attaque dans un communiqué laconique. Mais ce qui a retenu l’attention des Maliens, c’est la réaction d’orgueil d’ATT depuis Kayes où il participe à l’ouverture de la Biennale. Aujourd’hui, les Maliens sont très mécontents face à ce discours creux. Du coup, celui qui est considéré comme un héros national est en train de perdre en crédibilité face à son laxisme dans la gestion maladroite de la crise au nord.
Cette attaque intervient après celle de la base militaire de Diabali par des rebelles, dans la nuit du 5 au 6 mai 2008, entre 03 h 30 et 04 h 00 du matin, emmenée par une cinquantaine d’hommes surarmés. Elle intervient aussi après qu’une délégation des Chefs de tribus du grand Sahara ait eu un entretien avec le Président de la République. L’objectif de cette mission, on se rappelle, était de convaincre les insurgés de Kidal à déposer les armes et à revenir à la maison mère. Faut-il conclure que la mission des chefs de tribus de Djibouti, d’Egypte, d’Erythrée, d’Irak, de Jordanie, Libye, Mali, Maroc, Mauritanie, Somalie, Soudan, Syrie, Tchad et Tanzanie, fut un échec ? Ce questionnement est d’autant plus fondé qu’après leur médiation, la situation a empiré. La stratégie de sortie de crise qui privilégie la voie du dialogue est certes salutaire, mais ATT ne fait pas honneur aux Maliens en laissant mourir des militaires maliens.
Dans un discours très ferme, ATT a indiqué que les bandits tirent sur tout ce qui bouge et que « nous ne pouvons pas continuer à souffrir ». Il s’est élevé contre l’exécution des militaires. « Pour qui ils se prennent ? » s’est interrogé le chef de l’Etat pour qui 12 milliards sont disponibles pour le développement des régions nord. « Trop c’est trop » a-t-il déclaré en mettant en garde les rebelles comme si une attaque imminente serait en cours.
Cette attaque de Nampala (500 kilomètres au nord est de Bamako), revendiquée par l’Alliance du Nord pour le Changement de Ibrahim Ag Bahanga, met un coup d’arrêt à l’Accord cadre d’Alger de juillet 2006. Le communiqué du ministère disait qu’il s’agit d’assaillants faisant partie d’une bande armée liée à des trafiquants de drogue. Mais la déclaration des « bandits armés » contredit cette version : « Cette attaque oblige le gouvernement à revenir à la table de négociation », faisait savoir un rebelle. Rétorque d’un officier de l’armée : « Nous n’avons pas quitté cette table ».
Face à ce jeu de ping-pong, le gouvernement, comme à son habitude, a condamné l’attaque dans un communiqué laconique. Cette attaque donne raison au Colonel Gabriel Poudiougo dont l’isolement, il n’y a pas longtemps, équivalait à une prison. Ce dernier avait, selon nos informations, démissionné. Il voulait utiliser la manière forte pour déloger les rebelles. On a mal interprété son dévouement patriotique. ATT a fini par prendre les devants en le nommant au forceps pour masquer d’une part la vérité, et d’autre part, pour éviter de mécontenter les dogons de l’armée qui pensaient à une offense contre eux. L’Etat malien est-il devenu une marionnette à la solde des rebelles ?
Sur le plan sécuritaire, c’est tout le Mali qui est en danger. Et la Sécurité d’Etat ? « Je ne sais pas comment travaille la SE », a indiqué un Malien depuis l’attaque de Diabali en mai 2008 avant qu’un second n’affirme : « Comment des groupes peuvent infiltrer le territoire alors qu’une Sécurité d’Etat existe ».
De toute vraisemblance, les unités militaires maliennes sont créées sans qu’il y ait de réels moyens logistiques.
Par rapport aux dispositions prises, les Maliens en ont assez des discours creux. C’est pourquoi les propos d’ATT seront entendus par une oreille de sourd. Au Mali, on ne joint pas la parole à l’acte, c’est-à-dire l’utile à l’agréable. En réalité, l’Etat a démissionné.
Issiaka Sidibé
Commentaires via Facebook :