Ils sont tous agents de l’Etat et enlevés depuis plusieurs mois. Parmi ces trois fonctionnaires, deux ont trouvé la mort d’après les informations recueillies. C’est dans le cadre d’une série de reportages et documentaires sur la situation au nord et au centre du pays, que Sahelien.com a pu rencontrer le troisième otage.
Le commandant de brigade de Guiré, Mamadou Diawara et le président du tribunal d’instance de Niono, Soungalo Koné, enlevés respectivement en octobre et novembre 2017 seraient « décédés des suites de maladie » a indiqué à notre reporter, un des ravisseurs se réclamant de la Katiba du Macina.
Après plusieurs tentatives et avec l’aide d’un fixeur, un rendez-vous a été obtenu, le 25 janvier dernier avec des membres du groupe qui détient ces fonctionnaires maliens.
Une des conditions pour pouvoir les rencontrer est que notre correspondant accepte d’avoir les yeux bandés durant le trajet. Le lieu, non plus, n’a pas été révélé. Après plusieurs heures de route, le point de rencontre se trouve être une zone relativement boisée. Une heure plus tard, un pick-up est arrivé avec à son bord, cinq hommes et l’otage Makan Doumbia. Sur place, ils ont installé ce dernier et mis derrière lui, un tissu de camouflage. Parmi les ravisseurs, un qui semble être leur chef s’est adressé en langue peulh à notre reporter en ces termes : « ne pose pas plus de trois questions ».
Enturbanné, barbe blanche, affaibli, M. Doumbia raconte ses conditions de détention : « quand on m’a pris, j’avais eu peur pour ma vie. Je pensais que je ne verrai plus des jours comme aujourd’hui, mais Dieu merci, quand on m’a amené, on m’a petit à petit rassuré. La couverture sur laquelle je suis assis, c’est le mouvement qui me l’a donnée pour me protéger contre le froid. Même sous la couverture, je grelotte à cause du froid. Je remercie le mouvement pour cela. Pour beaucoup de gens, le prisonnier n’a pas de droit, mais ce n’est pas le cas ici. »
Et de lancer un appel à sa famille : « je regrette beaucoup ce qui m’est arrivé, je n’avais pas souhaité ma vie comme ça. Je dis à mes femmes d’avoir beaucoup de courage. C’est en service public que j’ai été capturé. Je dis à mes enfants d’avoir beaucoup de courage surtout les trois premiers qui sont un peu plus grands de prendre soin de leur petit frère ».
Après la rencontre, nous avons cherché à avoir des nouvelles des autres otages à savoir le commandant de brigade de Guiré, Mamadou Diawara et le président du tribunal d’instance de Niono, Soungalo Koné. « Les trois otages étaient tous détenus dans le même lieu, mais les deux autres sont décédés des suites de maladie. Le CB de Guiré est mort, il y a deux mois de cela et le juge de Niono quelques jours plus tôt (avant l’entretien, ndlr) », a répondu l’un des membres du groupe sans plus de détails. A la fin de la rencontre, le fixeur et notre journaliste (les yeux bandés) sont partis en les laissant sur place.
Contacté par Sahelien.com, le ministère de la sécurité dit n’avoir aucune information sur le sort de ces otages. « Nous n’avons pas d’informations sur le sort de ces otages… et je viens de l’apprendre avec vous », mentionne M. Sangho, chargé de communication au ministère de la sécurité et de la protection civile.
Au centre du pays, les personnes susceptibles ou soupçonnées d’être proches de l’État, comme les fonctionnaires ou autorités traditionnelles sont souvent victimes d’enlèvement et parfois d’assassinat. Hier jeudi, deux otages de l’ONG CARE International ont été libérés, après “un raid aérien coordonné” entre les Forces armées maliennes et la Force française Barkhane dans le secteur de Dialloubé (région de Mopti), a indiqué le ministère malien de la Défense dans un communiqué
De Nara jusqu’à la frontière burkinabè, opère la Katiba du Macina, un groupe djihadiste majoritairement peulh, créé en janvier 2015 par Hamadoun Kouffa, un prédicateur bien connu dans la région. Il revendique l’instauration d’un califat dans cette partie du Mali. Cette Katiba est affiliée au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans né de la fusion, en mars 2017, d’Ansar Dine, d’AQMI au Sahel, d’Al-Mourabitoune et de la Katiba du Macina.
SOURCE : Sahelien.com