Enlèvement et exécution du douanier Merzouk, vendredi , à Teghargharet : Quand des règlements de compte se cachent derrière AQMI

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Enlevé la semaine dernière lors d’un rapt rondement mené dans les environs de Tessalit, le douanier Merzouk, qui s’est retrouvé dans les grottes du Tegharghar actuellement occupé par les ramifications d’Alqaïda dans le Sahara, a été beaucoup moins chanceux que Pierre Camate et même Michel Germaneau. Après quarante-huit heures seulement de détention, l’otage local a été froidement exécuté par des ravisseurs qui disent lui reprocher sa collaboration active  avec les services de sécurité maliens, à leur détriment. Le motif de la sentence, selon plusieurs sources concordantes, cache mal des motivations plus profondes : un différend communautaire qui couve depuis longtemps et pour la manifestation duquel Alqaïda semble servir de paravent.

L’enlèvement du Douanier Merzouk remonte précisément à la journée du mercredi dernier. Selon des sources bien introduites, l’embuscade dressée sur son chemin, à 50 kilomètres environ de Kidal, a d’abord eu raison du Préfet de Tessalit en personne, une prise que les ravisseurs ont choisi de retenir juste le temps de mettre la main sur leur vraie cible. Tombée dans leur nasse quelques heures après, le guide-douanier de Kidal a été conduit dans les grottes du Teghargharet après avoir essuyé plusieurs rafales dont il serait sorti avec des blessures plus ou moins sérieuses au crâne.

Une source proche des autorités administratives régionales de Kidal confie, par ailleurs, que les assaillants ont jugé opportun de laisser, entre les mains de leurs prises épargnées, un contact téléphonique pour les besoins de négociations éventuelles. Lesdites négociations, de sources concordantes, ont été effectivement enclenchées par les soins du président de l’Assemblée Régional de Kidal, Abdsalam Ag Assalat, un proche parmi les plus proches amis de l’otage. Celui-ci s’est notamment employé à l’envoi d’une équipe très consistante de négociateurs à Teghargharet, mais la démarche n’a rencontré de la part des interlocuteurs que refus catégorique au dialogue, tant était inflexible la détermination à en découdre par l’ultime sentence.

Les pourparlers s’étant révélés impossibles, le douanier Mohamed Ag Asharif Merzouk n’a pu échapper à l’abattoir. Son exécution est intervenue vendredi après-midi aux environs de 16 heures, selon le verdict d’un tribunal d’exception constitué pour la circonstance. La nouvelle a naturellement plongé dans le désarroi une composante sensible de populations de Kidal qui ne tarissent encore pas d’interrogations sur les motivations profondes d’une telle promptitude à se débarrasser d’un otage de la sorte. Sans réclamation de rançon, sans proposition d’échanges de prisonniers, l’otage n’a pas eu autant de chance que ses deux autres codétenus – dont la libération fait actuellement l’objet d’une négociation conduite par des chefs de fraction.    

Les interrogations sont d’autant plus justifiées que le triste épisode a été précédé de circonstances pour le moins curieuses. En clair, deux semaines auparavant, le président de l’Assemblée Régionale de Kidal, le plus proche ami de la victime, était la cible d’une menace de mort publiquement proférée par le nommé Ag Haoussa, arrêté puis libéré 48 heures plus tard. Il s’agit, à l’évidence, d’une manifestation parmi tant d’autres d’une rancœur sur fond de rivalités politiques découlant de bouleversements survenus lors des dernières élections communales.         

Une démarche de réconciliation avait du reste tout récemment réuni les différents protagonistes de cette crise aux relents communautaires, mais la tentative a été aussitôt vouée à l’échec, après l’épisode de l’enlèvement puis l’exécution du douanier Merzouk, un acte que nombre d’observateurs attribuent à des instigateurs tapis sous la couverture d’AQMI. Selon eux, le crime porte notamment les empreintes d’une ramification locale informelle d’Alqaïda, désignée sous le vocable ”Aliankhaz Taddak”, et qui utilise actuellement l’identité de l’organisation islamiste pour régler des comptes. Il s’agit de la même structure locale passée maître dans l’art de trafiquer les otages européens avec AQMI. Dans son collimateur, affirment nos sources, se trouve une longue liste de cadres civils et militaires qui risquent tous un règlement de compte par assassinat sous un faux manteau d’Alqaïda au Maghreb Islamique. Comme quoi, l’équation posée par cette organisation se déplace vers une dimension beaucoup plus inquiétante : une dangereuse infiltration de certaines communautés nordistes.          

 A. Keïta

 

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