Déstabilisation du Mali : Une genèse riche en enseignements pour l’avenir

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Malgré la signature d’un Accord pour la paix et la réconciliation nationale, il y a un an (15 mai-20 juin 2015), le Mali a du mal à voir le bout du tunnel, à retrouver sa paix et sa quiétude. Face à l’impasse actuelle, il est peut-être utile de refaire la genèse de cette déstabilisation afin d’en tirer les enseignements pouvant nous aider à la surmonter. C’est à cet exercice que s’est livré M. Fousseyni Camara, un intellectuel autodidacte de la Diaspora malienne en France, dans une contribution qu’il nous a fait parvenir.

A défaut de réaliser leur rêve d’indépendance et sous le prétexte d’un manque de perspectives dans les régions du nord, de jeunes touaregs ont fait le choix de se rendre en masse en Libye dans l’espoir d’une vie meilleure.

Un flux migratoire qui était comme du pain béni pour un certain Kadhafi qui possédait plus d’armes que d’hommes dans son armée, et qui avait une grande ambition de réunification de l’Afrique subsaharienne.

Et, certainement par manque de vision, nos dirigeants y trouvait leur compte, car ces jeunes chez Mouammar Kadhafi était la seule solution trouvée pour avoir un semblant de tranquillité voir de paix à l’interne, dans des régions difficiles à contrôler. En gros, une politique à courte vue.

Avec la crise libyenne et la mort de leur parrain, ces jeunes ont naturellement tenté de s’organiser à leur retour au pays pour se plaindre de «l’abandon du nord par l’Etat central». Pour le régime d’alors, la solution était toute trouvée: on s’est précipité avec des valises de billets de banque pour calmer leur ardeur ! Une naïveté criarde pour qui connaissait la motivation réelle de ces jeunes et surtout le deal passé avec la France, l’ancienne puissance coloniale.

Sans compter que, sans un projet structuré pour le développement du nord, tous ces milliards revenaient à Bamako dans une sorte de deal entre notabilités du nord et certains officiers supérieurs de l’armée malienne. Ces jeunes ne voyaient rien de concret pour le développement du nord.

Aucun de nos dirigeants n’a eu la présence d’esprit de se dire que ce n’est pas avec de l’argent que l’on peut corrompre ou détourner de son objectif un groupe homogène qui a des convictions.

Bien que je condamne fermement l’intervention de Nicolas Sarkozy (l’ancien président de la France) en Libye, il est surprenant que personne au Mali n’ait prévu les conséquences désastreuses de notre  politique extérieure le jour où Kadhafi ne serait plus à la tête de la Libye.

Il était la solution, le guide Libyen, un ami du Mali et sans oublier que sa maman est de l’ethnie touareg. Encore une solution à la malienne se traduisant par la facilité à laisser les autres résoudre nos problèmes.

Naturellement, ce qui devait arriver arriva: L’occident n’ayant jamais d’état d’âme quand il s’agit de protéger ses intérêts, a commis un double crime en se débarrassant d’un trublion et profiter pour laisser partir nos touaregs de Libye avec un arsenal impressionnant sans être inquiétés.

Que ces groupes rentrent chez eux au Mali pourquoi pas? Mais pourquoi rien n’a été fait pour les désarmer à leur départ de Libye ? Comment ont-ils fait tout ce trajet avec une telle facilité alors que nous n’avons pas de frontières commune avec la Libye?

La question que l’on se pose est la suivante: y a t-il eu des pressions des grandes puissances pour que nous les accueillions avec leurs armes sans les désarmer ? La réponse parait évidente, d’autant plus que les forces nigériennes auraient, à l’époque, bloqué des colonnes entières en attendant les instructions de Bamako pour les désarmer ou les laisser poursuivre leur chemin avec leur arsenal de déstabilisation.

Qu’ils soient d’Ançar Dine, du Mujao… Bref des 12 groupes armés qui sévissent au nord de notre pays, ils sont tous les dérivés du MNLA. Ils se répartissent les rôles avec un même objectif: L’indépendance de l’Azawad !

Les uns pensent qu’il faut d’abord saigner nos maigres ressources, faire du trafic de drogue et prendre le maximum d’otages pour de l’argent ou pour d’éventuels chantages politiques ou diplomatiques.

Les autres, plus cyniques, pensent qu’il faut nous couper les bras et les jambes, instaurer la Charia sur tout le Mali (le comble pour un pays musulman à une très grande majorité de sa population), mais tout en restant provisoirement dans le Mali.

Les intellos de toute cette troupe semblent gagner la partie car ils sont arrivés à convaincre la communauté internationale qu’un Mali sans armes se prépare à exterminer une minorité aux mains nues.

Et le Mali n’ayant aucune politique digne de ce nom au nord, les autres en ont dans leur boite à malice. Depuis 56 ans, la France n’attendait que ça.

L’ONU de son coté à cru à toutes les campagnes d’intox du MNLA qui fait du Mali un pays raciste, adepte de la ségrégation raciale qui cherche à les exterminer à cause de leur couleur de peau.

Opération Serval, une couverture pour mieux occuper une région toujours convoitée

L’avancée des réseaux terroristes vers le centre du Mali, offrait sans doute l’occasion tant rêvée au pouvoir français d’agir à couvert pour mieux contrôler une région qu’elle a tant convoitée.

Serval avait un double objectif: éparpiller les Jihadistes dans la nature et protéger Kidal contre vents et marées afin de contraindre les autorités maliennes à négocier avec des rebelles qui avaient pris les armes contre leur patrie. Le voyage du Premier ministre Moussa Mara n’était qu’un piège savamment monté par le MNLA et ses amis pour que nous ne ramenions rien qui soit bon pour notre pays.

«L’accord inter malien d’Alger n’est pas un très bon accord, mais c’est milles fois mieux que la guerre» ! C’est la phrase la plus terrible que j’ai entendue sur l’ORTM pendant les négociations d’Alger (Algérie) de la part du pouvoir, des notabilités et des leaders religieux. Les rebelles rassemblés par la suite au sein de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) n’en attendaient pas moins de la part de nos dignitaires.

Un aveu de faiblesse et d’impuissance qui suit encore le gouvernement malien qui se croit obligé de céder aux chantages et aux caprices des renégats d’hier qui pensent avoir retrouvé une légitimité avec le processus d’Alger et la signature de l’Accord de Bamako.

Cette abdication explique en partie la recrudescence de la violence avec son cortège de morts et de mutilés du coté de nos valeureux FAMA, de la Minusma et d’innocentes victimes. Aucun pays n’a connu une telle hécatombe après la signature d’un accord de paix.

Et cela va continuer tant que nous continuerons à leur donner tout sans rien en retour. Ils sont associés à la gestion de nos communes, leur réintégration se prépare minutieusement dans l’administration et dans les forces armées et de sécurité.

Pas de désarmement, pas de cantonnement ni même la possibilité pour nos officiels de se rendre à Kidal. Pendant ce temps, ces supposés «ex-rebelles», qui continuent à flirter avec Ançar Dine d’Iyad Ag Ghali à qui ils ne peuvent refuser grand-chose,  peuvent aller où bon leur semble sur le territoire malien et même sont accueillis par des salamalecs interminables de nos dirigeants.

Ni le Palais présidentiel ni nos meilleurs hôtels n’ont de secret pour eux et le tout au frais des pauvres contribuables maliens. Tout le monde se souvient de l’histoire des fameux 400 millions (ou plus) offerts aux groupes armés pour nous narguer sous une tente en guise de Forum.

Qu’est-ce qui arrive à notre pays ? C’est la question que je ne cesse de me poser. Je fais partie des «aigris» qui ont clamé : attention soyons très vigilants, ce n’est pas un accord que notre pays signe, mais un désaccord car ce dit accord n’est pas applicable. Et pire nous avons en face des gens de mauvaise foi !

Plus on nous fait croire à l’éventualité d’une paix, plus nous comptons nos morts tous les jours !

Puisse Dieu sauver le Mali.

Fousseyni Camara

PS : La titraille est de la rédaction

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3 COMMENTAIRES

  1. Les maliens ont ils oublié les otages libérés à coup de millions d'euros par l' intermédiaire de iyag ag depuis 2003.
    N'est ce pas ces millions d'euros qui permettent à l' homme de mener actuellement à merveille sa guérilla contre les forces maliennes et internationales.
    La source des problèmes du MALI d'ATT se trouve dans ces libérations d'otage.
    L' analyse de fousseyni Camara ne tient pas compte de ce aspect éminemment important .
    Le problème libyen a trouvé une situation désastreuse qui n'a fait que précipiter les événements que tout esprit éclairé voyait venir .
    L' honnêteté intellectuelle exige de clarifier que le groupe qui a bénéficié de l' argent d'ATT n'est pas celui qui a déclenché les hostilités.
    La bande terroriste qui a assassiné les soldats maliens à AGUEL HOC était installée sur le territoire malien depuis plusieurs années .
    Installation facilitée par la naïveté du président ATT en acceptant de négocier la libération des otages en contrepartie des millions d'euros

  2. Mr Fousséyni CAMARA , cette analyse est vielle comme le MALI.elle est vraie et terrible a entendre et à constater.
    Mais nous ne sommes plus au temps des constats mais au temps des propositions pour trouver la sortie.
    Or cette rengaine de complot est connue de tous les maliens même de tous les africains de l’ouest.
    la genèse, bien , on le sais on propose quoi pour la paix ?
    A croire que nous maquons d’idée, puisque dite vous même que cet analyse viens d’un intellectuelle autodidacte.
    Que mon frère intellectuelle autodidacte m’excuse, le Mali manque à ce point d’intellectuelles pour qu’on est besoin d’un autodidacte pour analyser les difficultés du pays?
    reconnaissez que c’est votre propre analyse, qui n’en est pas une, mais plutôt une poudre d’un kilomètre dans l’ oeil de chaque malien.
    osons des propositions !!!!.

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