Désaccord de paix dans le nord : La Minusma plus que jamais en disgrâce

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Mali: vers le renouvellement du mandat de la Minusma
Les casques bleus de la Minusma à Bamako.
Pierre René-Worms/RFI

Mardi dernier, les locaux de la Minusma (Mission multidimensionnelle intégrée des nations unies pour la stabilisation du mali) ont été assiégés par une foule de manifestants en colère, qui s’en sont pris aux forces onusiennes. Lesquelles ont pu repousser les assaillants à coup de tirs de sommation et de lancées de grenades lacrymogènes. Mais apparemment, les casques bleus ne se sont pas contentés de cela puisque trois personnes ont trouvé la mort pendant que quatre autres sont hospitalisées. Toutes ont été touchées par des balles réelles. Accusée, la Minusma a promis l’ouverture d’une enquête pour savoir qui a tiré à balle réelle. Et déjà, des enquêteurs procèderaient à l’analyse balistique des projectiles mortels pour déterminer leur origine.

A balles réelles

A l’origine de ce coup de colère des habitants de Gao, un document que la Minusma se proposait de faire signer aux différentes parties en conflit dans le nord, notamment la coordination des mouvements de l’Azawad (groupes rebelles,‘’ Mouvement national de libération de l’Azawad, Mnla, le Mouvement arabe de l’Azawad, MAA1, le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad, Hcua, la Coalition des peuples de l’Azawad, CPA et la Coordination des mouvements et forces patriotiques de résistance 2, Cmfpr2’’ réclamant un statut particulier pour les régions du nord) et la plateforme des groupes armés et d’autodéfense (essentiellement, Groupe d’autodéfense Imghad et alliés, Gatia, Cmfpr 1, MAA2, favorables au gouvernement et à l’intégrité territoriale). Ce document devrait consacrer le strict respect de l’accord de cessez-le-feu obtenu à Alger, en mai dernier, et le désarmement de tous les groupes armés non étatiques qui s’affrontent depuis quelques semaines dans la zone de Tabankort, à quelques dizaines de kilomètres de Kidal.

C’est dans cette zone que, il y a quelques jours, des forces de la Minusma avaient tiré sur un groupe de rebelles, faisant plusieurs morts. La Minusma avait alors été accusée de parti pris par la coordination des mouvements de l’Azawad, notamment le Mnla. Ce qu’ont nié des responsables onusiens qui ont affirmé avoir riposté à des tirs des rebelles pour se défendre et protéger les populations civiles, l’une de leurs missions fondamentales. Pas convaincue, la coordination des mouvements de l’Azawad avait décidé de rompre toute collaboration avec la Minusma, ce qui risquait de compliquer encore plus la tâche à la mission onusienne. Celle-ci a alors envisagé d’établir dans le nord une zone démilitarisée, en commençant par faire de Tabankort un périmètre temporaire de sécurité. De telles dispositions induisent et exigent le désarmement de tous les groupes armés, jugés pro ou anti gouvernementaux, évoluant dans ou autour de la localité. Selon certaines sources, craignant la montée sans cesse en puissance des groupes armés et d’autodéfense, notamment le Groupe d’autodéfense Imghad et alliés (Gatia), la coordination des mouvements armés de l’Azawad aurait accepté le principe, à condition que le désarmement commence par les autres, ceux-là mêmes qui sont en train de leur donner beaucoup trop de fil à retordre. Notamment en fortifiant leurs positions à Tabankort, devenue le bastion du Gatia mais qui se trouve  aussi trop proche de Kidal, le fief du Mnla et du Hcua.

Un mandat plus musclé

Si la Minusma a obtenu des mouvements rebelles un tel accord, elle n’a pas dû être assez explicite ou bavarde sur la question, car à Gao on a compris sa proposition comme une manœuvre onusienne tendant à affaiblir les capacités opérationnelles des mouvements d’autodéfense, de plus en plus actifs dans la région, au point d’être une sérieuse menace pour les positions des membres de la coordination, qui perdent depuis quelques temps leurs principaux alliés extérieurs en raison de leur intransigeance dans les négociations en cours en Algérie.

En attendant la reprise de ces négociations, prévue pour début février, qui promettent encore une fois d’être cahoteuses et laborieuses, les événements survenus à Kidal, la semaine dernière quand les casques bleus ont été attaqués par une foule en colère contre eux,  et à Gao, mardi dernier, démontrent à suffisance que la mission onusienne au Mali est prise entre le marteau de la coordination des mouvements de l’Azawad et l’enclume de la plateforme des groupes d’autodéfense. Mais, c’est le conseil de sécurité de l’Onu qui est en passe de prendre toute la responsabilité de ce qui se passe dans le nord, et surtout de ce qui ne s’y passe pas encore, à savoir le retour de la paix et de la stabilisation. A New York, en effet, on hésite toujours à muscler le mandat de la Minusma, de manière à ce qu’elle agisse non pas seulement pour se défendre avec des balles réelles contre des rebelles ou une foule en colère, mais aussi pour qu’elle passe à l’attaque. C’est cela la meilleure défense.

Cheick TANDINA

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