La conférence d’entente nationale : Une velléité de plus ?

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Mali: retour au calme à Kidal mais la tension demeure
Des rebelles du MNLA (Mouvement national de libération de l'Azawad), ici photographiés à Kidal dans le nord du Mali. © AFP PHOTO / KENZO TRIBOUILLARD

Le dictionnaire Larousse permet de définir la velléité comme l’incapacité de s’en tenir à une décision prise. Or, il se trouve que le président de la République, dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, convoque, dans le courant du mois de mars 2017, une Conférence d’entente nationale. Cette convocation ne risque-t-elle pas d’être un acte velléitaire ? Un de plus ?

En effet, depuis son accession à la magistrature suprême, que d’actes de ce genre restés sans suite !

En octobre 2013, les Etats généraux de la décentralisation, plus de six cents participants, trois jours de débats, pour rien. Un mois plus tard, les représentants de la classe politique, des chefs traditionnels et des chefs religieux réunis pour animer les Assises nationales pour le Nord, deux jours de débats pour permettre le « règlement définitif » des rébellions à répétitions dans cette partie du pays, pour rien. En  2014,  un atelier, organisé conjointement par le ministère de l’Administration territoriale et la Minusma pour solliciter la contribution des partis politiques pour la résolution du problème du Nord, deux jours de débats, pour rien.

Et, en mars prochain est prévue une Conférence d’entente nationale. Elle ne manque pas de laisser sceptique.

En effet, ce qui incite au scepticisme, c’est la raison même pour laquelle cette conférence est voulue : « permettre un débat approfondi entre les composantes de la Nation malienne sur les causes profondes du conflit. » (Extrait du projet de Termes de référence). Autant dire que l’on va se réunir pour rien car les causes du conflit ne font de doute pour personne : le conflit a, pour cause, le rejet de la République du Mali par l’une de ses composantes : quelques Arabo-Berbères.

S’intéressant à ces causes, votre hebdomadaire vous propose les lignes qui suivent, susceptibles d’apporter un éclairage sur la question. Les rébellions qui se sont succédé, de 1963 à ce jour, possèdent des causes à la fois lointaines et des causes immédiates. Dans la livraison de cette semaine, il sera question de données qui ne sauraient tromper sur ce à quoi leurs instigateurs veulent aboutir.

Les causes lointaines des rébellions remontent à l’année 1591. Les Touaregs, ou, plus précisément, les indépendantistes touaregs fondent leur velléité de sécession sur le fait que le Mali est une construction artificielle de la France dans laquelle ils ont été incorporés à leur corps défendant. La région qu’ils nomment Azawad et qui correspondrait, d’après leurs prétentions, aux régions de Gao, Kidal, Tombouctou et à une partie de la région de Mopti n’auraient eu aucun rapport avec le sud du pays. C’est la thèse défendue aussi bien par l’auteur du « Manifeste d’Ançar Eddin » que  par Ambéry Ag Rhissa au cours de l’émission « La marche du monde » du 18 janvier 2015, émission que propose RFI, une fois par semaine.

Dans le « Manifeste d’Ançar Eddin », il est loisible de lire : « L’Azawad couvre la portion du territoire de l’ex-Soudan français, contrôlée par les touaregs et alliés, au moment de la pénétration coloniale. Il correspond approximativement aux trois provinces actuelles du Nord du Mali. »

L’auteur du texte, manifestement un commandité, justifie sa thèse en recourant à une histoire de la région interprétée selon l’objectif qu’il s’est assigné : « L’histoire de cette région a toujours fait l’objet d’une littérature tronquée et fallacieuse de la part des chroniqueurs maliens. Ces derniers oublient impudemment une chose : tout comme l’Azawad, le Mali dans ses limites actuelles n’a jamais été avant la colonisation une entité politique homogène. Ceux qui ont proclamé l’indépendance du Soudan français ont donné à ce dernier le nom « Mali » en référence à un fabuleux Etat du moyen-âge (dont les frontières les plus fantaisistes n’ont jamais franchi la boucle du Niger), à l’instar de la Gold Coast qui a accédé à la souveraineté sous l’appellation « Ghana ».

Pour cette raison, une autre lecture de l’histoire du Mali est proposée, dans la mesure où « Il y a donc lieu de se méfier de l’historiographie tendancieuse en vogue au Mali si on veut cerner objectivement la problématique de l’Azawad. »

Et, pour « cerner objectivement la problématique de l’Azawad », l’auteur du « Manifeste » demande d’occulter ce qui s’est produit sur notre territoire du IIIè au XIXè siècle pour ne tenir compte que ce que nous avons vécu à partir de 1894, date de l’arrivée des Français dans la boucle du Niger : « Les épopées épicées, les panégyriques des griots, les chants des cantatrices, etc. ne sauraient avoir la moindre valeur scientifique […]

« Pour rétablir la vérité des faits historiques, il importe d’éviter de se perdre dans les méandres d’un passé lointain et insondable, faute de tout support écrit. Il faut se contenter des temps modernes et faire, par exemple, parler les archives coloniales. Qui dominait effectivement l’espace que ses ressortissants appellent Azawad avant sa conquête par la France ? Que disent les récits des explorateurs, les notes des officiers et médecins de troupe, les rapports des premiers administrateurs et magistrats coloniaux ? Tout le reste n’est qu’affabulations et vue de l’esprit. L’honnêteté commande de se plier au verdict de l’histoire et en tirer toutes les conséquences de droit plutôt que de chercher obstinément à galvauder le passé par des écrits volontairement apocryphes. »

 

Intervenant dans l’émission « La marche du monde » du 18 janvier 2015, Ambéry Ag Rhissa ne soutient pas le contraire de ce qui est mentionné dans le « Manifeste ». Il introduit ses propos en affirmant, avec force, sa « targuité », son appartenance à l’Azawad avant de soutenir : quand le colonisateur français arrivait à Bamako en 1883, il n’y avait, entre ce village et l’Azawad, aucun lien.

Il est vrai que, lorsque les Français, à la fin du XIXè siècle arrivent à Tombouctou, ils trouvent la boucle du Niger sous la domination des Touaregs. Mais, cette domination, plus de prélèvement que d’administration était des plus récentes. Elle a été rendue possible par les conséquences de la défaite de Tondibi. Il en sera question dans notre prochaine livraison.

A suivre

La Rédaction

 

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