La Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA), fidèle à ses habitudes, a profité de l’annulation de la tenue de la 38e réunion du Comité de Suivi de l’Accord (CSA) initialement prévue à Kidal pour faire diversion, dans le processus de paix. Elle a, en effet, annoncé la suspension de sa participation au processus de mise en œuvre de l’Accord.
Dans un communiqué conjointement signé avec la dissidence de la Plateforme dirigé par Me Harouna TOUREH, ce 17 septembre 2019 ; la CMA exige une réunion urgente avec la communauté́ internationale et les autres parties prenantes de l’Accord dans un lieu neutre pour, dit-elle, clarifier l’ensemble des questions pendantes.
Une condition immédiatement rejetée par les autres parties prenantes (le gouvernement et la Plateforme), qui dénoncent une nouvelle manœuvre de la CMA pour retarder les échéances au moment où la priorité est à la normalisation de la situation à Kidal. Et cela, conformément aux recommandations de la troisième session de haut niveau du CSA tenue à Bamako, le 17 juin 2019, sous la coprésidence des ministres des Affaires étrangères d’Algérie et du Mali.
Aussi, la CMA accuse-t-elle le gouvernement malien de négligence dans la gestion des combattants du MOC, le mécanisme opérationnel de coordination, chargé de sécuriser les autorités dans le nord, et qui ont été intégrés à l’armée malienne.
« Nous avons l’impression qu’il y a un laxisme dans les actes du gouvernement. Après leur formation militaire, les combattants du MOC ont été livrés à eux-mêmes, malgré la menace sécuritaire qui pèse à leur encontre. Aujourd’hui, certains sont perdus, d’autres sont otages des groupes armés », dit Sidi Brahim Ould Sidati.
Ce qui est évident, c’est que les acteurs et autres observateurs du processus de paix en ont assez des voltefaces répétitives des éléments de la CMA. Car, nombreux sont aujourd’hui les responsables de cette organisation et autres pêcheurs en eau trouble qui souhaitent que la crise perdure afin de profiter de la situation de non-droit qui prévaut dans le pays.
Du côté de la Plateforme des Mouvements du 14 juin 2014 d’Alger, l’on n’est pas prêt à se laisser divertir par la CMA dont les revendications sont aux antipodes des efforts de paix et de stabilité.
« À ce stade du processus, la Plateforme ne perçoit ni l’opportunité ni la pertinence de chercher un terrain neutre pour engager des discussions entre des parties maliennes qui vivent en toute convivialité dans leur pays », peut-on lire dans un communiqué en date du 17 septembre 2019 signé de Fad Ag ALMAHMOUD, du GATIA.
Pour le camp de Fad Ag ALMAHMOUD, la récente redynamisation de la lutte contre le terrorisme prônée par le Mali et les autres pays de la CEDEAO au cours du sommet extraordinaire d’Ouagadougou, le 14 septembre 2019, ne saurait être mise sous éteignoir par aucune entreprise de diversion.
Pour ce faire, la plateforme rappelle à toutes les parties qu’elles restent engagées par le pacte pour la paix signé entre le gouvernement du Mali et les Nations Unies et auquel tous les Mouvements ont adhéré lequel pacte exige la fin des opérations de désarmement et de réinsertion avant la fin de décembre 2019. Toujours dans le communiqué signé par Fad Ag ALMAHMOUD, la Plateforme en appelle au respect des engagements pris par toutes les parties au lendemain de la signature de l’Accord pour que désormais tous les problèmes entre Maliens se règlent au Mali. Enfin, la Plateforme appelle toutes les parties à respecter leurs engagements en vue de parvenir à une mise en œuvre diligente de l’Accord pour abréger les souffrances des populations.
Selon une source gouvernementale, cette exigence de la CMA, qui sonne comme une invitation à la phase des négociations qui ont abouti à la signature de l’Accor paix, ne saurait être accepté à ce niveau du processus de paix.
Pour la première fois, un Comité de suivi de l’accord (CSA) de paix d’Alger devait être délocalisé et le choix de Kidal avait été adopté lors de la dernière réunion du comité, était hautement symbolique. Mais le 16 septembre, la veille du CSA, le président de la médiation internationale, l’Algérien Ahmed BOUTACHE, a informé les différents membres du CSA que la réunion prévue était repoussée. Une décision du gouvernement a finalement annulé le rendez-vous, évoquant des ‘’raisons d’État’’.
Pour bon nombre d’observateurs, la tenue de cette rencontre à Kidal aurait été perçue comme un pas de géant dans le processus de retour de l’autorité de l’État et des services publics dans partie du pays qui échappe au contrôle des autorités gouvernementales.
En posant cette exigence comme une nouvelle condition de sa participation au processus de paix, la CMA, vient encore une foi prouvée, si besoin en était, sa mauvaise foi pour un retour rapide de la paix au Mali.
Par Abdoulaye OUATTARA