A quinze petits mois du premier tour des élections présidentielles au Mali, les autorités ne peuvent donner aucune garantie sécuritaire quant à leur tenue, tant l’insécurité va crescendo. Hier, c’était les trois régions du nord ; aujourd’hui c’est le centre et même le sud d’être le foyer de l’insécurité, empêchant non seulement tout effort de développement, mais aussi et surtout devenant le terreau fertile pour le terrorisme. Pourrait-on organiser des élections dans un an et trois mois dans ces zones à risque ? Que fait réellement l’Etat malien pour endiguer l’insécurité ? Les Forces Armées Maliennes vont-elles continuer à payer un lourd tribut ? Où sont les hélicoptères de combat promis tambours battants ? Au cas où les élections ne se tiennent pas à date échue, va-t-on encore recourir à l’avis des neuf Sages de la Cour Constitutionnelle ?
Les dernières élections tenues au Mali ont été celles des communales en 2016. Mêmes celles-là n’ont pas pu se tenir dans plus d’une cinquantaine de communes au centre du pays, à cause de l’insécurité. Les locales ou élections des Conseils de cercle ont été reportées, les régionales connaitront sans nul doute le même sort. Comment dans ces conditions d’insécurité récurrente pourrait-on organiser des élections, quelles qu’elles soient au Mali ? C’est la question que bon nombre d’observateurs se posent aujourd’hui et à juste raison. Les FAMA, encore sous équipées et démoralisées, peinent à faire face à leur mission régalienne, parce que les fleurs n’ont pas suivi leur promesse de fruit. Les engagements pris par les autorités tardent à se concrétiser. La plupart des signaux de la non-tenue des élections en 2018 semblent être allumés et les autorités feignent d’ignorer cette évidente réalité. Si d’aventure cette situation ne s’améliore pas avant la date des élections, il est fort possible qu’on tombe dans le scénario de 2012 où les élections n’ont pas pu être organisées à l’issue des quarante jours prévus par la Constitution. Dans ce cas, deux hypothèses s’offrent à nous. La première est de choisir la voie constitutionnelle consistant en la saisine des neuf Sages pour indiquer une voie qui ne violerait pas la Constitution. La seconde serait de recourir à un dialogue politique pouvant amener la classe politique à trouver une solution consensuelle qui préserverait la paix et l’unité nationale. Ce dialogue peut aboutir au choix d’une personnalité convenue pour diriger une transition durant laquelle les grandes préoccupations seront prises en compte et une élection présidentielle sera organisée.
En somme, gouverner étant prévoir, il est plus que jamais urgent d’engager les débats autour des questions cruciales de l’heure pour ne pas être pris au dépourvu et gérer les conséquences.
Youssouf Sissoko