C’est à travers des menaces à peine voilées que le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz fait allusion au Mali et promettant "d’agir seul" au besoin pour combattre non Al Qaïda, mais un "terrorisme local… au nord d’un pays voisin…
Dans une récente déclaration faite à l’AFP, le président mauritanien se fait en effet de plus en plus menaçant à l’endroit de son homologue malien : "Notre pays ne combat pas Al-Qaïda, mais il fait face à un terrorisme local, circonscrit dans le Sahel… Notre pays reste engagé contre les terroristes basés dans le désert au nord d’un pays voisin … Nous agissons contre ces terroristes, parfois, avec l’appui technique, logistique et en renseignements de certains pays amis, tout en restant prêt à agir, même seul, pour combattre le terrorisme ".
Ce sont, en substance, les déclarations faites par le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz à l’AFP, le mercredi dernier, aux lendemains du raid conjoint avec l’armée française sur le territoire malien. Le chef de l’Etat mauritanien intervenait au cours d’une émission publique à l’occasion du premier anniversaire de son investiture, le 5 août 2009.
Le message reste sans équivoque pourvu de suivre les événements dans la bande sahélo-Saharienne. La Mauritanie, à en croire, son premier citoyen, n’en a donc pas après Al Qaïda, mais contre des terroristes "locaux" ayant trouvé refuge au nord d’un pays voisin, à savoir le Mali. Et elle serait disposée à mener seule des opérations militaires au mépris de la souveraineté des autres Etats et nonobstant l’invitation du président Malien de mener une lutte commune et concertée.
Le Président Mauritanien, on le voit, tente tant bien que mal de faire le distinguo entre Al Qaïda, AQMI dont il évite de prononcer le nom, et les groupuscules terroristes qui écument dans la région.
L’amalgame est visiblement délibéré et a des relents belliqueux très ciblés.
Nous continuons, pour notre part, de croire que le récent raid au Nord Mali suivi de l’enlèvement de deux bédouins n’était que le prélude (la collecte de renseignements) à une vaste opération dont l’annonce vient justement d’être faite par M Mohamed Ould Abdel Aziz.
Prétendre que l’armée mauritanienne ne mène pas la guerre contre Al Qaïda mais plutôt contre des groupuscules terroristes présents dans le sahel constitue le prétexte le plus maladroit émanant d’un président par surcroit Général d’armée de son Etat.
Nul, parmi les acteurs de la lutte anti-terroriste n’ignore que le Groupe Salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) a pris l’appellation d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) lequel a officiellement fait allégeance à Oussama Ben Laden le 25 janvier 2007.
Et que c’est sous le couvert de la nébuleuse Al Qaïda que toutes les opérations sont menées: enlèvement de touristes étrangers et occidentaux en général, narcotrafic, contrebandes…
Dans cette partie du continent (cela, nul n’est censé l’ignorer non plus), c’est la connexion de tous les réseaux. Les contrebandiers, et même de simples aventuriers sont AQMI, Salafistes ou Al Qaïda au besoin… Qu’importe l’appellation ! Et l’occasion faisant toujours le larron, les narcos, afin d’obtenir leur droit de passage peuvent se muer en ravisseurs et "vendre" leur cargaison humaine à AQMI qui en fait des otages.
L’on voit bien que l’excuse du président mauritanien ne tient même pas à un fil d’araignée. Parler donc d’un groupuscule isolé dans le " nord d’un pays voisin " est loin d’être une méconnaissance des faits, mais un prétexte tout trouvé pour justifier d’éventuelles opérations au nord de ce pays voisin, avec bien entendu le soutien de la France. Et coïncidence, ce pays vient juste d’octroyer un appui budgétaire de 3 millions d’euros à son partenaire à la suite d’une convention signée dimanche 1er août soit une semaine après le raid conjoint. Les deux pays semblent désormais unis pour le meilleur et pour le pire.
B.S. Diarra
Ould Abdelaziz s’attire les foudres des généraux algériens
Le président mauritanien, Mohamed Ould Abdelaziz, s’est attiré les foudres des généraux algériens, irrités par l’intervention de commandos d’élites français aux côtés des forces mauritaniennes, dans le raid contre le groupe de l’AQMI au Mali.
Aux yeux de la hiérarchie militaire algérienne, Ould Abdelaziz est non seulement coupable d’avoir permis l’intrusion de la France, leur meilleur ennemi, mais surtout d’avoir tourné au ridicule le leadership revendiqué par l’Algérie dans la lutte anti-terroriste au Sahel. Avec ce raid franco-mauritanien, les accords sur la lutte antiterroriste qu’Alger s’est ingénié à conclure, en avril dernier avec plusieurs Etats sahélo-sahariens, se trouvent pratiquement frappés de caducité.
Ould Abdelaziz est même soupçonné d’avoir coordonné avec Paris, en se gardant bien d’associer l’Algérie à cette opération contre le groupe de l’AQMI au Mali, région qu’Alger considère comme son arrière-cour. Surtout que le quartier général régional de la lutte contre les groupes terroristes de l’ex-GSPC algérien, se trouve précisément à Tamanrasset, dans le Sud algérien. Une zone située à un jet de pierre du nord du Mali, où s’est déroulé le raid avorté pour tenter de libérer le malheureux Michel Germaneau.
Dorénavant, le président mauritanien sera tenu à l’œil par Alger, particulièrement après les déclarations déterminées de Paris, assurant le Mali et, surtout la Mauritanie, du renforcement de l’aide de la France pour traquer les groupes terroristes de l’AQMI dans la région.
Pour contrebalancer l’influence française, les généraux algériens sont tentés de jouer la carte de l’Espagne, dont deux ressortissants sont encore aux mains des groupes jihadistes, en partie issus de l’insurrection islamiste des années 90 en Algérie
maghreb-intelligence.com
L’ingratitude de Nouakchott
Les relations entre les deux pays se sont détériorées ces dernières années et, pour être précis, depuis 2002, coïncidant avec l’accession d’Amadou Toumani Touré à la souveraineté nationale du Mali. La situation s’est empirée après le coup d’Etat militaire du 6 août 2008 qui a emporté le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Le putschiste n’est autre l’actuel président Mohamed Ould Abdel Aziz.
Au Mali, le coup de force n’a pas été apprécié incitant le nouvel homme fort du pays à effectuer une visite sur place après son élection, question de gagner la sympathie et la confiance de son précieux voisin.
Le chef de la junte espérait discrètement sur un soutien du Mali. Mais il dut se contenter de la neutralité d’Amadou Toumani Touré et affronter la condamnation de l’Association des réfugiés mauritaniens au Mali (AREMMA). Ces ressortissants mauritaniens sont très actifs au Mali depuis 1989, date de leur déplacement vers le Mali et le Sénégal.
Le Mauritanien obtiendra plus tard sa revanche en décembre 2008 en apportant un précieux soutien aux combattants de la rébellion au nord du pays. Le chef rebelle Ibrahim Ag Bahanga aurait en effet reçu la dotation en carburant de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN- version sécurité d’Etat) avant l’attaque de Nampala.
Surviendra plus tard la libération de présumés terroristes en échange de l’otage français Pierre Camatte. Ce fut certainement la goutte de trop pour le Général Ould Abdel Aziz lequel rappela son ambassadeur pour "consultation". C’est dans ce contexte de froid que survint le raid conjoint franco-Mauritanien de juillet dernier.
Il faut dire que Nouakchott a toujours entretenu une dose d’agressivité à l’endroit du Mali nonobstant la compassion dont Bamako a régulièrement fait montre à son égard. Sur sollicitation des autorités Mauritaniennes en effet, le Mali a renoncé deux fois consécutives à son mandat à la tête de l’Organisation pour la Mise en Valeur du Fleuve Sénégal (OMVS) laissant soin au Mauritanien Ould Merzoug de poursuivre ses activités au nom de son pays.
La Mauritanie n’a pas eu la même attitude envers son voisin en 1991 quand le président de la Transition le lieutenant Colonel Amadou Toumani Touré a, pour cause de troubles sociopolitique dans son pays, invité son voisin à lui laisser poursuivre son mandat au poste de Haut Commissaire de l’ OMVS.
La magnanimité de Bamako ne s’arrête pas là. Les pâturages maliens et la forêt du Baoulé restent toujours ouverts aux populations mauritaniennes sur décision des autorités maliennes.
Elles ont été apparemment bien récompensées. Et si en définitive, cette grande commisération malienne était diversement interprétée à Nouakchott ? Le président malien aura alors ce qu’il mérite.
B.S.D
Américains et Européens craignent désormais le pire
Il est clair que le raid franco-mauritanien au nord Mali aura de grandes répercutions sécuritaires sur toute la région. Une semaine après l’opération franco-mauritanienne, le ministre des affaires étrangères français Bernard Koucher à lancé un appel aux ressortissants français résident en Mauritanie, au Niger et au Mali à éviter les zones dangereuses bien répertoriées. Il les a invités à la prudence, (…), à sécuriser davantage les ambassades et antennes diplomatiques, lycées, centres culturels, entre autres.
C’est aujourd’hui le tour aux Etats-Unis d’Amériques de lancer les mêmes avis à leurs ressortissants et tous les occidentaux surtout ceux vivant en Mauritanie.
En raison d’une recrudescence des activités d’Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), le département d’Etat a en effet invité européens et américains vivant en Mauritanie à faire preuve d’une extrême vigilance. Il explique la menace par le récent raid mené par la Mauritanie et la France dans le désert du Sahel, toute chose susceptible d’inciter AQMI à "tenter d’autres attaques de représailles contre des cibles occidentales s’il en a l’occasion".
Baba Ahmed