Ils ont été câlinés, cajolés, bercés ; rien n’y a fait. Les Mouvements armés, en particulier la Coordination des mouvements armés (CMA) a persisté dans leur fuite en avant dans la mise en œuvre de l’Accord. Ils viennent d’être rattrapés par le Comité de Suivi de l’Accord (CSA) qui a lancé un ultimatum pour l’établissement des Autorités intérimaires et l’opérationnalisation des patrouilles du Mécanisme Opérationnel de Coordination (MOC).
Fin de course pour les preneurs d’otages de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger. Parce que les entraves au processus de paix et de réconciliation, ce ne sont pas seulement les activités des groupes terroristes qui multiplient indistinctement les attaques asymétriques contre les paisibles populations civiles, nos Forces de défense et de sécurité, les Contingents de la MINUSMA et la Force française BARKHANE. Ce sont aussi et surtout certains acteurs clés du processus, à savoir principalement ceux de la CMA. Cela, quand bien même la Plateforme s’attendait à des dividendes de son imposture.
L’insolite
La Communauté internationale qui, jusqu’alors, avait fait preuve de complaisance, si ce n’est de complicité vis-à-vis de la Coordination des Mouvements armés (MNLA, HCUA, MAA dissident) hausse désormais le ton. Il faut que les lignes bougent par rapport à l’opérationnalisation du Mécanisme opérationnel de Coordination (MOC) et des patrouilles mixtes ainsi que l’installation des Autorités intérimaires. Cela a été explicitement signifié aux ex-rebelles et djihadistes qui usent et abusent du dilatoire. D’où, l’exhortation du Comité aux Parties de faire preuve de bonne foi et de confiance mutuelle. Mais il ne s’agit évidemment que d’une figure de style, puisqu’il a décidé de prendre les choses en main.
Les décisions fortes attestent de ce passage à la vitesse supérieure. En effet, le Comité a décidé de la mise en place d’un groupe de travail, sous la Présidence du Haut Représentant du Président de la République, afin de permettre le lancement effectif de la période intérimaire notamment l’installation des Autorités intérimaires et l’opérationnalisation des unités du MOC immédiatement à Gao et à Kidal, le 10 décembre 2016 au plus tard.
Dans un souci d’efficacité et afin de garantir aux travaux de ce groupe les meilleures chances de succès, la participation de la CMA et de la Plateforme doit être assurée au plus haut niveau de leur hiérarchie, tout comme le Haut Représentant est habilité à inviter à ces travaux toute personnalité qu’il considère en mesure d’apporter une contribution positive. Le délai imparti à ce groupe de travail pour l’accomplissement de sa mission ne doit pas excéder 5 jours.
Cela s’appelle un ultimatum. Ce qui a manqué jusque-là et qui a permis aux Mouvements armés, en l’occurrence l’ex-rébellion, de jouer les prolongations à n’en pas finir. D’où, les accusations qui fusaient de toutes parts relativement au laxisme, sinon la partisanerie de la Communauté internationale qui est garante de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger.
Cette position du Comité de suivi de l’Accord est d’autant plus insolite que son Président, l’Ambassadeur Ahmed Boutache d’Algérie, dans sa déclaration liminaire à l’ouverture de la 8e session du CSA, disait : « il a été, je dirais, globalement constaté que deux questions continuent en quelque sorte d’empêcher tout progrès substantiel dans le processus de mise en œuvre de l’Accord. Il s’agit d’une part de la question de l’administration intérimaire. Et d’autre part, de mécanismes sécuritaires.
À ce sujet, il convient de préciser que les représentants des mouvements font des avancées et des progrès au niveau des mécanismes sécuritaires ou plutôt ils conditionnent les progrès au niveau des mécanismes sécuritaires par des progrès au sujet de l’administration intérimaire et nous croyons comprendre que du côté du Gouvernement, c’est la position inverse qui prévaut ».
Ainsi, c’était les Mouvements armés qui, contrairement au Gouvernement, étaient partisans de l’accélération du processus d’établissement des Autorités intérimaires et l’opérationnalisation du MOC.
Le piège à rats
Mais la vérité finit toujours par rattraper le mensonge. Tout a été mis en œuvre pour que ces deux questions soient résolues : infrastructures, logistiques (armes, munitions, véhicules, tenues, carburant pour les éléments des Patrouilles mixtes ; mobilier de bureau pour le MOC). Pourtant, après avoir donné son accord pour l’installation des Autorités intérimaires, le 7 novembre dernier, la CMA s’est rebiffée, estimant qu’il fallait préalablement opérationnaliser le MOC. La Plateforme non plus n’a pas ramé à contre-courant. C’est cela le modèle parfait de la fuite en avant.
À présent, au regard de la mansuétude dont bénéficie la CMA auprès de ceux que l’on sait, l’on est en droit de s’interroger sur la portée de l’élévation de ton du Comité : mythe ou réalité ? Est-ce un bluff visant à remonter la pente du discrédit qui frappe le CSA qui offre la piteuse image de s’aplatir devant d’anciens rebelles partisans impénitents de l’État de non-droit ?
L’on ne peut être mieux lié que par ses propres propos. À l’expiration de l’ultimatum, les Maliens seront définitivement situés sur les intentions de la Communauté internationale au visage difforme. Va-t-elle sévir ou continuer à laisser faire ? That is the question.
Par Bertin DAKOUO
« Lutte antiterroriste: l’erreur fatale de la Minusma » par Sékouba Samaké ; Info-Matin du 25 Juillet 2015.
« La MINUSMA aura mieux gagné sur ce terrain en ayant dans son portefeuille onusien le droit de combattre les terroristes. Dommage que les gendarmes du monde ne l’ont pas aperçu de cette manière. » (NDLR, cette entrée en matière par laquelle Sékouba Samaké clôture son excellent article, est de moi qui reposte cet article).
Malheureuse coïncidence ou erreur d’approche stratégique ? Ce qui se passe actuellement sur le terrain, avec la recrudescence des attaques terroristes qui se propagent dans tout le pays, délocalisant, de ce fait, son périmètre d’action, limité jusqu’ici au nord du pays, tranche nettement avec la stratégie de l’Onu de réajuster son mandat en l’imputant de la mission de traquer les terroristes dans le pays.
En fin de mois de juin dernier, comme on s’y attendait : le mandat de la Minusma a été prorogé d’un an supplémentaire. Cet objectif majeur répondait d’ailleurs d’une demande expresse du gouvernement du Mali, qui venait d’ailleurs de signer le texte de l’accord de paix, devenu inclusif, car adopté par toutes les parties, y compris la CMA qui avait trop longtemps tergiversé là-dessus. En fait, la logique du gouvernement était donc de parvenir à une nouvelle prolongation du mandat de la Minusma, redéployé et réadapté à l’exigence de la faisabilité de l’accord de paix qui venait de rentrer en vigueur, dont tout le monde s’accordait à dire qu’avec sa mise en œuvre effective sur le terrain, on entamait alors la phase la plus difficile de ce processus de paix.
Dès lors que les parties, y compris la communauté internationale, avaient déployé tant d’efforts pour en arriver là, il était donc impérieux d’y consacrer le maximum d’attention et de précaution pour éviter que le processus de paix, ainsi fragile, ne puisse connaître de nouvelles remises en cause, susceptibles de nous replonger en arrière ; du temps où le climat de confiance était la denrée la plus rare entre les parties maliennes, lesquelles ont dû puiser du meilleur d’elles-mêmes, grâce à la sagacité du chef de file de la médiation, pour baliser le chemin, allant à la paix.
C’est dans ce contexte de paix retrouvée que le mandat de la Minusma a été revu et corrigé par le conseil de sécurité de l’Onu qui, à l’unanimité de ses membres, a adopté ce nouveau mandat de la Minusma. Il l’a été, nous a-t-on confirmé par des sources diplomatiques crédibles, avec la vision stratégique que la Minusma sera en quelque sorte le gendarme pour la surveillance des modalités d’application de l’accord. Et cela, dans toutes ses phases. La Minusma, selon les dispositions de l’accord de paix, en collaboration avec l’UA (MISAHEL), l’OCI, l’UE, et la CEDEAO, assiste le CSA dans le suivi de la mise en œuvre de l’accord. C’est donc elle qui fera office de police dans la matérialisation de cet accord de paix, en fonction des missions stratégiques assignées à celui-là. Tenez ! Le CSA, dont la Minusma a un rôle d’assistance…
Nous y sommes : la Minusma est au cœur du processus d’application de l’accord de paix dont elle s’intéresse évidemment à tous les aspects pratiques. Et , c’est justement, sur ce terrain que de nombreuses interrogations concernent ce réajustement du mandat par le conseil de sécurité en un moment justement où l’on appréhende clairement, que la principale condition de la paix sur le terrain, après tant de traumatismes vécus par les communautés, est liée à la garant
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