Après la mise en place du comité de suivi, c’est l’opération cantonnement des insurgés qui se pointe à l’horizon. Les rebelles touaregs ont obtenu une accélération du processus d’application de l’Accord d’Alger du 4 juillet après avoir soumis de nouvelles doléances à la partie malienne via le facilitateur algérien.
Le prétexte de ces nouveaux pourparlers dans la capitale algérienne, conduits par le chef de la rébellion armée, Iyad Ag GHALLY lui-même, était tout trouvé : le flottement de l’Accord dit de paix qui n’arrivait pas à décoller en dépit de la mise en place du comité de suivi. Autour de cette nouvelle revendication des insurgés, les protagonistes se sont retrouvés à Alger pour aplanir les divergences. Là, les insurgés, comme on l’a déjà écrit, ont accusé la partie malienne de vouloir traîner les pieds pour l’application de l’Accord. Une menace à peine violée des rebelles qui affirmaient à qui voulait l’entendre qu’ils étaient déterminés à faire retirer leurs représentants du comité de suivi si des mesures urgentes n’étaient pas envisagées, dans un bref délai, pour « dégager » la zone.
Le retrait de l’armée
C’est dans cette logique qu’il a été annoncé le retrait des militaires envoyés en renfort dans la zone après l’attaque des camps militaires par les rebelles. Lors des récents pourparlers à Alger, voici en quelques lignes des préalables de l’alliance du 23 mai qui a demandé entre autres : la suppression des postes de contrôle, le départ des renforts dépêchés à Kidal conséquemment aux évènements du 23Mai 2006, la suspension du recrutement en cours et la libération des personnes détenues suite aux évènements de Kidal. La correspondance des rebelles, transmise à l’Algérie à cet effet, était ainsi libellée : «Vous avez personnellement tout mis en œuvre pour faire admettre à toute l’assistance la nécessité d’accepter toutes les mesures à même d’apporter l’apaisement, de rétablir la confiance et de voir enfin le retour des Kidalois contraints de quitter leur maison pour quelques raisons que ce soit. Vous avez suggéré, eu égard à la lenteur de l’administration militaire, un certain nombre de mesures favorablement accueillies par l’Alliance et de suite acceptées par la partie malienne.
Les mesures d’allégement et d’apaisement que se devaient de prendre les autorités maliennes étaient si évidentes, vos propositions ayant été spontanément acceptées de tous, l’Alliance n’avait aucun doute quant à leur application ».
Lenteur dénoncée
Le constat des rebelles, après une semaine d’activité du comité de suivi, était le suivant : le dispositif militaire et sécuritaire, qui devait être allégé, a gagné en ampleur et devient de plus en plus accablant tant pour l’Alliance que pour les simples citoyens souvent rackettés au multiples postes de contrôle ; la non libération des personnes détenues ; la continuité du recrutement dénoncé.
L’examen de ces nouvelles exigences des rebelles a amené les autorités maliennes, sous la médiation algérienne, à revoir le calendrier de l’application de l’Accord d’Alger ; calendrier qui a été revu et corrigé selon les exigences des insurgés, lesquels, depuis belle lurette, ont commencé à exprimer leur impatience face à ce qu’ils ont assimilé à une lenteur des autorités nationales à appliquer le texte de l’Accord dit de la paix. Dans le même temps, en ce qui concerne le comité de suivi dont les effectifs sont en place à Kidal, des mesures concrètes ont été prises pour assurer son fonctionnement en le dotant de moyens financiers adéquats. De la même veine, l’opération de cantonnement a été envisagée. Il s’agit d’une mesure importante dont la mise en œuvre sera décisive pour l’application de cet accord dit de la paix pour la région de Kidal. Le cantonnement, tel qu’il est évoqué dans le texte de l’Accord d’Alger, concerne plutôt les préoccupations sécuritaires immédiates qui sont ainsi ciblées : la mise en place du conseil régional provisoire de coordination et de suivi, la poursuite du processus de délocalisation des casernes militaires dans les zones urbaines conformément aux dispositions du Pacte National et le retour, sous l’égide du facilitateur, de toutes les armes et munitions ainsi que tous autres matériels enlevés depuis les attaques du 23 mai 2006 de Kidal, Menaka et Tessalit selon les modalités arrêtées dans le présent accord
Unités spéciales de sécurité
A terme, le cantonnement vise les unités spéciales. Sur ce sujet, le texte de l’Accord d’Alger dit ceci : « A la date qui sera fixée par le Ministre de la Sécurité Intérieure, sur proposition, du groupe technique de sécurité et après avis du comité de suivi, les personnels devant servir au sein de ces unités aux missions assignées entreront en formation pour être à ces unités. Les programmes de formation seront établis par l’autorité dûment habilitée, sur proposition du groupe technique de sécurité, après avis du Comité de suivi (…) Le lieu de formation sera déterminé par l’autorité dûment habilitée, sur proposition du groupe technique de sécurité après avis du Comité de suivi. Il servira également de lieu de cantonnement du personnel visé dans le chapitre III, points 4 et 5. Il est placé sous la supervision du groupe technique de sécurité (…) L’opération de restitution des armes, des munitions et autres matériels enlevés se fera dans le lieu du cantonnement, à l’admission du personnel visé dans le chapitre III, points 4 et 5, et de manière simultanée avec la régularisation de la situation socioprofessionnelle du personnel cantonné ».
Autant dire qu’un tournant décisif pour l’application de cet accord est en cours. En fait, de sources crédibles, on apprend que les parties concernées ont convenu de la date du 11 septembre prochain, c’est-à-dire dans quelques jours, pour débuter l’opération de cantonnement des troupes rebelles. En termes plus clairs, elle devra sonner pour les insurgés un retour à la source après avoir déserté les camps durant près de cinq mois pour s’installer dans les collines de Tégharghar, lieu de leur retranchement. Le come back des insurgés, qui sera effectif dès le lundi prochain, devra être immédiatement suivi, le 25 septembre prochain, de la mise en place d’un autre dispositif important de l’application de l’Accord d’Alger, notamment le conseil provisoire de coordination et de suivi. Cette autre mamelle nourricière de l’Accord d’Alger qui fera sans doute polémique.
Par Sékouba SAMAKE“