Accord pour la paix et la réconciliation: deux ans après…

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Le Comité́ de suivi de l’Accord avait salué́ la décision des parties maliennes de mener des actions avant le 20 juin marquant le 2e anniversaire du parachèvement du processus de signature de l’Accord, permettant l’installation des Autorités Intérimaires, du Gouverneur, du Mécanisme Opérationnel de Coordination et les Patrouilles Mixtes à Kidal. Les atermoiements de la Coordination des mouvements armés (CMA) consacrent un rendez-vous manqué avec l’histoire.

Aujourd’hui 20 juin, il est regrettable de constater que depuis la 18e session du Comité de suivi de l’Accord, c’est le statu quo en ce qui est de l’opérationnalisation des Autorités intérimaires et des patrouilles mixtes. Cela, contrairement aux engagements souscrits par la CMA au cours de la dernière session du CSA.

L’exutoire
Dans le communiqué sanctionnant cette rencontre, on peut lire : ‘’Le Comité́ a salué́ la décision des parties maliennes de mener un certain nombre d’actions, avant le 20 juin 2017, permettant ainsi l’installation des Autorités Intérimaires, du Gouverneur, du Mécanisme Opérationnel de Coordination et Patrouilles Mixtes à Kidal’’.
Requinqué par la décision des parties maliennes, ‘’le Comité́ a demandé́ aux parties d’actualiser avant le 20 Juin, le chronogramme de mise en œuvre de l’Accord pour le parachèvement des dispositions de l’Accord non encore réalisées, notamment le cantonnement, DDR, Intégration et RSS’’.
C’est manifestement cette dernière demande qui a été l’exutoire permettant à la CMA de renouer avec ses pirouettes. Le communiqué du 12 juin dernier l’atteste suffisamment : ‘’la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) informe l’opinion nationale et internationale qu’elle vient de prendre connaissance d’un document, intitulé « CHRONOGRAMME DU RETOUR DE L’ADMINISTRATION A KIDAL AVANT LE 20 JUIN 2017 » signé le 09 courant à Bamako.
Ce document est loin de refléter le résultat des pourparlers convenus entre la CMA et les différents acteurs impliqués dans l’établissement du programme du retour de l’administration à Kidal. En effet, la CMA n’est nullement engagée par ce document et appelle tous les acteurs crédibles à une concertation rapide (…)’’.
Pourtant, Ibrahim Ould Sidatti, responsable de la Coordination, après la rencontre du ministre des Droits de l’homme et de la réforme de l’État, avec les responsables de la CMA et de la Plateforme déclarait en substance, le 7 juin dernier : «Nous avons un chronogramme, une ambition, nous sommes en train de travailler avec le gouvernement pour amener les autorités intérimaires aussi bien que le gouverneur et toutes les institutions étatiques à Kidal. On s’est fixé le 20 juin. Mais est-ce que nous allons y parvenir ? Nous mettrons toute notre force pour pouvoir y arriver… Il n’y aura pas de différence entre Kidal et les autres régions du Mali ».
Le fossé est énorme entre les déclarations et les actes comme le prouve le fait que le 20 juin, il n’y a opérationnalisation ni des Autorités intérimaires ni des patrouilles mixtes/Mécanismes opérationnel de coordination (MOC). Cette date symbolique aura donc été vainement retenue. Il faut dire que si ce rendez-vous manqué avec l’histoire ne bloque pas l’Accord, il le retarde davantage. L’occasion est bonne pour jeter un regard rétrospectif sur cet Accord qui a été salué par l’ensemble de la Communauté internationale comme le meilleur compromis possible.

Aux plans politique et institutionnel
À ce niveau, on peut souligner l’adoption de la nouvelle loi électorale. Ce, alors que le processus d’élaboration de la loi sur les collectivités territoriales est en cours.
À cela, il faut ajouter la tenue de la Conférence d’entente nationale qui a accueilli un millier d’interlocuteurs maliens, dont des représentants des partis politiques d’opposition, des groupes armés signataires ainsi que des femmes et des jeunes. Elle a fait d’importantes recommandations.
Une commission spéciale de 53 membres chargée de la rédaction de la charte a été constituée le 3 mai et devrait en présenter une version préliminaire au Président Ibrahim Boubacar Keïta au plus tard aujourd’hui 20 juin. À l’issue de sa 18e session, le 5 de ce mois, le Comité́ de suivi de l’Accord s’est félicité́ de la finalisation de l’avant-projet de la charte pour la Paix, l’Unité́ et la Réconciliation nationale.
En cours, il y a la révision de la Constitution qui permettra effectivement de prendre en considération les recommandations formulées lors de la Conférence d’entente nationale ainsi que les principales dispositions de l’Accord.
Toutefois, le projet fait face à une fronde, une partie des acteurs politiques et de la société civile exigeant son retrait, du moins sa lecture pour diverses raisons.
À l’issue d’une série de négociations menées sous l’égide de l’équipe de médiation internationale et de la MINUSMA, les deux dernières autorités intérimaires à instaurer ont été mises en place le 20 avril à Taoudénit et Tombouctou.

Sur le plan de la défense et de la sécurité
Au plan sécuritaire, les avancées sont indéniables, en ce qui est de dispositifs permettant l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. À cet effet, l’on peut retenir, entre autres :
-Les décrets définissant la composition, les missions et le mode de fonctionnement la Commission nationale pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration (CNDDR), de la Commission d’intégration (CI) et du Conseil national pour la réforme du secteur de sécurité (CNRSS) sont adoptés ;
-La CNDDR, la CI et le CNRSS sont mis en place de façons inclusives et sont opérationnels.
-La CNDDR a élaboré un programme national de DDR, y compris de cantonnement, avec le soutien de la MINUSMA et d’autres partenaires.
-Sous l’égide du MOC, les unités mixtes composées de combattants des parties signataires et des forces de défense et de sécurité, notamment les unités antiterroristes spéciales, sont opérationnelles et effectuent des patrouilles mixtes contribuant à la restauration de la sécurité.
-Le redéploiement graduel sur l’ensemble du territoire malien des forces de défense et de sécurités reconstituées est effectif et garantit le maintien de la sécurité et de l’ordre public.
Mais des difficultés apparaissent à ce niveau. En effet, la mise en place des patrouilles mixtes, décidée par le Comité de suivi de l’Accord, le 2 mai, pour Kidal et Tombouctou, se faisait toujours attendre à la fin du moins d’avril. Elle est encore attendue aujourd’hui.
En plus, les huit sites de cantonnement construits par la MINUSMA demeurent désespérément vides.

Sur le plan de la justice et de la réconciliation
En la matière, la Commission vérité, justice et réconciliation est opérationnelle et dispose d’antennes régionales dans tout le pays.
L’on apprend que depuis le début des auditions, le 3 janvier, la Commission vérité, justice et réconciliation a recueilli un total de 3 447 témoignages de victimes. La Commission devrait examiner les violations présumées des droits de l’homme avant d’identifier des témoins susceptibles de faire des dépositions lors des audiences.
Parmi les autres avancées, les institutions de régulation et de protection de droits spécifiques, telles que la liberté d’expression, de la presse et de la communication, sont en place ou renforcées et fonctionnent efficacement.
La Commission de lutte contre la corruption et la délinquance financière est mise en place.
Autant d’efforts qui font que l’État trouve grâce, aux yeux de ses partenaires, quand bien même il est invité, à l’instar des groupes armés à s’investir davantage pour accélérer le processus de paix et de réconciliation nationale.

Par Bertin DAKOUO

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