Le vendredi 15 mai 2015, le peuple malien, et même au delà, a vécu avec un léger espoir la signature de l’Accord de paix et de réconciliation nationale entre le Gouvernement et certains des groupes armés du Nord du pays. Cet espoir aurait pu être beaucoup plus grand si les ‘’séparatistes’’ du Mnla, du Hcua et du MAA, regroupés au sein de la Coordination des mouvements de l’Azawad, n’avaient pas refusé de se joindre à la cérémonie qui fut organisée en présence d’un parterre de personnalités venues des quatre coins du monde. L’espérance des Maliens est d’autant plus légitime que l’Accord de paix issu du processus d’Alger était censé mettre un terme au processus de négociation et être ainsi un instrument privilégié aux mains du Gouvernement malien pour une meilleure réorientation des actions de développement dans le pays. Mieux, à défaut de mettre un terme à l’insécurité qui sévit notamment dans les régions Nord, le document a le mérite de faire la différence entre ceux-là qui, à un moment donné, ont cru bon de porter au bout des armes un certain nombre de revendications souvent infondées et d’autres qui n’adhéreront à aucun processus de paix, quel qu’il soit. Mais, ce qu’il y a à présent lieu de souligner, c’est que le regain d’espoir né de la signature du document ne devrait toutefois pas cacher un certain nombre d’éléments qui peuvent rendre difficile l’application du document, au-delà même du chamboulement politique et institutionnel qui en résulte. En effet, même avec l’adhésion de l’ensemble des parties, la mise en œuvre dudit accord nécessite de vraies discussions autour de son contenu, en ce sens que les différentes parties signataires n’ont pas forcément les mêmes interprétations de ses dispositions. C’est ainsi dire que, contrairement à ce que beaucoup peuvent imaginer, la signature de l’accord de Bamako est loin de mettre un terme aux empoignades entre les parties prenantes, en l’occurrence le Gouvernement malien, les groupes armés de la Plateforme et, éventuellement, ceux de la Coordination. L’autre interrogation qui taraude l’esprit de plus d’un observateur du problème dit du Nord, c’est que nul ne peut se prévaloir aujourd’hui de la moindre garantie que ce énième accord qui vient d’être signé ne subira le même sort que les accords précédents. Car, si l’on en est là aujourd’hui, c’est parce que l’Accord de Tamanrasset du 6 janvier 1991, le Pacte national du 11 avril 1992 et l’accord d’Alger du 4 juillet 2006, tous conclus sous l’égide de la seule Algérie, ont souffert soit de non application ou de manque de suivi dans la mise en œuvre.
Certes, le gouvernement malien ne cache pas sa bonne foi par rapport au respect de ses engagements pris dans l’accord de Bamako, mais l’attitude des mouvements séparatistes depuis le début du processus de paix a fini de convaincre que ces derniers n’ont aucun respect pour leur propre signature. En effet, de l’accord préliminaire signé en juin 2013 à Ouagadougou à celui de Bamako du 15 mai 2015, en passant par les différents engagements de cessation des hostilités conclus à Alger, le Mnla et ses alliés ont tout foulé aux pieds, défiant même la communauté internationale. Elle qui est censée être le meilleur garant de la mise en œuvre de l’accord. D’ailleurs, la partialité dont cette dernière fait preuve à bien des égards a fini par agacer les autorités maliennes qui l’ont clairement exprimé à la faveur de la cérémonie de signature, vendredi dernier. Toujours est-il que certains propos tenus par M. Ladsous, représentant de l’ONU à la cérémonie de signature, a fait grincer les dents à beaucoup d’observateurs avisés de la crise par rapport au rôle que l’organisation mondiale est censée jouer dans le suivi du processus.
Au regard de tout ce qui précède, il n’y a pas à se faire des illusions. Car, autant il nous a été difficile d’arriver au document issu du processus d’Alger qui attend encore la signature de quelques groupes armés, autant il nous sera difficile de le mettre en œuvre.
Bakary SOGODOGO
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