M. Jean-Pierre Lacroix, secrétaire général adjoint aux opérations de maintien pour la paix au Mali a présenté mardi dernier au conseil de sécurité de l’ONU, son rapport sur la situation dans notre pays.
Devant l’élite assemblée, M. Lacroix a estimé que le temps presse pour mettre en œuvre l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger.
« Le temps presse et nous sommes lancés dans une course contre la montre au Mali », a prévenu, M. Jean-Pierre Lacroix, secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, qui a plaidé devant le Conseil de sécurité pour la mise en œuvre intégrale de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, signé à Bamako en juin 2015.
Selon lui, à l’approche de l’élection présidentielle prévue mi-juillet, puis des élections parlementaires de novembre et décembre, « il importe donc que le Gouvernement et les mouvements signataires de l’Accord redoublent d’efforts pour respecter ce nouvel échéancier », a insisté M. Lacroix.
Le secrétaire général adjoint aux opérations de maintien pour la paix au Mali a ensuite rappelé que le Mali fait face à une insécurité grandissante. « Conséquences, les acteurs humanitaires estiment qu’en 2018, 4,1 millions de Maliens, soit 22% de la population, seront en situation d’insécurité alimentaire, une proportion encore plus élevée dans les régions du nord et du centre, où 30 à 40% de la population serait affectée », a déploré M. Lacroix.
Dans ce contexte, dit-il, la mise en œuvre intégrale de l’accord de Bamako constitue une condition sine qua non. « Or, plus de deux ans après sa signature, le fait que la stratégie de développement des régions du nord n’ait toujours pas été approuvée prive une large portion des populations du nord des dividendes tant attendus de la paix », a indiqué le représentant de l’ONU.
Pour lui, l’objectif doit être à présent de créer les conditions propices à la tenue des élections et à la poursuite du processus de paix. Pour cela, M. Lacroix a insisté sur la nécessité d’encourager le Gouvernement à lancer la mise en œuvre de mesures phares de l’accord, à savoir la décentralisation et la réforme du secteur de la sécurité.
Cependant, M. Lacroix a félicité l’adoption, lors de la dernière réunion du Comité de suivi de l’Accord, les 15 et 16 janvier, d’un chronogramme d’actions prioritaires pour accélérer sa mise en œuvre qui devrait, signale-t-il, « permettre de progresser, d’ici à la fin du mois de mars, dans les arrangements institutionnels et sécuritaires, mais aussi de relancer le chantier de la zone de développement des régions du nord touchées par la violence avec le centre ».
Par ailleurs, M. Lacroix a expliqué que 5 ans après la création de sa Mission et deux ans et demi après la signature de l’Accord de paix, qu’il est temps de réévaluer les hypothèses qui sous-tendent la présence de la MINUSMA, de revoir ses principales missions à la lumière des progrès accomplis sur le terrain dans le cadre d’un examen stratégique complet.
Parlant de la résolution 2364, adoptée le 29 juin 2017, le Secrétaire général adjoint a plaidé pour l’élaboration, dans un délai de 180 jours, d’un plan stratégique prévoyant l’exécution échelonnée du mandat de la MINUSMA et la présentation d’un plan de transition.
Le haut fonctionnaire de l’ONU au Mali a aussi déploré que plus de deux ans après la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, beaucoup reste à faire pour assurer sa pleine mise en œuvre. « Il est plus que jamais temps que toutes les parties progressent dans la réalisation de leurs engagements respectifs surtout à l’approche des échéances électorales prévues pour 2018», a invité M. Lacroix faisant référence au respect du nouveau chronogramme, pour qui, Il importe désormais de passer de la parole aux actes.
Les membres du Conseil de sécurité ont salué à la suite du Secrétaire général adjoint la conduite des deux premières opérations militaires menées par la Force conjointe du G5 Sahel. Ils ont aussi déploré la dégradation de la sécurité dans le centre de notre pays et la lenteur dans la mise en œuvre de l’accord.
M. FRANÇOIS DELATTRE, représentant de la France) a rappelé que la responsabilité du Conseil de sécurité est de prendre les mesures nécessaires pour encourager les parties à se conformer aux engagements dans le cadre de l’accord. Selon lui, la priorité doit être de tout mettre en œuvre pour que l’accord technique prévu par la résolution 2391 (2017) puisse être signé en amont de la conférence des donateurs qui se tiendra à Bruxelles le 23 février.
M. SACHA SERGIO LLORENTTY SOLÍZ (Bolivie) a salué la cessation définitive des hostilités entre les groupes armés grâce à la signature d’un « accord ». Néanmoins, il s’est dit préoccupé par le manque de capacités matérielles, logistiques et technologiques de la Mission.
M. BERNARD TANOH-BOUTCHOUE (Côte d’Ivoire) a prévenu que le retard dans la mise en œuvre de l’Accord pourrait menacer la tenue des prochaines élections locales et présidentielles.
M. OLOF SKOOG (Suède) a demandé à ce que soit assurée une pleine participation des femmes dans les structures de décision d’appui à la mise en œuvre de l’Accord, qui fait pour l’instant défaut.
M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a jugé préoccupantes la situation humanitaire et les conditions de sécurité au Mali. Pour lui, les capacités opérationnelles de la MINUSMA doivent, être renforcées et de promouvoir un rôle plus important de l’Union africaine, par le biais de son Conseil de paix et de sécurité.
M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a salué les efforts de la Force conjointe du G5 Sahel pour lutter contre le terrorisme et demandé la finalisation de l’accord technique en appui de ladite Force conjointe, qu’il a considéré comme l’exemple d’une coopération réussie.
M. SHEN BO (Chine) a demandé à aider les parties maliennes à mettre en œuvre ledit Accord et à renforcer les capacités du Gouvernement dans la lutte contre le terrorisme. Selon lui, l’Afrique doit jouer un rôle de chef de file dans la résolution des défis africains.
Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a rappelé que les élections locales et présidentielles à venir ne devraient en rien retarder la mise en œuvre de l’Accord de paix. Elle a souligné l’importance de hâter la réintégration de nombreux ex-combattants, comme le prévoit l’Accord, sous peine d’alimenter la méfiance et les malentendus. « Si, dans les trois mois à venir, aucun progrès ne venait à être constaté dans l’amélioration des conditions de sécurité au Mali, il faudrait alors envisager de durcir le régime de sanctions applicables à ce pays », a préconisé la représentante.
Enfin, M. TIÉMAN HUBERT COULIBALY, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale du Mali, a pris acte du rapport du Secrétaire général faisant. Il a ensuite assuré que le Gouvernement poursuivra ses efforts pour maintenir le climat de confiance entre les parties signataires et initier un projet de loi pour l’entente nationale afin de prendre en charge les propositions de la Conférence d’entente nationale. D’ores et déjà, conclura M. Coulibaly, le Chef de l’État a assigné à la nouvelle équipe gouvernementale quatre axes prioritaires. Il s’agit du parachèvement de la mise en œuvre de l’Accord de paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, l’endiguement de l’insécurité grandissante dans le centre du pays, la satisfaction de la demande sociale par l’accélération de la mise en œuvre du programme présidentiel d’urgences sociales et l’organisation d’élections transparentes, crédibles et apaisées.
Djibril Kayentao