C’est ce qui ressort du discours du ministre des Affaires étrangères de l’Intégration africaine et de la Coopération internationale, Abdoulaye Diop, à la réunion des pays contributeurs de troupes à la Minusma. C’était à Niamey le 5 novembre dernier. Nous vous proposons l’intégralité de l’allocution.
- Excellence Monsieur le Ministre d’Etat, Ministre des Affaires Etrangères, de la Coopération, de l’Intégration Africaine et des Nigériens à l’Extérieur ;
- Mesdames, Messieurs les Ministres de la Défense des pays africains contributeurs de troupes à la MINUSMA
– Excellence Monsieur Ibrahim Ouane, Représentant de l’Union Africaine ;
– Excellence Monsieur le Représentant Spécial Adjoint de la MINUSMA ;
– Monsieur le Haut Représentant du Président de la République du Mali pour le Dialogue inclusif inter-malien
– Messieurs les Représentants des Etats membres du Conseil de Sécurité ;
– Messieurs les Représentants des Pays contributeurs de troupes ;
– Monsieur le Représentant de la Délégation de la République Algérienne Démocratique et Populaire, Chef de file de la Médiation ;
– Mesdames, Messieurs les Représentants des organisations sous régionales, régionales et internationales ;
– Messieurs les officiers généraux et supérieurs ;
– Honorables invités ;
– Mesdames et Messieurs.
Tout d’abord, permettez-moi de rendre un vibrant hommage à la République sœur du Niger, à son Président, Son Excellence Mahamadou Issoufou ainsi qu’à mon frère et ami Mohamed Bazoum, pour leur leadership, leur engagement sans faille dans la défense de la souveraineté du Mali, leur marque de solidarité et leur précieuse contribution au sein de la médiation pour une sortie de crise honorable pour tous les maliens. Soyez en remerciés du fond du cœur.
Je voudrais également remercier les autorités nigériennes pour l’accueil fraternel et les soins réservés à ma délégation depuis notre arrivée dans cette agréable et hospitalière ville africaine qu’est Niamey.
Je me réjouis de l’initiative prise par le Niger de convoquer la présente réunion des pays contributeurs de troupes de la MINUSMA. Cette rencontre apparait pour nous comme une amorce de solution face à la résurgence des attaques terroristes et de la criminalité transnationale dans les régions nord du Mali depuis mai 2014. Ces attaques indiscriminées visent à la fois les populations civiles, les forces internationales et les Forces de Défense et de Sécurité du Mali.
Ce regain de violence de la part des groupes terroristes et narcotrafiquants dont les desseins ne sont autres que le crime, le trafic et la barbarie, constitue aujourd‘hui une menace grave contre la paix et la sécurité non seulement au Mali, mais aussi dans la région et le reste du monde.
Permettez-moi de présenter les sincères condoléances du Président de la République du Mali, du Gouvernement ainsi que celles de l’ensemble du peuple malien aux familles endeuillées et à tous les pays des braves soldats de la paix qui ont été lâchement assassinés dans notre pays au cours de leur salutaire mission de restauration de la paix.
Le peuple malien leur est éternellement reconnaissant et ne doute point que leurs sacrifices ne seront pas vains.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Au regard de la situation actuelle sur le terrain, force est de reconnaitre que ce qui était acquis est aujourd’hui hélas sérieusement compromis. Dès lors, il apparait nécessaire qu’ici à Niamey, nous convenions de nouvelles approches permettant de faire face au terrorisme et à la criminalité transnationale, en vue de sécuriser le processus du dialogue inter-maliens inclusifs d’Alger en cours.
A la veille de la Réunion du Conseil de Sécurité du 10 novembre sur la MINUSMA, le Mali estime que les mesures ci-après devraient retenir toute notre attention :
- L’opérationnalisation des provisions prescrites dans le mandat de la MINUSMA, notamment l’adaptation des règles d’engagement au contexte actuel du terrain ;
- La mise en place d’une force d’intervention rapide capable de lutter contre les groupes terroristes et ;
- Une plus forte participation des Forces de Défense et de Sécurité du Mali dans la conduite des opérations.
Pour ce faire, je réitère la disponibilité entière du Mali à coopérer pleinement avec tous les partenaires en vue de formuler, sur ces mesures, des propositions concrètes à soumettre au Conseil de Sécurité.
Mesdames et Messieurs,
Depuis janvier 2012, la République du Mali vit une profonde crise sécuritaire d’une gravité jamais vue dans l’espace sahélo-saharien et qui constitue indéniablement une menace à la sécurité internationale et collective.
Les évènements douloureux qu’a connus notre pays au cours des années 2012 et 2013 ont, comme vous le savez, partiellement restreint ou totalement anéanti la présence de l’Etat dans certaines zones des régions nord de notre pays. Cependant, la communauté Internationale demeure fortement mobilisée aux côtés du Mali pour ramener la paix et restaurer l’autorité souveraine de l’état sur toute l’étendue du territoire.
C’est ainsi que la solution pacifique prônée par notre pays et l’ensemble de la communauté internationale a abouti à la signature de l’accord de Ouagadougou du 18 juin 2013, et à l’adoption par le Conseil de Sécurité des Nations Unies des résolutions 2086, 2100 et 2164. Ces résolutions ont eu pour conséquence le déploiement d’une force de stabilisation de la paix qui grâce à l’opération française Serval, a momentanément éloigné les groupes terroristes, et permis le retour des forces de défense et de sécurité maliennes et de l’administration dans les centres urbains.
C’est donc le lieu de remercier très sincèrement l’ensemble de la communauté internationale et singulièrement les pays du champ, les Etats membres de la CEDEAO, l’Union Africaine, l’Union Européenne, l’Organisation de la Coopération Islamique, les Nations Unies, la France.
Toutefois, malgré la signature du Cessez-le-feu du 23 mai 2014 et le début des pourparlers inclusifs inter maliens le 16 juillet 2014 sous l’égide de l’Algérie à qui nous rendons un vibrant hommage ainsi qu’à l’équipe de Médiation pour les avancées notables enregistrées, la situation sécuritaire dans la région de Kidal ne s’est pas améliorée. Elle a d’ailleurs continué à se dégrader avec les groupes armés qui ont adopté une logique de guerre larvée et d’expansion territoriale.
Cet élan a été favorisé par la fin de la Mission SERVAL et le repli des unités maliennes au sud, ce qui a créé un vide sécuritaire.
Les récentes attaques terroristes dirigées contre les troupes de la MINUSMA et la Force Barkhane, montrent à suffisance la complexité de la situation sécuritaire de notre pays.
De plus, la mise en œuvre du Cessez-le-feu du 23 mai 2014, a d’emblée considérablement restreint la présence de nos Forces de Défense et de Sécurité dans les régions du Nord.
Dans le vide sécuritaire ainsi crée, la MINUSMA se retrouve donc seule à faire face dans les trois régions au retour offensif des djihadistes subissant des attaques terroristes visant ses convois, ses positions et ses installations. Les populations civiles sont elles aussi visées par ces actions pernicieuses.
Il est évident que les groupes terroristes sont aujourd’hui dans une logique de réoccupation de leurs anciens gites dans le but de faire partir les forces internationales et maliennes.
Mesdames et Messieurs,
Ce regain de violence de la part de ces groupes terroristes constitue aujourd‘hui une sérieuse menace contre la paix non seulement au Mali, mais aussi contre la stabilité de la sous-région et du reste du monde. Il urge donc de prendre les dispositions qui s’imposent pour éviter de compromettre notre objectif de restauration de la paix.
Au regard de la situation qui prévaut sur le terrain, force est de reconnaitre que nos objectifs ont changé car nous ne sommes plus hélas dans une situation de maintien de la paix classique. Nous sommes dans un environnement hostile marqué par la recrudescence du terrorisme avec des modes opératoires nouveaux
Pour toutes ces raisons, Il est absolument nécessaire aujourd’hui de se convaincre si besoin en était que le dispositif sécuritaire actuel avec au centre la MINUSMA a atteint ses limites comme cela a été constaté lors de l’examen par le Conseil de Sécurité, du premier rapport du Secrétaire Général au titre de la Résolution 2164.
Partant de ces constats, nous devons envisager deux possibilités pour parvenir à nos objectifs :
La première option serait de renforcer l’action de la MINUSMA sur le terrain en actionnant toutes les possibilités qu’offrent les paragraphes 12 et 13 du dispositif de la résolution 2164 sous le chapitre VII avec :
- Le redéploiement des forces de la MINUSMA au nord de la boucle du Niger et en particulier dans les zones sensibles ;
- La révision des règles d’engagement pour les adapter aux conditions du terrain ;
- L’amélioration des capacités des forces en matière de renseignement ;
- La mise en mettre en place d’un système efficace de protection des forces ;
- La rotation des contingents
- donner plus de fermeté à l’exécution du mandat, en invitant plus particulièrement les troupes de la MINUSMA à répliquer énergiquement aux attaques terroristes et en poursuivant, si besoin en était, les assaillants.
Enfin, les forces de la MINUSMA doivent être dotées de moyens et d’effectifs leur permettant d’ériger une brigade d’intervention mixte, MINUSMA- BARKHANE- FAMA formée et équipée pour mieux faire face aux réalités actuelles du terrain et lutter contre le terrorisme et la criminalité organisée.
La deuxième option serait de créer une force d’intervention rapide comme que je l’ai demandé à l’occasion de l’examen du premier rapport du secrétaire général des Nations Unies au titre de la résolution 2164.
La pertinence de la mise en place de cette force n’est plus à démontrer et par conséquent, je réitère ma demande et lance un appel au conseil de sécurité afin que des dispositions urgentes soient prises pour qu’elle soit opérationnelle dans les meilleurs délais.
Cette force pourrait être constituée de contingents de nos frères nigériens, tchadiens aguerris et d’autres pays, qui ont fait leurs preuves sur le théâtre des opérations dans des circonstances que nous savons tous.
Mesdames et Messieurs,
Dans les deux cas, nous prévoyons :
- d’impliquer davantage les Forces Armées Maliennes (FAMA) dans l’exécution de missions et veiller à une meilleure coordination de l’action des forces présentes ;
- de créer une cellule conjointe de planification et de conduite des opérations entre les FAMA, les troupes de la MINUSMA et celles de Barkhane ;
Nous sommes conscients que nos capacités opérationnelles sont mises à rudes épreuve. Mais, nos forces de défense et de sécurité doivent et sont prêtes à apporter leur contribution au succès de la Mission et aider à réduire sensiblement la vulnérabilité des troupes de la MINUSMA et de la Force Barkhane.
Mesdames et messieurs,
Je voudrais, avant de terminer mon propos adresser à tous les pays contributeurs les remerciements et la profonde gratitude du gouvernement et du peuple malien tout entier pour tous les sacrifices qu’ils ne cessent consentir pour le retour de la paix et de la sécurité dans mon pays.
Je vous remercie.
Un bon mec
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