Le football camerounais est toujours plongé dans la crise au plus haut sommet de sa hiérarchie, malgré la lueur d’espoir qu’avait déclenché l’annonce de la fin du différend entre le président de la Fecafoot, Samuel Eto’o, et le sélectionneur Marc Brys.
Rebelote. Dans un communiqué signé par son secrétaire général Blaise Djounang et publié lundi, la Fecafoot annonce avoir “pris acte de de l’exclusion de la FECAFOOT de la préparation des rencontres devant opposer l’Equipe nationale du Cameroun à celle du Cap-vert et de l’Angola.”
Ces matchs s’inscrivent dans le cadre des éliminatoires pour la Coupe du monde 2026 et sont prévues les 08 et 11 juin à Yaoundé et à Luanda.
Imbroglio
Selon les médias locaux, la couleur a été annoncée dès l’arrivée des joueurs à leur hôtel. Fait inédit, ils ont eu droit à un accueil par deux délégations, celle du ministère des sports d’un côté, et celle de la Fecafoot de l’autre. Ambiance.
Avant le début des séances d’entraînement, Marc Brys déplore l’absence de ballons et d’équipement pour s’entraîner. “C’est du jamais vu. Je suis dans le métier depuis 26 ans et je n’ai jamais vu ça”, a lâché Brys à un média local.
La Fecafoot, quant à elle, dénonce “un ensemble de faits suffisamment graves qui se sont déroulés le dimanche 02 juin” lors de l’entrée en stage de préparation de l’équipe nationale.
La Fédération camerounaise justifie se retirer pour “ne pas être complice d’un trouble à l’ordre public et d’agissements qui méprisent à la fois les recommandations de Son Excellence Monsieur le Président de la République, les règles et usages en vigueur lors des compétitions organisées par la FIFA.”
Une nomination qui a mis le feu aux poudres
La nomination par le ministère des sports du technicien belge Marc Brys pour prendre la tête du banc de touche des Lions Indomptables a été l’élément déclencheur de la crise que traverse le football camerounais.
Une nomination rejetée par le président de la Fecafoot, Samuel Eto’o, qui a viré à trois reprises le coach désigné par les autorités, avant de le rappeler à chaque fois.
D’aucuns estiment que ce qui s’est passé mardi au siège de la FECAFOOT était prévisible, vu le contexte dans lequel le nouvel entraineur de l’équipe nationale avait été nommé le 2 avril 2024.
En effet dans la convention signée en 2015 entre le ministère des Sports et de l’Education physique et la Fédération camerounaise de football (FECAFOOT) relative à la gestion des sélections nationales de football, il y est indiqué en son article 9 que c’est sur proposition de la fédération que le ministère nomme le sélectionneur.
Mais, dans un communiqué rendu public le 4 avril, la FECAFOOT, avait exprimé son « grand étonnement » après avoir appris que le ministère des Sports avait engagé Marc Brys comme nouveau sélectionneur de l’équipe nationale.
« La Fédération camerounaise de football a appris, en même temps que tous les Camerounais, la nomination à des postes de responsabilité au sein de la sélection nationale de football masculin senior », avait indiqué le communiqué qui a précisé que c’était une décision « unilatérale ». Selon l’instance dirigeante du football camerounais, c’est un « acte qui est contraire aux termes du décret n° 2014/384 du 26 septembre 2014, relatif à l’organisation et au fonctionnement des équipes nationales de football ».
Prise de bec au siège de la FECAFOOT mardi
Le président de la Fédération camerounaise de football (FECAFOOT), Samuel Eto’o Fils a eu une vive altercation avec le nouveau sélectionneur de l’équipe nationale, les Lions Indomptables du Cameroun ce mardi, au siège de l’institution sportive.
Le Belge Marc Brys, dont la nomination a été annoncée par la Fédération camerounaise de football (FECAFOOT) le 8 mai 2024 pour entrainer l’équipe nationale, ne sera pas à la tête des Lions Indomptables du Cameroun pour la double confrontation contre le Cap Vert et l’Angola le 8 juin prochain. Il a écopé d’une mise à pied.
Et pourtant, jusqu’à hier, rien ne présageait ce retournement de situation à quelques jours de deux matchs aussi décisifs de l’équipe nationale du Cameroun. A l’origine, une réunion du Comité exécutif de la FECAFOOT au cours de laquelle le nouveau sélectionneur devrait présenter son plan des deux matchs, qui a tourné au vinaigre.
L’accrochage entre les deux hommes a été violent, à voir la vidéo postée sur les réseaux sociaux hier. Samuel Eto’o a d’abord eu une première prise de bec avec le Conseiller du ministère des Sports, Cyrille Ntolo à qui le président de la fédération a demandé d’évacuer les lieux.
Ensuite sa discussion avec Marc Brys a été particulièrement animée. Le ton a été vite monté. « Vous êtes entraîneur parce que je vous ai nommé, vous n’êtes pas entraîneur parce que quelqu’un d’autre vous a nommé », a crié Eto’o au visage du sélectionneur.
Et il a ajouté, toujours en criant sur Brys : « Vous ne faites pas la politique au Cameroun, il n’y a qu’un homme qui la fait et c’est le président Biya. Je suis le président de la Fédération et je dois assumer ce que vous faites. Je ne ferais pas ce que vous faites dans votre pays. Vous ne me parlez pas comme ça. Asseyez-vous, on va travailler. Arrêtez un peu ce bordel. Vous pensez que vous êtes dans quel pays Monsieur ? Je peux faire ça en Belgique ? Comment vous pouvez faire ça au Cameroun ? ».
Son interlocuteur ne s’est pas fait prier non plus. « Toi, non plus tu ne peux pas faire ça. Tu n’as jamais été entraîneur », a répondu Marc Brys. « J’ai été entraineur », a rétorqué Samuel Eto’o. « Pour trois semaines », lui a rappelé le sélectionneur. « Oui j’ai été un très grand joueur », a souligné le président de la FECAFOOT. « Félicitations », a finalement dit son interlocuteur qui lui a serré la main avant de quitter les locaux de l’institution.
Marc Brys mis à pied, un nouveau staff pour les Lions
Dans la vive discussion avec le nouvel entraineur mardi, le président de la FECAFOOT a prévenu qu’il l’éloignerait de l’équipe nationale s’il quitte la réunion.
Quelques heures après cette altercation, un Comité d’urgence de la FECAFOOT, réuni pour prendre des « mesures au regard du comportement inapproprié de l’entraineur-sélectionneur national et ses Assistants suite à la convocation qui leur a été adressée » a pris sa décision.
« Le Comité d’urgence à l’unanimité de ses membres et sur proposition du président de la FECAFOOT décide de la modification de l’encadrement technique de la sélection nationale masculine ‘’A’’ du Cameroun », a indiqué la décision.
Ainsi, Ndtoungou Mpile Martin devient entraineur-sélectionneur par intérim, avec comme adjoint intérimaire, Pagou David. Tinkeu Nguimgou Narcisse est le préparateur physique par intérim.
« Le Comité d’urgence, à l’unanimité de ses membres, donne quitus au président de la FECAFOOT de communiquer, en extrême urgence, la liste des membres désignés par intérim de la structure d’encadrement au Minsep et à la FIFA, de procéder à la conformisation des actes de prise de fonction des personnes désignées ».
Marc Brys est donc mis de côté en attendant. Les Lions Indomptables du Cameroun seront donc coachés le 8 juin prochain par le nouveau staff nommé par le Comité d’urgence, dans leur confrontation contre le Cap-Vert.
Mais, selon les analystes sportifs, cette tension est loin de finir. Dans tous les cas, la Fédération internationale de football association (FIFA) a, dans un courrier envoyé à la FECAFOOT le 6 mai 2024, a demandé que l’article 13 de la convention entre le ministère des Sports et la FECAFOOT, relatif au règlement des conflits, soit mis en vigueur.
« Par ailleurs, nous sommes également de l’avis que les décisions concernant le recrutement des membres des structures d’encadrement doivent rester parmi les droits et compétences réservés au Comité exécutif de la FECAFOOT », a écrit Kenny Jean-Marie, Directeur de la Division Associations membre de la FIFA.
Réunion au ministère des sports après le grabuge
C’était l’évenement le plus attendu ce mercredi au Cameroun. Une réunion convoquée en milieu d’après midi par le ministre des sports, après le grabuge qui a fait le tour du monde, à la fédération camerounaise de football mardi.
Cette réunion comptait pour les « préparatifs aux deux rencontres internationales qui opposeront les Lions Indomptables aux sélections nationales du Cap-Vert et de l’Angola, respectivement les 08 et 11 juin 2024 à Yaoundé et à Luanda », selon le communiqué du ministère des Sports..
L’opinion attendait surtout de savoir si l’ancien international camerounais, Samuel Eto’o, devenu président de la fédération camerounaise de football, allait se présenter à cette rencontre, après qu’il a éconduit la veille, le représentant du ministre, qui voulait assister ce qui allait être le premier face à face entre Eto’o et Marc Brys, l’entraineur dont la nomination fait polémique.
Finalement, l’ancien capitaine des Lions Indomptables ne s’est pas présenté, et a preféré faire représenter la fédération par trois membres de l’institution.
Surtout que la veille, Eto’o a pris un autre acte, désignant un coach par intérim, après la nommination il y a quelques semaines, d’une équipe parallèle de membres de l’encadrement technique de la sélection de football fanion du pays.
l’un des membres de cette équipe d’encadrement (version Eto’o) devait d’ailleurs représenter la fédération dans cette rencontre avec le ministre.
Finalement, il a hérité d’une place à l’arrière, laissant la première loge à celui nommé par le ministère des sports.
Le ministre des sports n’a d’ailleurs eu de cesse dans son allocution, de prononcer le nom du technicien belge nommé par ses soins “sous hautes instructions” de la présidence, reléguant au second plan, l’interrimaire dont Samuel Eto’o a annoncé la nomination comme intérimaire mardi soir.
« A la FECAFOOT, il s’agira d’assurer de bonnes conditions de travail à l’entraineur-sélectionneur, Marc Brys et à son équipe, notamment par la mise à la disposition des matériels didactiques et des équipements sportifs nécessaires », a indiqué Narcisse Mouelle Kombi, le ministre des Sports lors de la réunion qu’il a convoquée ce jour, à l’endroit des responsables de l’instance faîtière du football dans le pays.
Eto’o présente des excuses
“D’abord je commencerais par présenter mes excuses, parce que lors de notre première rencontre, il y a eu toute l’émotion”, a déclaré Samuel Eto’o, avec un léger sourire, regardant le coach Marc Brys, au moment de tenir son propos liminaire lors de ce bref point de presse au siège de la Fécafoot jeudi dernier.
Mais très vite, l’ancien capitaine des Lions Indomptables a resseré sa mine, avant de dire: ” le peuple camerounais étant plus important que nous, c’est le seul intérêt qui doit nous animer à travailler.”
“Nous avons des convictions, nous ne changerons pas”, a-t-il ajouté, déclarant aussi “nous n’avons plus beaucoup de temps, sachez que, parmi les dernières personnes qui seront à côté de vous, je serai là”.
Ce qui semble donc mettre un terme à plusieurs semaines de pugilat entre les deux camps, à en croire l’Inspecteur Général des sesrcices au ministère des sports. “Le président a eu une bonne séance de travail avec ses coachs. En bon chrétien, je dirai que, si c’est le diable qui nous a hantés, ce diable a eu honte”, a laissé entendre Mbarga Dissake.
Si la question du coach et de ses adjoints semble avoir été réglée, rien n’a cependant filtré sur les autres membres du staff technique désignés par Samuel Eto’o et dont il exigeait le maintien, en lieu et place de ceux désignés par le ministère des sports, pour un retour au calme.
On sait au moins que jeudi matin, au moins trois membres, dont le coach, son adjoint et le préparateur physique désignés par Eto’o mardi soir pour assurer l’intérim, lors des deux prochains matchs des Lions Indomptables, ont présenté leurs démissions.
Mercredi soir, deux d’entre eux ont été notifiés de leur affectation dans des zones réculées du pays par le ministre des sports dont ils dépendent administrativement.