Yaya Coulibaly, Marionnettiste Historien : « Le Mali est plus important pour qu’on puisse parler du Mali coura »

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Marionnettiste depuis plus de 30 ans, le président directeur artistique de la compagnie « Sogolon » marionnette du Mali, Yaya Coulibaly, dans cette interview parle de la place qu’occupent les marionnettes dans la consolidation de la paix au Mali.

 Mali Tribune : Les marionnettes ont-elles encore leurs places dans la société malienne d’aujourd’hui ?

Yaya Coulibaly : La première école de formation de socialisation au Mali depuis le fondement des sociétés, du congrès de Kourougan Fouga a été l’art de la marionnette. La marionnette est considérée comme la première écriture du Mali parce qu’elle a beaucoup de significations. Elle se trouve dans les chansons, les danses. Quand elle apparaît sur la scène, tout le monde est convié, on forme un grand cercle qui est le placenta de l’univers. Tout le monde danse.

Nous ne sommes pas dans une société d’initiation d’aujourd’hui. Nous sommes sur le chemin d’une transmission qui est à la fois pédagogique. Les enseignants peuvent illustrer les comptes avec les marionnettes. Ça créé l’éveil de créativité et de sensibilité chez les enfants. Au niveau professionnel, nous pouvons illustrer des contes pour raconter les meilleures histoires.

Mali tribune : Quel rôle joue-t-elle dans la consolidation de la paix et de la cohésion ?

Y.C. : La marionnette joue plusieurs rôles. Elle a une fonction sociale : le rassemblement, la solidarité. La marionnette est l’élément pédagogique qui lutte contre la haine, la guerre, l’animosité. C’est une identité culturelle pour nous. Elle est le symbole de la libre expression. Quand un message passe par l’être humain, c’est évènementiel, mais quand le message passe par une marionnette, c’est pour l’éternité. Elle prône aussi ce vivre ensemble qui a été toujours l’éthique des Maliennes et Maliens. Cet élément fédérateur est extrêmement important.

Mali tribune : De nombreux Maliens réclament aujourd’hui un Mali coura ou nouveau Mali. Pensez-vous que c’est possible

Y C.: En tant qu’historien, chercheur, traditionaliste, le Mali est plus important pour qu’on puisse parler du Mali coura. Il ne peut pas exister. Le Mali est éternel, fort. Il fut le berceau de l’humanité. C’est cette terre qui a vu la naissance des grands empires, les sociétés, les rois et fondateurs.

Des festivals comme Ag’Na sont un exemple de socialisation, de réconciliation et qui pousse les Maliens à reconnaitre la valeur de l’autre. Quand le festival Ciné A dos et le festival au Désert se donnent la main, ça veut dire que progressivement, il y a le retour d’un Mali médiéval, du vrai du Mali. Si on se donne la main, on peut ériger une pyramide.

Mali Tribune : La construction d’une pyramide, pour le moment, tarde à venir

Y.C.: Ce qui nous arrive depuis 2012 ce n’est pas un mal en soi. Toutes les grandes nations ont traversé des périodes comme ça. J’ai bon espoir que l’esprit des ancêtres fera en sorte que nous allons retourner à nos amours premiers. On va y arriver. C’est les accidents de parcours, beaucoup en payeront les frais, au finish c’est le pays qui gagne.

Je souhaite pour le Mali une terre de paix. Je souhaite pour la jeune génération une prise de conscience. Il faut qu’elle retourne au travail, qu’elle étudie et qu’elle ne se s’agrippe pas dans le vide.

Il faut que nous ayons le temps d’écoute, de responsabilité, de compréhension et se dire que je suis le futur cadre de la famille parce que le pays commence par la famille. Il faut que la jeunesse aille vers ça.

Recueillis à Koulikoro par

Kadiatou Mouyi Doumbia

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