Yacouba Katilé, secrétaire général de l’UNTM à cœur ouvert : « Ce n’est pas notre personne qui compte mais le poids syndical de l’organisation »

0
Katile-untm
Katilé, SG de l’Untm

A l’issue de leur  meeting d’information du mercredi 13 aout, le secrétaire général de l’UNTM, Yacouba Katilé a bien voulu nous accorder une interview à bâtons rompus. Au cours de laquelle, il est revenu sur le bien fondé de leur préavis de grève des 21 et 22 aout prochain, mais aussi le mépris dont les autorités actuelles font montre à l’égard de l’actuel bureau exécutif de l’UNTM.

 

 

 

Le Tjikan : Vous venez de déposer un préavis de grève sur la table du Gouvernement, pouvez nous dire un plus sur les motifs de cette soudaine montée d’adrénaline ?

 

Yacouba Katilé : Merci de m’avoir donné l’occasion de m’exprimer sur le préavis de grève que l’Union nationale des travailleurs du Mali, l’UNTM, a déposé sur la table du Gouvernement. Je voulais rappeler tout simplement que le Bureau actuel, issu du dernier congrès a pris fonction, en avril 2014, il y a de cela 5 mois. A la faveur de la fête des travailleurs, le 1er mai dernier, nous avons signalé les préoccupations des travailleurs du Mali à travers le discours que nous avons eu à prononcer ce jour-là. Cette allocution a été l’occasion pour nous d’attirer l’attention du gouvernement sur l’existence d’un cahier de charges avant la tenue du dernier congrès, dont la mise en œuvre n’est pas encore effective. Aussi, nous exigeons l’exécution des points d’accord, qui ont fait l’objet de signature d’un protocole d’accord en octobre 2011. A ce cahier de charge se greffe de nouvelles revendications, issues des résolutions du dernier congrès, déclinées en doléances et compilées dans un cahier, qui va être déposé sur la table du gouvernement. En retour, la centrale exige de celui-ci des résultats de façon diligente eu égard à la situation précaire des travailleurs.

N’oublions pas que nous venons de traverser un moment difficile. Depuis le coup d’Etat en mars 2012, jusqu’à l’élection du nouveau président de la République, son Excellence, El hadj Ibrahim Boubacar, les revendications des travailleurs étaient mises en veilleuse, compte tenu de la situation du pays. Tandis que, la courbe du coût de la vie (en particulier le coût de l’électricité, de location des maisons, etc.) a continué à augmenter, pendant que les salaires sont restés stationnaires. Les travailleurs continuaient à souffrir. Il urge donc que le gouvernement fasse quelque chose pour les travailleurs. C’est pour cette raison, que les résolutions déclinées en cahier de doléances ont été déposées sur la table du gouvernement. Nous attendions une réponse rapide aux points qui n’ont pas fait l’objet d’accord et se fixer un échéancier de discussion sur les points de divergence dans le cadre du dialogue social. Malheureusement, nous n’avons pas bénéficié d’oreille ententive, ni  auprès du gouvernement, ni auprès du Patronat. Aussi, en dépit de notre sortie médiatique pour décrier la situation, le gouvernement et le patronat ne nous laissent pas d’autres choix  que la grève. Voilà les motivations de ce préavis de grève.

 

Le Tjikan : Après le dépôt du préavis, est-ce que  vous  avez été approché par le  gouvernement pour  des discussions ?

 

Yacouba Katilé : Naturellement, lorsqu’un préavis est déposé, la loi 87-47 demande l’ouverture des négociations, autrement dit, la mise en place d’une commission de négociation. C’est le Ministre en charge du Travail et de la Fonction Publique, qui signe l’arrêté de création de la Commission. Mais, auparavant, il écrit à chaque partie de lui communiquer par écrit la liste de ses conciliateurs désignés. Donc, conformément à  la loi, nous avons été saisis par le  Ministre dans ce sens. Nous avons non seulement déposé notre mémoire en défense, mais la liste de nos conciliateurs. C’est dire qu’au niveau de l’UNTM, nous sommes prêts pour les discussions.

 

Le  Tjikan : Que demandez-vous concrètement au  gouvernement ?

 

Yacouba Katilé : Je ne peux pas exposer ici dans les détails les 17 points de revendications contenus dans le cahier de charges déposé sur la table, mais simplement le dernier point des revendications, qui concerne l’accord signé en 2011, dont la mise en œuvre n’est encore effective. Nous exigeons l’évacuation des points qui ont fait l’objet d’accord afin de passer aux nouveaux points qui concernent, comme je l’ai tantôt signalé, la cherté de la vie, les tarifs d’électricité et d’eau, le coût élevé des logements, les allocations pour les travailleurs. Il s’agit aussi des doléances relatives à l’élaboration de certains règlementaires et à la ratification d’un certain nombre de conventions internationales, signées par le Mali. Il s’agit notamment des conventions relatives à la protection sociale, aux conditions du travail. Mais, la revendication fondamentale concerne le relèvement de la valeur indiciaire du Mali. Nous sommes dans l’ordre de 300, tandis que certains pays voisins dans le même espace UEMOA sont à plus de 800 Fcfa, voire 1000 Fcfa, voyez-vous la différence ?

Même pour que les partants à la  retraite puis respirer, il faut revoir l’indice de paiement. Cette revendication concerne non seulement les travailleurs en activité, mais aussi les retraités aussi. Ceux-là qui ont tout donné au pays quand ils avaient la force de travailler. Il faut qu’en retour,  qu’ils puissent vivre dignement de leur repos.

 

Le Tjikan : Quelle appréciation faites-vous  du manque de réactivité que vous avez évoqué tantôt ?

 

Yacouba Katilé : Pour nous, c’est simplement du mépris. Comment comprendre qu’une centrale syndicale aussi importante comme l’UNTM, au terme de son congrès, court derrière les autorités. Ne serait ce que pour les présenter le Bureau et discuter des grandes lignes de ses actions futures et des cadres d’échanges pour s’entendre sur un minimum de cadre de travail  pour les discussions futures. Nous pensons que c’est simplement du mépris pour la centrale. Pour nous, il ne s’agit point de mettre en avant notre personne, mais l’organisation, qui a une philosophie et une ligne de conduite, à  laquelle, nous ne pouvons nous déroger.

 

 

Le Tjikan : C’est donc une démonstration de muscle ?

 

Yacouba Katilé : Non, pas une démonstration de muscle en tant que telle, mais nous voulons nous faire valoir. Il s’agit de cela. Permettez que je me répète, ce n’est pas notre personne qui compte mais le poids syndical de l’organisation, que nous incarnons. Nous sommes les représentants des travailleurs. Ce que nous entretenons, c’est le monde des travailleurs et s’il y a un lien aujourd’hui, c’est celui des travailleurs.

 

Le Tjikan : Quelles sont les perspectives ? Est-ce que la grève va se poursuivre au cas, vous n’aurez pas satisfaction au terme des deux jours d’arrêt de travail ?

 

Yacouba Katilé : Les choses sont simples à ce niveau, comme je l’ai dis tantôt, il y a une loi à observer. En cas de grève, une commission de conciliation est mise en place. Nous allons aux négociations, si nous avons satisfaction au terme des négociations, nous allons mettre fin à notre mouvement de grève, au cas échéant, nous sommes obligés de poursuivre nos actions. Mais nous osons espérer que le gouvernement  ne nous pousse dans cette direction.

 

Le Tjikan : Votre mot de la fin ?

 

Yacouba Katilé : C’est de profiter de vos colonnes pour demander à nos militants de se mobiliser autour de notre mot d’ordre, il y va de leur intérêt. C’est également pour faire valoir leur organisation, avec laquelle on doit compter.

Interview réalisée par Mohamed .A. Diakité

Commentaires via Facebook :