Depuis le 20 février dernier, le Chef d’état-major général des armées, dans un souci d’améliorer la situation sécuritaire, a interdit l’usage des engins à deux roues très utilisés par les terroristes dans certaines localités de la région de Ségou comme les cercles de Niono et Ké-Macina, pour commettre leurs attaques. Et depuis l’instauration de cette mesure, il y’a une accalmie dans les zones concernées. En tout cas, c’est l’impression donnée par Tièbonè Tangara, Maire de la Commune rurale de Sana dans le cercle de Ké-Macina dans la région de Ségou, dans une interview qu’il nous a accordée.
Le Tjikan : Que pensez-vous de la mesure d’interdiction des engins à deux roues ?
Tièbonè Tangara : Nous en avons été informés par voie hiérarchique à travers le Ministère de l’Administration Territoriale avant même le communiqué officiel. Nous étions inquiets. Mais force est de reconnaître que depuis son instauration le 20 février, nous avons effectivement connu une accalmie par rapport à la circulation des hommes armés à moto dans notre commune en particulier et dans le cercle de Ké-Macina en général. Quand on prend la mesure, on est inquiet car notre vie est intimement liée à ces engins à deux roues. Ce sont ces engins que les paysans utilisent le plus pour aller au champ. Rares sont les familles dans lesquelles on ne trouve pas deux ou trois motos. Donc, ces engins sont devenus des besoins incontournables. On avait cette inquiétude. Mais la sécurité est primordiale. C’est pour cela que nous avons commencé par sensibiliser la population pour qu’elle puisse comprendre la mesure et la respecter malgré son caractère très contraignant. Je le dis et je le répète, cette mesure a beaucoup contribué à améliorer la situation sécuritaire dans les zones concernées, créant une accalmie. C’est une bonne mesure qui aujourd’hui a tendance à être violée par la population elle-même.
Est-ce que la mesure a des répercutions sur la vie des populations?
Bien-sûr car c’est une mesure très lourde de conséquences parce que nos moyens de déplacement sont les motos. Toutes nos activités se font à moto comme le recouvrement des impôts ou les dépenses au niveau de notre cercle. On n’a pas de véhicule de liaison. Notre principal moyen de déplacement est la moto. Pratiquement, tous les services techniques qui évoluent chez nous travaillent à moto. Par exemple, en cas de manque de médicaments dans une pharmacie sur place, l’agent de santé est obligé d’aller en chercher à moto dans une localité voisine à défaut d’un véhicule. La moto est utilisée même pour transporter les malades. Vous voyez ce que ça fait? Ne parlons pas du commerce. Ce sont des milliers de personnes qui utilisent les motos pour aller aux foires. Quand on interdit l’utilisation de ces engins entre villages, c’est quasiment une paralysie générale au niveau de l’économie locale.
Qu’est-ce vous proposez alors comme solutions pour diminuer les conséquences de la mesure ?
Comme il y a eu des mesures un peu partout pour améliorer la sécurité, nous proposons par exemple de fixer des heures de circulation de ces engins comme c’est le cas par exemple à Mopti. C’est-à-dire autoriser la circulation de ces engins dans la journée par exemple de 18h à 6h du matin. Je crois que c’est une proposition envisageable pour soulager les populations. Sinon, elles souffrent énormément de cette mesure d’interdiction totale des engins à deux roues entre villages.
Un appel à lancer ?
J’invite les populations à s’acquitter de leurs impôts pour la survie de la commune. Car c’est avec ces impôts que la commune arrive à fonctionner. On remarque une récupération politique de la situation auprès des populations par des individus qui les appellent à la désobéissance civile et à ne s’acquitter de leurs devoirs civiques comme le payement des impôts. Cela est très grave. Car c’est la survie de notre commune qu’ils mettent en jeu. Beaucoup de personnes sont en train de profiter de cette situation sécuritaire pour procéder à des récupérations politiques. Je lance donc un appel aux populations afin qu’elles continuent à payer leurs impôts car, ces impôts sont la mamelle de notre économie locale. En ce qui concerne mes adversaires politiques, je leur dirai que l’heure n’est plus à la campagne et la division mais plutôt à un sursaut pour le bien-être de nos concitoyens.
Propos recueillis par Modibo Dolo