Seydou Badian, sur les événements survenus à Kidal, le 21 mai dernier : «Ce sont les impérialistes français qui veulent qu’on négocie, ce sont eux qui veulent notre sous-sol»

«Il ne faut pas qu’ils nous prennent pour des débiles. Le MNLA pour nous c’est la France, c’est les impérialistes français. J’ai toujours dit, que je fais un distinguo entre la France que je connais, que j’ai connu et que vous aussi vous connaissez et quelques conquérants, quelques-uns qui pensent qu’il faut reconquérir l’Afrique»

Face à la crise au Nord du Mali, l’auteur de sous l’Orage s’insurge contre la France et pointe un doigt accusateur sur Jean Yves Le Drian et Laurent Fabius deux colonialistes français pour la partition du Mali. Dans un tel contexte, l’octogénaire demande un soulèvement général du peuple malien contre la France.

L’Inter de Bamako : En tant qu’ancien compagnon de Modibo Keïta, quelle analyse faites-vous des événements du 21 mai 2014 à Kidal ?

Seydou Badian : Moi, j’en ai été malade. J’ai eu l’occasion de le dire, c’est une vieille histoire. Nous avons connu une rébellion en 1962 et 1963, qui étaient fomentées, inspirées, pilotées par des colonialistes français. Nous connaissons les noms ; ils avaient faits des tracs ; pourquoi ? Par ce qu’ils savaient ! Il y a n’en qui servaient dans le nord du Mali et d’autres au sud algérien. Ils savaient que nous étions dans la guerre avec l’Algérie.

L’actuel président, j’ai eu l’occasion de le dire, je le répète Abdoul Aziz Bouteflika était au Mali et que son nom de guerre est resté (Abdel Kader Mali). C’est pour nous punir d’avoir soutenu les «fellagas» leur trac le disait qu’ils nous ont donné cette rébellion en récompense. Mais, elle a fini comme on s’y attendait. Je me souviens certains des rebelles de l’époque avaient essayé de mettre le roi Hassan II du Maroc de leurs côtés. Mais Hassan II, était un homme très franc, très intelligent et d’une honnêteté extraordinaire. Il est resté avec nous. Il nous a renvoyé d’ailleurs quelques uns, des rebelles de l’époque. Et il a dit non à ceux qui ont voulu lui mettre de leur côté ! Vous êtes des Maliens et le Président du Mali, c’est Modibo Keïta, vous allez vous expliquez là-bas. Ça été fait ainsi.

En passant, je dis, je suis désolé de constater le comportement de l’Algérie. Je l’ai toujours dit, je le répète dans la situation actuelle, je ne comprends pas le comportement de l’Algérie avec tout ce que nous avons fait, les risques que nous avons pris pour la libération de l’Algérie, de voir que l’Algérie joue toujours à la grande puissance.

Désolé, l’Algérie a été toujours pour moi un frère, qui joue au patron, qui se comporte non pas comme en frère, mais en patron, c’est vraiment d’hommage. J’ai été en Algérie invité par Ben Bella, c’était autre chose. Mais après Ben Bella, l’Algérie est devenue ce que nous voyons aujourd’hui. C’est d’hommage pour le Mali et c’est d’hommage pour l’Algérie.

L’Inter de Bamako : Le Mali signera dans les prochains jours un accord de défense militaire avec la France. Etes-vous pour ou contre?

Seydou Badian: Le 21 mai dernier, nous avons subi ce que tout le monde connait, contrairement à ce que l’on croit. Ce n’est pas des maliens : MAA, HCUA…. qui ont combattu l’armée malienne ! Ce sont les djihadistes et on a dit, qu’ils y avaient même des européens. Qu’est-ce qu’on va signer avec la France. Ils étaient là, moi à Bamako, je savais que ce n’était pas des maliens : HCUA, MAA…… Eux avec tous leurs appareils, tous leurs moyens, ils ne le savaient pas ! Ils sont venus au Mali pourquoi ? C’était pour combattre les djihadistes.

Les djihadistes nous agressent, les djihadistes nous font face, les djihadistes veulent nous éliminer, ils sont là. Ils attendent les bras croisés ! Qu’est-ce qu’on va signer avec eux. Je ne peux pas comprendre. Pour moi, il n’en est pas question ! On ne signera rien. Leur comportement, c’était pour que ces gens nous écrasent. Comme ça dans leur esprit, comme nous avons conscience de notre faiblesse. Nous allons nous précipiter à nous mettre dans leur bras pour signer les accords avec eux. Ils ont laissé les djihadistes tués les maliens, ils étaient en spectateurs. Ils veulent qu’on signe quoi avec eux ? Moi, je suis contre. Absolument, il n’en est pas question pour moi.

L’Inter de Bamako : Et la présence des forces étrangères au Mali ?

Seydou Badian : Nous avons le choix maintenant ; nous connaissons nos amis. Nous pouvons leur demander assistance, comme demain ils peuvent nous demander assistance. Il y a des amis de grande puissance, à qui nous avons rendu, d’énormes services. Ils le savent et nous le savons.

L’Inter de Bamako : Notre pays doit-il négocier avec le MNLA, après le carnage de Kidal ?

Seydou Badian: Négocier quoi ? Il n’est pas question d’autonomie encore moins de l’indépendance. On ne négocie pas avec le MNLA. Ce sont les impérialistes français qui veulent qu’on négocie, ce sont eux qui veulent notre sous sol. Qu’ils le prennent. Il ne faut pas qu’ils nous prennent pour des débiles. Le MNLA pour nous c’est la France, c’est les impérialistes français. J’ai toujours dit, que je fais un distinguo entre la France que je connais, que j’ai connu et que vous aussi vous connaissez et quelques conquérants, quelques uns qui pensent qu’il faut reconquérir l’Afrique.

Par ce que les ressources s’amenuisent quelque part en Europe. Maintenant, il faut foncer vers nous surtout avec la présence de la chine, c’est la terreur. Non ! Non ! On négocie quoi ? Si les français veulent traiter avec nous ; nous avons un gouvernement ; ils peuvent traiter. Mais, il ne faut pas que les frères jouent aux instruments des impérialistes.

L’Inter de Bamako : Le mot de la fin.

Seydou Badian: Préparons-nous ! Je propose que des jeunes de dix-huit (18) à vingt cinq (25ans) soient soumis à la préparation pré militaire (garçons et filles). À partir de 25ans que ça soit facultatif, mais de 18 à 25 ans que ça soit obligatoire.

Entretien réalisé par Bakary COULIBALY

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