Après 4 ans d’absence à cause de la crise malienne, la biennale africaine de la photographie reprendra ses droits à Bamako, ça sera du 31 octobre au 31 octobre 2015. Le thème de cette année est «Telling time ». Plus de 800 photographes africains sont attendus, pour l’exposition internationale 5 photographes maliens sont retenus par les 39 qui vont compétir. A quoi va ressemble cette 10ème édition des rencontres photos de Bamako, quelles sont les innovations et les difficultés dans l’organisation ? Nous avons rencontre le délégué de la Biennale de la photo de Bamako Samuel Sidibé, non moins directeur du musée national du Mali. Il nous parle de cette édition anniversaire.
Après quatre ans d’absence, les rencontres africaines de la photographie reviennent pour sa dixième édition, à quoi sa ressemblé cette reprise ?
Samuel Sidibé : la biennale de la photographie Africaine revient effectivement, parce que depuis 2011 nous n’avons pas produire la biennale normalement l’édition suivante aurait dû suivre en 2013. Malheureusement le pays était en crise et était impossible d’organiser la biennale. Nous sommes aujourd’hui très heureux de pouvoir présenter au public la dixième édition qui est une édition anniversaire comme vous l’avez si bien dit, ça sera la dixième. Ça va ressembler à quoi ? bien sûre une biennale de renaissance parce que quatre ans après, je pense que la biennale était attendue de professionnels. Pour vous donner un exemple, on avait habituellement entre 200 et 250 dossiers de candidatures pour la biennale et cette année nous avons reçu 800 dossiers. Cela prouve à tel point la biennale était attendue par les professionnels. Et ça donne l’importance de cette dixième édition. L’autre chose importante à dire, nous sentons un véritable engouement au niveau du publicateur national et des professionnels internationaux. On a une grande demande des gens qui souhaitent venir. Et je pense qu’on va probablement recevoir plus de gens que les biennales précédentes. Le thème de la biennale cette année est « telling time » autrement dit « le temps de raconter ». La directrice artistique est partie sur l’idée que la photographie doit servir aussi à raconter une histoire. On sort de la photographie en studio des années 60 et 70, on sort également de la simple photographie documentaire pour explorer la capacité des artistes africains. D’utiliser la photographie comme un moyen d’explorer le temps, l’histoire, le présent et probablement d’explorer le futur.
N’aurait pas un clin d’œil à la crise malienne qui vous a quand même empêché de tenir cette rencontre ?
Bien sûre qu’il y a un clin d’œil à la crise malienne, parce que la réflexion est partie de ça. Nous disant, le Mali connaît une crise l’Afrique aussi. De quelle manière les photographes peuvent travailler sur ces différentes crises pour raconter leur vision du monde et leurs histoires. C’est dont quelque chose d’importante, on entre dans la photographie qui n’est plus du studio mais qui utilise les moyens de la technique photographique pour raconter. Dont ça oblige le photographe à être plus que de déclencheur d’appareils mais être également de gens qui réfléchissent au monde. La dixième édition est également caractérisée par une envie de célébrer les vingt ans de la biennale. Nous allons avoir une exposition retro perspective des éditions précédentes qui va se tenir au Mussé de Bamako.
Les grandes articulations et les grands lieux de cette dixième édition seront où ? Comment ça va se dérouler ?
Là, on est assez traditionnelle, le Mussé national restera le cœur de la biennale avec l’exposition internationale et Panafricaine où seront présentés tous les artistes issus de la sélection. Il y aura dont 39 artistes, 8 ou 9 vidéastes qui seront présentés au Mussé national, avec une autre exposition qui sera dans notre salle d’exposition temporaire mais également au niveau du Park. Il y’aura d’autres expositions monographiques dans les salles permanentes du Mussé et le second lieu sera le Mussé du District où effectivement il y aura une monographie d’Okhai Ojeikere) qui sera présentée par l’exposition anniversaire. Et puis aussi, il y aura le mémorial Modibo Keita, où tout un ensemble de projets seront présentés. L’Institut Français fait parti également de la fête, la Bibliothèque nationale avec la maison africaine de la photographie. Ce sont dont les quatre grands lieux qui pourront abriter la biennale. Une des choses qu’on a voulu faire cette année et qui est importante à mes yeux est d’associer le maximum de photographes africains. Cela se fait à travers deux opérations principales : la première sera l’exposition de photographes Maliens qui vont avoir lieu à la maison africaine de la photographie communément appelé studio mali. C’est un projet qui consiste à faire une exploration des archives de certains studios qui existent dans les quartiers de Bamako. On fait une exploration de leurs archives suivie d’exposition dans l’environnement immédiate des studios. Ça permet d’associer les professionnels maliens à l’opération mais aussi de faire en sorte que ces expositions dans les quartiers créent un lien avec la population locale. C’est une dimension vraiment importante.
Est-ce une manière d’associer les photographes maliens qui se plaignaient de n’avoir pas été associés l’exposition internationale ?
Oui, mais, il faut rappeler que l’exposition internationale est le résultat d’une sélection africaine. Donc, je peux dire de façon satisfaisante qu’il y a cinq photographes maliens qui sont dans la sélection internationale. Il n’y a pas un seul pays qui a autant de représentants dans la sélection internationale. C’est vrai aujourd’hui, il faut une certaine capacité de faire en sorte que les initiatives se développent et cette année, il y en a déjà pas mal qui se sont développées. Il y a pleine d’association de photographes qui sont entrain de faire des activités dans le cadre du Off. Aujourd’hui on a environ 25 à 30 expositions en Off qui vont se tenir en ville. Il y a certaines associations qui ont de véritables projets dans le cadre de l biennale. Je pense que de plus en plus, il y a une vraie mobilisation artistique au tour de la biennale.
Dix ans après, est-ce que il y a un impact ?
C’est une bonne question ! Moi, je vais répondre qu’il y a effectivement un impact. Le premier impact est d’ordre général. Vous savez la photographie africaine avant la biennale, avant le développement de la biennale, elle n’existait pas vraiment. Si vous voyez en Europe, la photographie sur l’Afrique était faite par les photographes Européens. Aujourd’hui, les photographes africains existent. Si vous allez dans les grands festivals de photographie dans le monde vous trouverez les photographes africains. Moi, j’étais à Arly, il n’y a pas très longtemps et j’étais très content de voir la place la photographie africaine y jouait. Cela veut dire que nous sommes entrain d’être à l’origine du développement d’une profession et sa capacité à trouver sa place dans le système international. Le deuxième impact, aujourd’hui si vous allez sur le marché international (photo Paris) ou à d’autres grandes manifestations, vous verrez de plus en plus de photographes africains dans les galléries en Europe comme en Amérique. La nouvelle génération est entrain de véritablement ‘imposer. Moi, qui feuillète souvent les revues, je vois comment les reportages sur le Mali sont faits par les photographes maliens y compris pour la presse Européenne. Il est évident qu’on doit continuer à développer les choses. Ce ne sont pas les rencontres elles seules qui peuvent développer la profession photographique. Je pense par exemple que nous avons besoin d’une presse dynamique capable de donner de la visibilité à la photographie africaine. On a besoin d’outils qui permettent aux photographes africains d’être de plus en plus présents dans les médias et dans un ensemble de chose. Pour ce que les rencontres sont capables de faire, c’est de donner une visibilité internationale. C’est de développer une profession de la photographie. Et je pense qu’on est entrain de le faire.
Comparaison n’est pas raison mais à voir de prêt, Bamako Capitale de la photographie africaine comparer au Fespaco. Est-ce que un jour on aura un grand évènement qui va susciter de l’engouement auprès de la population avec les grands Off et les contours ?
Vous avez sans doute raison, comparaison n’est pas raison. C’est vrai que la différence entre le cinéma et la photographie c’est claire. Le cinéma d’ailleurs comme la musique sont des choses qui attirent plus davantage de public que la photo. Si vous allez à Dakar pour la biennale d’art contemporaine vous pouvez dire la même chose. C’est-à-dire qu’on se retrouve dans les événements à caractères artistiques qui ont véritablement du mal à s’implanter dans le public local. Il y a une réelle question en même temps, je pense que quand on travaille dans un certain nombre de domaines, il faut travailler dans la durée. On ne peut pas imaginer qu’une biennale de la photographie attire autant de monde que le festival sur le Niger. Le festival sur le Niger il y a la musique donc on ne peut s’attendre à un public pareil, on est dans un secteur, je peux dire des secteurs spécifiques ou il y a un long travail à faire pour qu’effectivement ces événements trouvent leur place dans le public local. Ce n’est pas seulement l’événement qui va le faire c’est aussi un contexte de développement global qui va permettre effectivement à ce que le plus nombre de gens s’intéressent à la photographie.
Est-ce que vous rencontré des difficultés dans l’organisation de cette rencontre ?
Vous savez, vous ne pouvez pas organiser un événement de cette taille sans rencontrer des difficultés. Je pense que la difficulté principale de mon point de vue et je pense qu’il faudra y réfléchir pour l’avenir c’est de sécuriser le financement de la biennale. Vous savez lors que vous organisez un événement tous les deux ans, et que tous les deux ans la question budgétaire reste une préoccupation. Je me dis que ce n’est pas bien. Moi je pense qu’il faut que la question de la sécurisation de financement de la biennale doive être au cœur de la préoccupation du ministère de la culture de l’artisanat et du tourisme. Je dois reconnaître que cette année le ministère a fait un effort important ça n’a pas été facile. Je le sais, mais je pense que la logique à développer c’est vraiment d’inscrire une fois pour toute le financement de la biennale dans le budget de l’état. Je pense que si le Mali veut véritablement être porteur de cette biennale. Si le Mali veut être véritablement fier cette biennale il est important que le Mali accepte un engagement financier à hauteur de souhait.
Kassim TRAORE
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