PDG de l’ATI, Dr. Lamissa Diakité : Les nouveaux villages agricoles, un programme sur lequel il faut compter

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Le Mali a une économie à dominance agro-sylvo-pastorale et très dépendante des aléas climatiques. 80 % de la population active travaille dans ce secteur qui représentait 44 % du PIB en 1995 (16 % pour le secteur secondaire et 40 % pour le secteur tertiaire). Les productions agricoles sont très tributaires des aléas climatiques et restent confrontées à des défis majeurs notamment la maîtrise de l’eau pour réduire leur dépendance aux aléas et aux changements climatiques, la modernisation du système de production agricole, la mise au point des variétés adaptées aux changements climatiques.

Aussi, le développement de l’agro-industrie pour transformer la production en vue de créer de la valeur ajoutée et des emplois, l’organisation des acteurs à tous les maillons des chaînes de valeur, la mobilisation des financements et la sécurisation foncière, avec potentiel important de terre  aménageable avec 2 200 000 Ha et un taux d’aménagement d’environ 22% depuis l’indépendance du Mali,sont, entre autres, les contraintes à lever. Face à ces défis, le gouvernement a songé à la mise en œuvre de l’Agence d’aménagement des Terres et de fourniture de l’eau d’Irrigation (ATI). Cette agence constitue aujourd’hui un espoir, en termes d’émergence et de développement notamment la création des emplois en absorbant le chômage des jeunes dans les jours à venir, si tous les moyens dont elle aurait besoin sont  réunis.  Depuis son élection, le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita a consacré 15% du budget national au secteur agricole au lieu de 10% recommandé par les pays africains. Pour cette raison, il inscrit dans le projet présidentiel l’aménagement de 100 049 hectares en maîtrise totale de l’eau et 47848 ha en maîtrise partielle de l’eau, sur financement du gouvernement du Mali, des partenaires techniques et financiers et du secteur privé.

En effet, l’ATI a pour mission principale, d’assurer une sécurité alimentaire durable avec réduction considérable du niveau de pauvreté de la population à travers la réalisation des aménagements hydro agricole. C’est donc l’un des  instruments privilégiés pour la promotion et le développement durable de l’Agriculture malienne à travers la réalisation et la gestion d’infrastructures et équipements ruraux. C’est pour cette raison que sous la houlette de son Président directeur général, Dr. Lamissa Diakité et de son staff que l’agence ne ménage aucun effort pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés. C’est ainsi que le PDG Diakité, chargé du programme gouvernemental des Nouveaux villages agricoles (NVA) nous accord une interview à bâtons rompus pour comprendre ledit programme.

Journal le Fondement : Qu’est-ce que le programme ‘’Nouveaux villages agricoles’’ ?

PDG de l’ATI, Dr. Lamissa Diakité :Les Nouveaux villages agricoles, c’est un nouveau concept qui est arrivé à partir du concept des acropoles qui étaient des centres de concertation économique qu’on appelle pôle de développement économique prévus dans le cadre du développement agricole au Mali. Donc il y a beaucoup d’études en cours pour pouvoir mettre en place certains acropoles notamment celui de l’Office du Niger, de Sélingué, de la zone sémi-urbaine de Bamako, de Baguinéda ainsi de suite. Ils sont un certain nombre dispersés dans le pays. Donc ce concept a évolué pour donner naissance à ce qu’on appelle les nouveaux villages agricoles (NVA).Le Programme est celui du Gouvernemental qui avait prévu d’installer 20 Nouveaux Villages Agricoles (NVA). Les NVA ce sont les exploitants agricoles qu’on installe dans les périmètres aménagés pour faciliter l’accès à leurs parcelles. On fait des constructions adaptées afin de leur faciliter le logement pour mieux  travailler. Cela prend le nom des villages agricoles mais en termes de décentralisation cela n’a rien à voir avec le système de village de ‘’Hango’’ qu’on trouve au niveau du Ministère de la Décentralisation.

JLF : Ce programme gouvernemental existe depuis quand ?

PDG LD :Nous avons été chargés par le Ministère de l’Agriculture depuis 2017 afin de suivre les activités techniquement, économiquement et financièrement de ces NVA. Il s’agit d’élaborer les documents de faisabilité des différents nouveaux villages agricoles, essayer de suivre les processus de mis en place de ces NVA. Donc le programme, est un programme gouvernemental, une initiative de son excellence le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita qui souhaite aménager suffisamment d’espace, installer suffisamment les jeunes exploitants diplômés ou pas, également des professionnels. Donc, il existe deux catégories qui doivent cohabiter dans le même espace. Il y a un espace qu’on réserve aux exploitations familiales et un autre qui est réservé aux exploitations industrielles, ce qui nous donne une agriculture de haute valeur ajoutée. Pas seulement le riz. Parce qu’au Mali on a habitude de voir du riz toujours dans les zones d’irrigation, mais nous avons d’autres cultures plus rentables que le riz. Nous laissons le libre choix à ces grands privés installés d’assurer l’exploitation de leurs parcelles. Les parcelles sont des blocsde 10ha, 15ha, 20ha jusqu’à 50 hectares voire 200 hectares que nous mettons en place et les Exploitations installées assurent l’exploitation. Doncavec l’effet d’entrainement, les petits exploitants qui sont installés (les jeunes diplômés  ou non) vont à l’école des grandes exploitations. Ils voient comment cela avance et comment ça évolue, pour ensuite s’en inspirer.

JLF : Le NVA est-il prêt pour accueillir les exploitants ?

PDG LD :Pour le NVA de M’Bewani l’agence aprévu aménager 3200 hectares pour l’agriculture irriguée et des aménagements agropastoraux, des aménagementsAquacolesce qui veut dire l’élevage et la pêche sont prévus dedans, également il est prévu aussi l’agroforesterie ; ce qui nous donne un complexe agro-industriel. Il y a l’électricité qui doit être installé dans la zone, ainsi les gens pourront faire la transformation des produits et faire la commercialisation sur place. Alors, il y a des avancées remarquables sur le programme. D’ailleurs, nous avons fait l’étude de faisabilités qui nous a amené à la conception d’une note technique qui a été partagée avec l’Unité de Partenariat Public-Privé (UPPP) créée et logée au niveau de la Primature. Donc cette unité, donne toujours son avis (technique, économique, juridique, organisationnel, etc.) et voit la configuration générale du projet. Elle a donné son avis technique sur le NVA de MBéwani  qui a été soumis au niveau du Ministère de l’Economie et des Finances pour  son avis sur la soutenabilité budgétaire. Si nous parlons du Partenariat Public-Privé,  cela veut dire qu’un  grand privé s’engage sur le dossier, il le réalise et les exploitants qui sont installés, procèdent au remboursement des coûts et au paiement des redevances de l’utilisation de l’eau. Mais il y a des infrastructures socio-économiques comme des centres de santé, des écoles, des centres de cultes, des cimetières qui peuvent être à la charge de l’Etat. Même si les investisseurs les réalisent, il faudrait que l’Etat les appuie en termes de remboursements. Nous en sommes à ce stade pour le moment et les discussions sont en cours pour faire avancer ce dossier.

JLF : Où en sommes-nous avec les cas de Sélingué et de Manantali de Bafoulabé ?

PDG LD :Pour le cas de Sélingué qui fait 700 hectares disponibilité en terre rizi-cultivable sur une  potentialité aménageable de près de 1010 ha, il est prévu les mêmes dispositions que celui de M’Bewani. Mais au niveau de Sélingué, nous avons ce que nous appelons une offre spontanée. C’est quoi, c’est le privé qui s’engage à faire l’étude de faisabilité qui les finances, l’agence sera là en tant que chargée de suivi du dossier, suit ainsi la qualité, technique du dossier et la qualité des travaux sur le terrain. Donc pour le moment, nous sommes en phase APD (Avant-Projet Détaillé) qui est presque disponible. Le troisième cas est celui de Manantali/Bafoulabé. Sa zone d’influence directe qui couvre, en plus de la superficie des deux sites (soit respectivement, 125 hectares pour Manatali et 250 hectares pour Mahinanding), aussi des sites d’emprunts et des bases vie. Cette zone correspond à l’espace où la végétation, les cours d’eau, les biens des habitants, etc., seront directement affectés par les travaux.

Nous sommes aussi au niveau de l’APD pour pouvoir faire avance le dossier. Après l’APD,  nous allons utiliser la même démarche avec l’UPPP pour la suite des dossiers.

JLF : Quelle leçon pouvez-vous tirer du PPP ?

PDG LD : La leçon que nous tirons de l’approche du partenariat public-privé est que c’est une bonne approche pour promouvoir l’investissement surtout en milieu agricole pour la mise en place des NVA. L’Etat  peut bien tirer beaucoup d’intérêts avec cette approche. Les grands privés qui ont les moyens s’engagent et réalisent les travaux en convention avec l’Etat et l’Etat s’engage à assurer la garantie ne serait-ce qu’au niveau du dossier et au niveau financier. Au niveau de l’ATI, nous sommes dans la dynamique de réaliser des périmètres expérimentaux dans les zones péri-urbaines des grandes villes.

JLF : Comment ça se passe pour la sélection des exploitants ?

PDG LD :Il y a des critères de sélection dont le premier est la volonté. Il faut que l’intéressé, ait la volonté de travailler la terre. Aussi sa compétence, s’il connait réellement ce qu’il va faire ; si non, est-ce qu’il a des conseillers qui peuvent l’appuyer. Il existe des gens, qui sont intéressés mais qui ne sont pas qualifiés pour le faire. Par conséquent, ils doivent être aidés par les spécialistes. C’est à ce moment qu’ils montent le dossier avec les spécialistes et nous vérifierons également. Le minimum hectare à attribuer est de 3 à 5 hectares.

JLF : Y a-t-il une contrepartie à payer par les exploitants ?

PDG LD :Ce qui est prévue est le remboursement des frais d’investissements, il y a la redevance qui va être payée (l’eau qui va être utilisée). Nous comptons utiliser le système de pompage, l’eau sera mesurée et il faut s’attendre à payer une facture en fonction de la  quantité utilisée. Donc sur cette facture qui va être payée il y a un pourcentage qui sera réservé à l’ATI environ 3,5% qui vont servir de remboursement à l’ATI.

JLF : Quelles sont les difficultés rencontrées pour la mise en œuvre du programme ?

PDG LD : Vous savez tout démarrage est difficile. Nous avons quelques difficultés en termes de compréhension du concept. Parce que dans le domaine agricole les Partenariats public-privé (PPP) ne sont pas fréquents. Nous sommes convaincus que l’approche est très bonne, elle peut être très rentable. Toutes les analyses économiques  et financières que nous avons faites, donnent des taux de rentabilité  substantiels de plus de 20% et les retombés sur l’économie nationale restent aussi intéressantes. Une des difficultés est la compréhension de la Loi qui régit le Partenariat-Public-Privé avec ses textes d’application. Si je devrais faire une recommandation, il s’agirait pour moi d’alléger cette Loi et la rendre plus accessible.

Réalisé par B. KONE

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