Ousmane Dramé : «Les autorités de la transition méritent le soutien du peuple et de la communauté internationale»

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L’Essor : Comment avez-vous accueilli la création de l’Alliance des États du Sahel (AES) regroupant le Mali, le Burkina Faso et le Niger ?

 

Ousmane Dramé : Je voudrais au nom des militantes et militants du Parti Actions Pour le Mali-PAM Faso Baara présenter nos condoléances les plus attristées aux familles endeuillées et à tout le peuple malien, prier pour le repos éternel de toutes les victimes civiles et militaires et souhaiterait prompt rétablissement aux blessés, suite aux différentes attaques terroristes que notre pays connu.  

En revenant à votre question, je dirais que notre parti accueille cette nouvelle avec un sentiment de satisfaction et de responsabilité. Car par ce geste, nos concitoyens les plus sceptiques comprendront que nos autorités actuelles (Mali-Burkina-Niger) ont bien compris les enjeux sécuritaires, économiques et politiques et se donnent les moyens juridiques afin de régler définitivement cette vente guerre qui nous a été imposée. et par la même occasion jeter les bases d’une fédération de nos États. Ce qui est le grand souhait de nos populations.

 

Nous espérons que la prochaine étape sera la création d’une monnaie unique des trois pays de l’AES et de la Guinée Conakry, la situation politique mondiale s’y prête. 

L’Essor : Quelle est votre lecture sur la situation sociopolitique du Mali ?

 

Ousmane Dramé : Nous traversons un moment très important pour l’avenir de notre pays. Le Mali a pris un tournant décisif avec les événements du 18 août 2020. De jeunes militaires patriotes ont pris le pouvoir pour nous permettre d’aller sur de nouvelles bases. Ce Mali nouveau ne se fera pas sans problèmes et sans douleur.

Il faut reconnaître que la situation est aujourd’hui un peu difficile pour les tenants du pouvoir et la population. C’est ensemble qu’on pourra surmonter cette crise multidimensionnelle qui a été imposée à notre pays. Parce que l’indépendance et la liberté ne s’offrent pas, mais elles s’acquièrent. La population a consenti d’énormes sacrifices pour que nous puissions atteindre l’objectif souhaité qui est la souveraineté.

Toutefois, il y a des difficultés, car 70 % de l’effort déployé par le gouvernement est dirigé vers la sécurité sans laquelle on ne peut rien faire. La population doit être encore plus résiliente et compréhensive. Je pense que les autorités de la Transition sont sur la bonne voie et méritent le soutien du peuple et de la communauté internationale. 

 

L’Essor : Quels sont les acquis et les insuffisances de la Transition qui a débuté, il y a un peu plus de trois ans ?

 

Ousmane Dramé : C’est après la rectification de la Transition en mai 2021 que le travail a véritablement commencé. Sur le plan sécuritaire, tout le monde voit ce qui se passe. Les dernières attaques ont prouvé à suffisance ce que les autorités disaient : l’Armée monte en puissance. Nous n’avions pas de vecteur aérien, de couverture en termes de renseignements. Le grand acquis de la Transition, c’est la reconstruction de nos forces armées et de sécurité.


En plus de la défense, la justice est un grand acquis. C’est sous la Transition qu’on a vu des généraux, des anciens ministres, des anciens présidents des institutions de la République devant des tribunaux pour rendre compte de leur gestion. Le fait simplement de les convoquer et les mettre sous mandat de dépôt brise la chaîne de la corruption, effraie ceux qui sont actuellement au pouvoir et ceux qui s’apprêtent à venir également. Sans oublier l’adoption d’une nouvelle Constitution qui a permis au Mali d’être dans la 4è République. Loin d’être parfait, il y a des avancées importantes dans cette Constitution.   

Les autres acquis ont trait à la relance économique avec la reprise du train voyageurs Bamako-Kayes ; la remise sur les rails de la Comatex ; l’ouverture prochaine des usines de filature, le projet de relance de l’UMPP, de nombreux centres de dialyse, le chantier de l’hôpital militaire, la création d’une centaine de commissariats, de camps militaires, de l’école de guerre…

À cela, s’ajoutent l’augmentation des salaires, le lancement du Centre de robotique, de louables initiatives dans l’intelligence artificielle, la valorisation des légitimités traditionnelles, etc. Sur le plan macroéconomique et la réduction du train de vie de l’ État, le pays à fait du progrès. 

Pour les difficultés, nous sommes confrontés à un problème énergétique. Le gouvernement a pris cette question à bras-le-corps en mettant tout en œuvre pour qu’à la fin de ce mois de septembre qu’il y ait moins de délestage. On ne peut pas parler de développement sans avoir une souveraineté énergétique.

L’autre tache noire, c’est la fermeture de plusieurs écoles à cause de l’insécurité. Cela pèse lourd sur la conscience des autorités de ne pas voir des enfants aller à l’école.

Ce problème trouvera sa solution très rapidement. Déjà, beaucoup d’écoles ont été rouvertes et d’autres sont en voie de l’être sur le territoire national. Des camps militaires sont en train d’être construits à Kita, Bougouni, Nioro… De même, la création prochaine d’une quarantaine de commissariats de police à l’intérieur du Mali pour rapprocher davantage la sécurité de la population et permettre le retour de l’administration et la couverture des besoins sociaux de base y comprennent la réouverture des écoles.   

 L’Essor : Quelle lecture faites-vous de la recrudescence des actes terroristes dans le Nord du pays ?

 

Ousmane Dramé : C’est avec une grande peine que nous avons appris l’attaque lâche du bateau Tombouctou ayant provoqué la mort de dizaines de citoyens par ceux-là mêmes qui affirment se battre pour le bonheur et sur le territoire qu’ils revendiquent. Ces attaques ne nous surprennent pas. Vous ne pouvez pas demander à Barkhane de partir et à la Minusma de pincer les bagages dans un délai de six mois, s’asseoir tranquillement et voir que rien ne va se passer. Après analyse de la courbe de l’insécurité dans notre pays les 10 dernières années, on constate qu’il y a généralement plus d’attaques et d’actes terroristes à la veille du renouvellement du mandat de la Minusma. 

 

Par ailleurs, nos frères égarés qui se trouvent au niveau de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) pensent qu’ils ont un droit de propriété sur le Mali. Ceux-ci voient au retrait de la Minusma la fin de leur hégémonie sur le nord de notre pays, parce que progressivement l’état du Mali va prendre possession des bases qui étaient occupées par la Mission onusienne. De facto, c’est la souveraineté du Mali qui sera rétablie sur toute l’étendue du territoire national. Il convient de rappeler que suivant sa Charte, l’ONU ne traite pas avec les mouvements armés.

Elle traite avec des états qui payent leurs cotisations. Ç’aurait été un précédent fâcheux si les Nations unies avaient décidé de rétrocéder les bases aux mouvements signataires. Nos « frères » doivent revenir à des meilleurs sentiments afin qu’on puisse continuer la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation. Malgré les attaques perpétrées ces derniers jours, le gouvernement n’a pas encore probablement mis fin aux négociations et à la mise en œuvre de l’Accord. Il ne faudrait pas qu’ils obligent le peuple malien à se soulever et à demander au gouvernement de mettre fin à l’Accord. 

L’Essor : Que pensez-vous du chronogramme du processus électoral ?

 

Ousmane Dramé : Il y a quelques semaines, le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation a demandé aux partis politiques et à la société civile pour se prononcer sur le calendrier électoral. Notre parti avait envoyé un document au département en charge de l’Administration territoriale en demandant clairement au peuple malien que cette Transition soit prolongée au moins d’un an.

Cela, pour poursuivre la mise en œuvre des réformes nécessaires au retour de l’administration et des équipements sociaux de base. Je ne doute pas de la capacité des hommes politiques à pouvoir faire le travail que les militaires sont en train d’effectuer. Mais, est-ce que la classe politique pourra s’entendre et créer une synergie d’action ? J’en doute.

Dès qu’un nouveau président sera élu, les syndicats reprendront la lutte, l’opposition va commencer à tirer sur tout et affaiblir le gouvernement. Déjà, on a une bonne fête de la communauté internationale sur le dos. J’imagine dans quelle impasse le nouveau régime se retrouvera pour gérer ces contradictions et en même temps faire face à la situation sécuritaire. Ce qui nous laissera peu de temps pour nous consacrer au développement.

C’est mieux de maintenir l’élan actuel pour permettre à la Transition de mener certaines réformes majeures, organisateur le retour de l’administration sur l’ensemble du territoire pour qu’on puisse organiser des élections crédibles, transparentes et sans contestation. Est-ce que l’état aura les moyens de sécuriser tous les candidats pour aller de Kayes à Kidal ? Ce n’est pas possible, il faut être réaliste. En tant que parti politique, nous voulons nous battre pour avoir le pouvoir, mais pas à tout prix. C’est le peuple qui décide de son sort et non la communauté internationale. 

Permettez-moi en guise de mot de fin de féliciter le président Assimi Goïta et toute son équipe pour l’annulation des festivités du 22 septembre en ce moment de deuil et de faire face aux besoins des familles endeuillées.

 

Je lance un appel pressant à la classe politique, à la société civile, aux légitimités traditionnelles et aux Maliens de la diaspora de se lever comme un seul homme et d’une voix pour dire à la Cedeao et à la communauté internationale que le peuple souverain du Mali autorise la transition à prendre le temps qu’il faut pour sécuriser notre pays et organiser des élections libres, transparentes et crédibles.

 

Qu’Allah SWT bénisse le Mali, inspire la Transition, veille sur le peuple malien et son Armée.

 

Propos recueillis par

Massa SIDIBE

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