Nouhoum Cissé alias Baniengo : “Je veux vivre éternellement. Pour ce faire, il faut que je fasse tache d’huile dans la culture malienne”

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Après Baniengo 1, Nouhoum Cissé, celui qui désire être un homme de culture contournable, revient à la charge avec Bagniengo 2 : “Le théâtre est une forme, une sensation et un contenu”.

Bamako Hebdo : De quoi parle la nouvelle pièce?

Nouhoum Cissé: La nouvelle pièce est intitulée “spécial cinquantenaire vu par Baniengo”. A travers cette pièce, j’ai voulu faire le cinquantenaire à ma manière, en fonction de ma vision des cinquante ans que j’ai vécus pleinement. Pendant ces cinquante ans, quatre présidents se sont succédé. Il s’agit de Modibo Kéita, Moussa Traoré, Alpha Oumar Konaré et Amadou Toumani Touré. J’ai regardé avec l’œil d’un artiste, d’un observateur, d’un citoyen qui a vécu ces quatre régimes. En fonction de ma petite connaissance en dramaturgie, j’ai voulu tout de suite retracer ces années vécues à travers la comédie.

Cette idée tient son originalité d’une citation de Amadou Konaté de l’ORTM actuellement en service à la Primature en qualité de chargé de communication. Selon lui, ” le théâtre est une forme, une sensation et un contenu”. C’est vrai que j’ai  rencontré beaucoup de difficultés, mais comme j’avais la volonté ardente de réussir, avec l’aide des amis, j’ai pu le faire dans de très bonnes conditions. Ce projet est axé sur deux points essentiels, notamment attirer l’attention de la population sur les méfaits sur la nature. C’est pourquoi, j’ai commencé par présenter un décor où la nature pleure suite à l’agression de l’homme sur elle, par la destruction de la nature on devient l’ennemi de nous-mêmes. C’est ainsi que le tableau du  théâtre commence par une sorte de fiction.

D’où vient l’origine du personnage Baniengo ?

Le personnage Baniengo a été secrété par Alioune Ifra N’diaye, d’où l’acteur. J’ai tenu ce rôle pour sensibiliser la population vers un changement de comportement. Au lieu de ça, la société prend ma propre personne comme le vrai Baniengo. C’est pourquoi, on me voit à travers la ville  comme un Bagniengo. D’ailleurs, ma rue a été surnommée depuis ce boom, “le Bagniengo carré “, ma famille est devenue “la famille Bagniengo”. Finalement, j’ai pris cette image, je l’ai transformée en une révolte, une aigreur. Donc, j’ai quitté la société pour me retirer dans la brousse auprès  de mon fétiche “Kougolokoro”.

J’ai ainsi demandé à “Kougolokoro” d’accepter que je vis avec lui car je ne veux plus être un être humain mais plutôt un chien. C’est cette révolte qui a attiré l’attention du griot Moussa Kouyaté qui a prié tout le monde pour qu’on lui accompagne par des bénédictions. Il a ainsi pris son courage à deux mains pour essayer de convaincre Bagniengo d’y revenir dans la société. Quand le Bagniengo a reçu la visite du griot, en train de jouer son n’goni, il n’était pas du tout content de le revoir. Ce qui n’a pas découragé le griot qui s’était imposé la sacerdotale mission des maitres de la parole. Il a tenu à convaincre Bagniengo à retourner parmi les hommes. Par finir, ce dernier va poser plusieurs conditions dont celle de demander à “Kougolokoro” : si tu insistes que je retourne, décapite tous les hommes. Assez difficile !  Le griot lui dit : en tant que vedette nationale, Bagniengo est resté dans l’ombre des festivités du cinquantenaire. “Il est temps que tu viennes nous montrer ce que tu sais faire”.Bagniengo a été convaincu, mais il dit que les cinquante ans ne sont que quatre jours et leur contenu. Le premier jour, c’est se connaitre soi-même qui correspond à la période du président Modibo Kéita, le deuxième jour est celui du président Moussa Traoré. C’est la période de la méfiance et de la peur. Le troisième jour, c’est l’heure du président Alpha Oumar Konaré. C’est la période de tout  ce qu’on peut faire. En effet, personne n’a peur de personne. Enfin, la quatrième période ou l’air ATT est le contraire du premier jour où il n’y a que l’ingérence, l’indignité, l’irrespect, le libertinage, l’effritement de l’autorité de l’Etat, la période du vol, de l’égocentrisme à tout point de vue avec l’éducation au rabais. Mais, Bagniengo a tenu à dire les biens- faits de ces quatre présidents. Malgré que j’ai été convaincu, j’ai refusé de retourner dans la société et le griot s’est dit armé de davantage de courage. Il se lassera à essayer de convaincre Bagniengo de réintégrer la société. C’est ainsi que la pièce prend fin mais c’est à suivre.

Quelle est la durée de la pièce ?

C’est un peu long, à peu près une heure et 45 minutes avec des fois des imprévus mais quand même, ce n’est pas du tout lassant. Les gens ont trouvé que c’est une très belle pièce.

Concrètement, qu’est-ce que vous avez voulu dire à travers cette pièce ?

Qu’on se pardonne mais il faut systématiquement refaire l’éducation malienne qui nécessite une refondation totale puisque le pays va à la dérive. Un pays est basé sur quatre éléments fondamentaux, notamment la santé, l’éducation, l’auto suffisance alimentaire et la sécurité intérieure.

Avec quels moyens avez-vous réalisé l’œuvre ?

Avec les maigres moyens du bord. Des camarades de promotion et le ministre de la Communication porte-parole du Gouvernement, Sidiki N’Fa Konaté. L’idée de faire Bagniengo 2 est venue de lui. Il m’a beaucoup aidé, jusqu’à ce qu’il soit ministre. Son remplaçant, le nouveau directeur de l’ORTM s’est carrément mis à ma disposition. Ma femme m’a énormément aidé aussi en prenant à sa charge le loyer et les frais de condiments  durant les huit mois de répétition et de tournage. La BMS a assuré la billetterie en intégralité.

Quelles sont les difficultés rencontrées  dans la réalisation de cette pièce ?

Mon Dieu, les difficultés  j’en ai eu suffisamment mais je les assume pleinement car un homme est fait pour souffrir. Je voyais derrière cette souffrance l’immortalité car je ne veux pas mourir. Je peux disparaître physiquement mais ne pas mourir. Au début j’ai été entravé à cause d’un problème de local pour la répétition. La maison situé à Kabala était loin du lieu de répétition en commune I, pendant les huit mois qu’a duré la répétition, s’était très lassant. Mais c’était un challenge qu’il fallait coûte que coûte relever.

Quelle carrière prévoyez-vous pour le spécial cinquantenaire ?

Je rêve de sa mise en image, elle est tellement importante cette pièce qu’il sera nécessaire de la mettre en archives.

Quand est-ce que le grand public pourrait le voir ?

Je suis toujours à la recherche de sponsor. Le sponsoring me pose problème. Si je l’ai même aujourd’hui, les téléspectateurs pourront me voir sur le petit écran.

Quels sont vos projets ?

J’ai beaucoup de projets mais je manque de sponsoring. Mes deux plus grands faits sont : “Le retour de Baniengo” et “Baniengo, grand prêcheur international”. Il suffit pour un partenaire de me demander de lui montrer de quoi je suis capable pour que les Maliens voient la pièce. Parce qu’il est très rare de voir un comédien complet, je parle sous la réserve de Kari Bogoba Coulibaly qui est un comédien à 120%. Dans ma nouvelle pièce, je chante, je joue le n’goni et je fais aussi la comédie.

Par ailleurs, il faut que je fasse tâche d’huile dans la culture malienne, pour mon immortalité. C’est pourquoi, après l’ENSUP, je suis parti apprendre le fétichisme, la géomancie, les arbres, le N’KO que j’enseigne.

Selon vous, quel doit être le rôle d’un comédien dans la société ?

Il doit être un éducateur au vrai sens du mot, un comédien doit être un homme de référence, une lumière dans l’ombre. Moi Bagniengo, je ne dois pas être vu en boîte de nuit, ni dans un bar, je ne dois pas voler, je ne dois pas être un vendeur de drogue. Je suis obligé d’être franc, réconciliateur, aimer tout le monde et être jovial…

Un message particulier à l’endroit de votre public ?

Je dis à tout le monde que je les aime sans limite. Je demande à tout le monde de s’unir. Les élections de 2012 s’annoncent sous diverses formes.

A cet effet, je demande aux uns et aux autres de garder leur calme pour sauver ce pays. Nous sommes en démocratie et nous sommes cités en exemple. Chacun doit aller voter librement et sans tension.

Fatoumata Mah Thiam KONE

 

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