L’Indicateur du Renouveau : Depuis le 1er septembre, la capitale algérienne est l’épicentre des discussions entre le Mali et les groupes armés. Quelle analyse en faites-vous ?
Nancoma Kéita : Je demande à tous les Maliens de faire des bénédictions pour que ces assises aboutissent à des résultats positifs, parce que le Mali est victime d’une incompréhension historique entre les ethnies. Les problèmes sont mal posés et ils ont été mal gérés. L’opportunité est là cette fois-ci parce que nous avons le soutien total de la sous-région et de la communauté internationale. C’est pourquoi nous n’avons pas le droit à perdre une minute.
Mais ce qui est déplorable c’est que nos frères touaregs sont en train de se constituer en foisonnement d’associations. Cela signifie qu’ils n’ont plus d’argument. Les intérêts ne sont plus les mêmes. Les jeux personnels priment maintenant. Ils doivent comprendre la logique du Mali et de la communauté internationale. C’est difficile de se mettre dans la rébellion pendant 5 ans et revenir en une semaine pour dire que j’ai eu tort. On doit leur faire cette concession, en profitant de cette situation de la plus belle manière.
L’Indicateur du Renouveau : Vous parlez de faiblesse du côté des groupes armés au même moment, ils sont en train de bloquer les initiatives du gouvernement à Alger, est-ce la réalité des choses ?
N. K. : C’est la même chose. S’ils avaient les mêmes intérêts, ils se seraient mis en bloc contre l’Etat. C’est-à-dire un groupe face à l’Etat. Mais puisqu’il y a mille groupes et demain il y aura encore. Alors en réalité, ils n’ont pas la même feuille de route.
L’Indicateur du Renouveau : Pourquoi l’Etat ne profite pas comme vous dites ?
N. K. : C’est au gouvernement de répondre à cette question.
L’Indicateur du Renouveau : Et la précision politique ?
N. K. : Je pense que le problème n’est pas du Nord. C’est un problème du Mali. Dans les groupes de négociations, il faut que toute la collectivité soit au centre des discussions. On aurait dû commencer par la mise en place d’une commission mixte composée de toutes les sensibilités du pays. Et que cette commission fasse le tour du pays.
Quand nos frères touaregs seront aujourd’hui à Kéniéba, ils comprendront qu’ils ne sont pas laissés pour compte. Depuis l’indépendance du Mali, tout l’or du pays vient dans cette zone. Mais à Kéniéba, il n’y a pas d’eau ni d’électricité, d’infrastructure encore moins les centres de santé répondant au mieux aux besoins de la population. L’environnement n’est pas protégé, mais ils n’ont jamais usé de la violence pour réclamer leur droit.
Les groupes armés n’ont pas tort parce qu’ils ne connaissent pas la réalité. Il faut prendre les communautés du Nord et du Sud, cela peut coûter cher, mais avec une mission conjointe de ces communautés on se rendra compte d’une solution durable et définitive. Cela va aussi créer un climat de confiance entre les populations. C’est parce que chacun est resté dans son isolement qu’il y a toujours incompréhension. Il n’y a vraiment pas d’ouverture. S’il y a une ouverture, ces gens n’allaient pas avoir le langage de la partition, mais plutôt de la réconciliation. Ils se retrouveront dans un état d’esprit de paix.
L’Indicateur du Renouveau : Monsieur le ministre, vos points de vue se ne retrouvent pas dans le processus enclenché par le gouvernement ?
N. K. : Non peut être l’Etat est lent parce qu’il s’agit d’un combat à long terme. Sinon on ne le retrouve pas dans les fora à dimension élargie organisée par le gouvernement et ses partenaires. Je pense une fois de plus qu’on est en conflit avec les groupes, mais il y a incompréhension au plan historique. Ils ne sont pas informés. Mais dans cette situation, il y a des gens qui bénéficient. Donc l’Etat est pris en otage et les groupes armés.
Propos recueillis Bréhima Sogoba
Mr N Keita votre analyse est on ne peut plus juste.
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