Le Pouce : L’Etat entend mobiliser 530 milliards au cours de cette année 2017 afin de financer des projets structurants et combler le déficit budgétaire. Une action qui ne peut réussir sans les banques. Comment avez-vous accueilli cette initiative Mr le président de l’APBEF ?
MOUSSA ALASSANE DIALLO : « Nous avons participé en compagnie du ministre de l’Economie et des Finances et de monsieur le directeur national du Trésor et de la Comptabilité publique, le mardi passé, à un déjeuner de travail sur le problème d’émission, des bons d’obligation du Trésor du Mali pour l’année 2017. Le montant global aussi bien de la mobilisation des bons, des obligations et des emprunts par appel public à l’épargne s’élève à 530 milliards de FCFA. Je pense que la réunion qu’on a eue s’inscrit dans le cadre des concertations et des échanges que l’Association des Banques et Etablissements Financiers entretien avec le ministère de l’Economie et des Finances. Aujourd’hui, nous avons un cadre de travail, de coopération, de collaboration, qui permet de partager avec le ministre de l’Economie et des Finances de toutes les questions liées à l’évolution économique financière, budgétaire et même fiscale de notre pays. Ce cadre de concertation et d’échanges est aussi mis à profit pour présenter le programme des émissions des bons, obligations, emprunts par appel public à l’épargne pour l’année 2017 dans notre pays. Au niveau de la profession, on se félicite d’abord de la disponibilité, de l’écoute du ministre de l’Economie et des Finances, avec lequel nous avons une excellente relation. Une relation de partenariat et de collaboration, basée sur l’écoute. C’est quelque chose qui est très importante. Ce partenariat permet d’aborder l’ensemble des préoccupations à la fois économiques financière et budgétaire de notre pays. Aujourd’hui, le cadre étant tracé, le partenariat qu’on a mis en place, va certainement permettre une concertation plus élargie entre la profession bancaire et la direction nationale du Trésor et de la comptabilité publique pour assurer la mise en œuvre de la mobilisation de ces 530 milliards de FCFA sur douze mois, donc en douze émissions. Ça veut dire que ce sont des émissions qui vont s’étaler sur toute l’année 2017. ».
Le Pouce : Pour le citoyen lambda, quel est le sens et la portée d’une telle action sur notre économie ?
MOUSSA ALASSANE DIALLO « Les émissions de bons, les émissions d’obligation, les emprunts par appel public à l’épargne sont des instruments de financement du budget de l’Etat. Et l’Etat est un agent économique. A ce titre, il est le premier agent économique du pays. L’Etat est aussi un client des banques. C’est à ce titre justement que, plus on assurera la mobilisation des ressources pour couvrir le financement du budget, mieux l’économie se portera, mieux la croissance sera au rendez-vous. Il faut assurer la couverture intégrale des besoins de financement prévu dans le budget 2017. C’est de ça qu’il s’agit. Autrement dit, il s’agit d’assurer le fonctionnement normal de notre économie et qui va se traduire par une augmentation du taux de croissance significative de notre pays ».
Le Pouce : Concrètement, comment cette couverture sera assurée par les Banques et les Etablissements financiers ?
MOUSSA ALASSANE DIALLO« La couverture de ces 530 milliards de FCFA pour les Banques, est essentielle. Les banques en seront aussi bénéficiaires. Elles profiteront aussi de beaucoup des retombées du financement et de la mobilisation de ces 530 milliards de FCFA. Autant les banques doivent se mobiliser pour apporter ce financement avec les autres investisseurs du Mali, autant les banques elles-mêmes sont en retour des bénéficiaires de la mobilisation de cette ressources. D’abord, en ce qui concerne l’apurement de la dette intérieure. Il faut dire qu’au cours de ces trois ou quatre dernières années, le ministère de l’Economie et des Finances a fait de gros efforts dans l’apurement de la dette intérieure qui est pratiquement à un niveau très faible, presque inexistant. Je pense qu’il faut le dire. Mais aussi, il y a aussi le financement des marchés publics qui sont financés par les banques. Cette initiative doit permettre aussi aux banques de s’impliquer davantage dans le financement des marchés qui sont obtenus par leurs clients auprès de l’Administration publique. Et enfin, la mobilisation de ces ressources va permettre d’apurer aussi les impayées d’un certain nombre de clients dans le livre du système bancaire. Les banques sont aussi vraiment gagnantes, car elles bénéficient fortement des retombées de ce financement. C’est pourquoi, au niveau de l’Association des Banques et Etablissements Financiers du Mali, nous avons aujourd’hui, un engagement de mobiliser au moins 90 % de 530 milliards de FCFA. Ce qui représente à peu près 477 milliards de FCFA.
Le Pouce : Comment ?
Moussa Alassane Diallo : Pour ce faire, nous avons mis un cadre de partenariat avec la direction nationale du trésor et de la comptabilité publique et de l’Association des Banques et Etablissements Financiers du Mali. Ça veut dire que, à chaque émission, il y a un cadre de concertation qui est créé. Nous allons nous retrouver avec la direction nationale du trésor et de la comptabilité publique pour définir le montant de la soumission étant connue déjà, organiser au niveau de l’ensemble du système bancaire, recueillir les intentions de participation de chaque banque. Une fois que cela est connu, par rapport au montant, cela peut nous permettre en ce moment de faire des ajustements, des arbitrages auprès de l’ensemble du système bancaire, de façon à ce que pour chaque émission, les banques maliennes puissent apporter au moins 90 % des mobilisations. Je pense qu’il s’agit d’un engagement, d’une détermination, de la ferme volonté du système bancaire malien à accompagner le ministère de l’Economie et des Finances dans le financement du budget 2017, dans le financement des projets structurants de notre pays. Il s’agit de contribuer à la lutte contre la pauvreté, à la création d’emploi dans notre pays, à une meilleure redistribution des revenus. Cela n’est pas sans difficultés. Nous ne sommes pas naïfs en nous engageant dans cet objectif avec le ministère de l’Economie et des Finances. Il y a énormément de difficultés aujourd’hui sur la place bancaire, sur le marché régional. Ce n’est pas parce qu’il y a des difficultés qu’il ne faut pas avoir des ambitions, de l’engagement, de la détermination et de la volonté à pouvoir mobiliser ces ressources-là. Je pense que le cadre de concertation qui est créé, va être un lieu idéal pour apporter les réponses mieux adaptées à la mobilisation de ces ressources-là. Ça c’est un. Nous avons conscience que nous sommes dans une intégration monétaire et économique au niveau de l’espace UEMOA. Les économies des pays de l’UEMOA sont en compétition. C’est ça la vérité. Etant donné que les économies sont en compétition, il appartient aussi à chaque banque et aux banques de chaque pays de soutenir l’économie nationale. Je n’ai pas peur de dire ça. Pour la mobilisation des bons et les émissions d’obligation, les emprunts par appel public à l’épargne du trésor et de l’Etat du Mali, je n’ai pas peur d’afficher cette volonté de la préférence nationale. Je l’affirme et je l’assume. C’est en cela que je vais mobiliser l’ensemble des banques pour que la priorité des priorités soit donnée à l’Etat du Mali dans la mobilisation de ces bons et d’émissions d’obligation ».
Le Pouce : Le marché sous régional est-il concerné ?
MOUSSA ALASSANE DIALLO : « Le marché sous régional est concerné. Aujourd’hui, il y a une agence qui a été créée par la banque centrale, qui s’appelle Agence ILOITITRE. Cette agence accompagne l’ensemble les Etats dans la mobilisation des ressources, dans le cadre des bons et les émissions d’obligation, les emprunts par appel public à l’épargne du trésor. Je pense que cette agence travaille à titre pour l’ensemble des huit pays membres de l’UEMOA. Il s’agit bien du marché de la sous-région qui est concerné. Le marché UEMOA. Mais chaque pays peut s’adresser à l’ensemble des acteurs financiers de l’espace UEMOA ».
Entretien réalisé par Tiémoko Traoré