Moctar Mariko, président de l’Amdh : «Les magistrats doivent ouvrir une information judiciaire pour savoir ce qui s’est passé avec Ag Wadoussène»

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Me Moctar Mariko
Me Moctar Mariko

La signature de l’Accord d’Alger est-elle synonyme d’impunité pour les présumés auteurs de crimes et violations des droits de l’Homme au nord du Mali. Non, répond Me Mariko, président de l’Association malienne de défense des droits de l’Homme (AMDH) dans une interview exclusive accordée hier au journal « Le Prétoire ». L’occasion pour l’avocat de donner le point de vue de son organisation sur la mort du terroriste wadoussène et la mobilisation de son organisation à œuvrer pour que justice soit rendue aux victimes. Selon lui, l’Accord d’Alger, au contraire de ce qui pensent à l’impunité, renforce la position des organisations comme l’AMDH qui, rappelons-le, s’est constituée partie civile au nom des victimes.

 

L’Accord signé entre les autorités publiques et la Coordination des Mouvements Armés du nord du Mali est perçu par beaucoup comme comportant des dispositions qui visent à absoudre des auteurs de crime et autres violations de droits de l’Homme.  Quelle appréciation peut en faire le Président de l’AMDH que vous êtes ?

De notre point de vue, à l’Amdh, on ne parle pas d’absolution des crimes dans l’Accord d’Alger. Car l’article 46 dudit Accord est clair par rapport aux crimes les plus graves, notamment les crimes contre l’humanité, les crimes de génocide et les violences sexuelles faites sur les femmes et les jeunes filles. Il n’y a donc pas d’absolution de ces crimes qui sont imprescriptibles et c’est inséré dans notre code de procédure pénale. A chaque fois que les infractions commises peuvent être qualifiées de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de crimes de génocide, il n’y a pas d’impunité pour les auteurs. Et çà, c’est depuis l’Accord de Ouagadougou. Cet accord avait même parlé de la création d’une commission internationale pour enquêter sur ces crimes. Donc, dire que ces auteurs vont être pardonnés et que cela ressort de l’Accord d’Alger, moi je ne le pense pas et ce n’est pas la lecture que j’en fais, dans la mesure où l’article 46 de cet Accord a permis à nous, organisation de défense des droits humains, de nous réjouir. Ce qui est d’ailleurs le sens de notre combat depuis le début de la crise. Je pense que l’Accord a répondu et surtout vous allez voir dans cet Accord qu’on parle de justice transitionnelle. Et même au niveau de ce mécanisme, il n’y a pas de pardon pour les crimes les plus graves. Le pardon peut être intervenu par rapport au vol de chèvres, les larcins et autres. Mais en ce qui concerne les violences faites aux femmes et les crimes les plus graves qu’on appelle les crimes imprescriptibles, les crimes internationaux, il n’y a pas de pardon et on ne peut pas parler d’impunité. L’Accord est très clair. Nous sommes là pour y veiller.

Concrètement, qu’est-ce qui reste à faire si on doit rendre justice aux nombreuses victimes ? Et quel rôle des organisations comme l’AMDH peuvent-elles jouer dans cela ?

D’abord, nous avons dit qu’il faudrait permettre à ces victimes d’accéder à la justice, d’accéder à la vérité et d’avoir une réparation digne de ce nom. Nous avons toujours dit que la paix ne peut pas se construire en oubliant les victimes. C’est elles qui ont souffert et c’est elles qui ont tout perdu tant sur le plan matériel que dignité. C’est eux qui ont tout perdu dans cette crise. Qu’il fallait d’abord, si l’Etat n’est pas en mesure de rendre cette justice tout de suite, mettre un fonds pour indemniser les victimes de tous genres. Ceux qui ont perdu leurs biens, ceux qui ont été atteints dans leur dignité, dans leur honneur, dans leur orgueil, qu’on crée un fonds pour ces personnes. Et si l’Etat n’a pas ces moyens, la réparation peut se faire symboliquement. Qu’on aille dans les régions, qu’on dresse des statuts par rapport à telle catégorie de victimes pour immortaliser ce qu’elles ont subi. Quand vous posez le problème à l’Etat, on vous répond en disant qu’on n’a pas les moyens. Ce n’est pas une question de moyen car il faudrait rendre à l’homme sa dignité. Si la personne victime a en tête que l’Etat se soucie de son sort, çà peut alléger les choses et çà peut nous amener vers la réconciliation rapidement. Mais en ce qui concerne les fonds d’indemnisation, l’Etat du Mali doit tout faire pour le mettre en œuvre. Il y a une loi squelettique qui a été votée en 2012. Cette loi ne résout absolument rien et à la date d’aujourd’hui, il n’y a pas de décret d’indemnisation. Aucun décret n’a été pris pour faire appliquer cette loi. Donc nous disons que l’Etat n’a pas cette volonté-là. On est en train de faire la part belle à certains acteurs de la crise. A l’Amdh, nous pensons qu’il fallait commencer par les victimes. Et là, nous allons nous battre jusqu’au dernier souffle si Dieu nous donne la baraka et la force, car la paix ne peut pas se construire en faisant des frustrés. Donc, il faudrait mettre l’accent d’abord sur l’accès à la justice, le droit à la vérité car il faudrait qu’on sache pourquoi ces gens sont venus nous attaquer. Il faut un début d’explication. Je ne peux pas comprendre que vous venez vous attaquer à ma fille et à ma femme impunément et les violer, sans savoir pourquoi ? Au Mali, c’est la toute première fois, en 2012, que les femmes et les filles ont été ciblées par les rebellions. Donc nous pensons qu’il faut mettre un frein à cela en permettant à ces victimes, notamment, d’aller à la justice, de connaitre la vérité et enfin réparer le préjudice subi. Cela peut nous amener vers la réconciliation. Cela peut donner aux victimes le sentiment d’être encore malien. Mais si on ne fait pas cela, c’est comme s’il y a des super maliens à qui on est en train de faire la part belle, pendant que d’autres sont laissés pour compte. C’est ce qu’il faut éviter dans une république et dans un Etat de droit. Voila pourquoi on se bat et on va se battre pour que cet objectif soit atteint.

Vous avez certainement appris la mort du terroriste Ag Wadoussène, actuellement utilisée comme une campagne d’apaisement des victimes. Qu’en dites-vous ?

Victoire pour les uns et les autres peut-être. Mais pour nous, défenseurs des droits humains, nous ne pouvons pas appeler cela une victoire. Nous voudrions que cet individu soit arrêté et jugé afin que les victimes puissent le regarder en face. Çà c’était notre souhait et c’est ce que nous avons toujours voulu. Si on traquait ces gens, on devait avoir l’amabilité de les prendre vivants. Quand vous entendez ce qu’on dit dans les medias : « Il a été traqué, on l’a suivi, il repartait à Kidal… ». Mais pourquoi ne pas le prendre vivant ? Moi je pense que sa mort nous handicape beaucoup, parce que nous ne saurons pas beaucoup sur les activités de ce monsieur et du groupe auquel il appartenait. Autrement dit, ses rapports avec Ansar Edinne ou Aqmi. S’il avait été appréhendé, on allait en savoir davantage. Il faut que les magistrats maliens ouvrent une information pour que nous ayons le cœur net sur ce que faisait le monsieur.

Depuis un certain temps, il y a une traque des chefs terroristes au nord du Mali. De façon générale, quel est le message que vous avez à lancer par rapport à cette situation? 

Nous pensons que c’est une situation qui peut aboutir à une rétention d’information. Parce qu’à chaque fois que ces gens sont anéantis, on ne peut plus rien en tirer. Mais si on pouvait associer l’armée malienne à ces traques, on allait savoir ce qui s’est réellement passé. Vous avez vu le cas des deux journalistes à Kidal, on est dans un flou total. Et c’est l’armée française (Serval ou Barkanne) qui a découvert les corps. Mais notre connaissance de la chose s’arrête là. Donc si on pouvait prendre ces gens vivants, vraiment, çà serait une très bonne chose. Qu’on n’essaye pas de les anéantir, mais qu’on essaye de changer de stratégie pour tenter de les appréhender afin de leur soutirer beaucoup d’informations. Sur cette base, des mesures idoines pourraient être prises pour endiguer ce mal.

Propos recueillis par Ibrahima M. GUEYE 

Commentaires via Facebook :

37 COMMENTAIRES

  1. Mr Mariko, tout ce que vous dites est vrai mais pour le moment le pays a juste besoin de la paix et non un autre conflit. En plus qui dit la paix, dit forcement le pardon. En signant cet accord de paix, on est obligé de pardonner.

  2. Vive l’accord de paix !!!

    Vive la réconciliation !!!

    Vive IBK !!!!

    Vive un Mali un et indivisible !!! 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆

  3. Si Dieu lui-même accepte de pardonner, pourquoi pas nous les humains ? Après tous ces rebelles sont frères, ce sont aussi des maliens. Donc cela ne sert à rien de se compliquer la tâche.

  4. IBK a trouvé ce pays dans un état critique. Forcément le pe de moyen qu’il reste est investie dans cette crise qui a cerné notre pays pendant des années.

  5. C’est évident, surtout en voyant chaque jour ces millions de nos francs que le gouvernement octroie à chaque fois pour ces différents réfugiés. Donc je crois qu’ils ont parfaitement raison, le fonds est très minime.

  6. J’avoue que je ne m’entendais pas à votre réaction en ce moment ci, du moment tut a été engendré depuis 3 ans maintenant. Vous auriez dû vous plaindre par rapport à l’arrivée des narcotrafiquants au Mali sous le régime précédent.

  7. Mais ce n’est pas difficile à comprendre que le gouvernement n’a pas les moyens. Ce régime est circonstanciel, certes il est là pour apporter une solution aux différents problèmes du pays mais précisément ceux du nord.

  8. Mon cher Moctar s’il y’a quelqu’un a jugé c’est tout d’abord ATT. Pendant qu’on y ait, comment qualifiez-vous sa prestige et noble générosité à recevoir les terroristes sur le sol malien ? Je serai curieux de connaitre la suite de cette affaire.

  9. C’est bien que vous aillez pensé à souligner tous ces points, mais vous oubliez que les droits de l’homme ont violé au Mali depuis que le président ATT a laissé rentrer les bandits armés sur notre territoire. Il est le premier qui doit être jugé avant tout autre personne.

  10. En tant que les garants des droits de l’homme, l’AMDH a tout à fait raison de sillonner ces cotés néfastes de l’accord. Mais à reconnaitre, que nos gouvernants ont agis dans une parfaite dynamique. Ce pays a trop souffert, donc on fera tout pour la paix.

  11. Trop de sang ont coulé et les dégâts sont inestimables. Je suis d’accord avec toi, sur le plan militaire, l’armée malienne ne pet jamais faire face à ces bandits armés. Ces individus malsains sont plus puissants que notre armée. Donc la meilleure solution est de coopérer avec eux pour le bonheur des maliens.

  12. La paix n’a pas de prix, le gouvernement malien a jugé nécessaire de fermer les yeux sur toutes ces crimes pour pourvoir amener une paix. Cette paix est la priorité, même s’il y’a des crimes qi ont été commis, force est de reconnaitre que sur le plan militaire on ne peut pas battre ces groupes belligérants.

  13. Mieux vaut la paix que la guerre, le pays a besoin de la paix, pas d’un nouveau conflit. Mettre le point sur tous les « i » risque de susciter un autre conflit plus grave que celui-ci.

  14. On n’a rien à reproché à nos dirigeants actuels, les anciens régimes ont enterré le pays vivant. En acceptant de recevoir les rebelles sur notre territoire après la guerre à Lybie, ATT a vendu les amés de son peuple. Quant à Alpha, il a privé le pays d’acheter des armes de combats pendant disant. Vingt ans en calvaire, comment le régime actuel peut faire face à ces rebelles dotés de tous les armes lourdes et efficaces ?

    • Vréééééééééééééément !

      Des fois ……..on se demande même s’il arrive à faire restituer une chèvre ….voire une épouse ……….à qui s’en prétend “propriétaire” !

      😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆 😆

  15. Bien vrai que la mort de Wadoussène est survenue lors d’une opération de la force Barkhane, mais à ne pas nier aussi le rôle de l’armée malienne dans les localités du nord. Nos militaires évoluent avec la France. Peut-être même que ce sont eux (les FAMA) qui ont tué ce dernier. 😛 😛 😛

  16. Merci Mr Mariko. L’accord d’Alger apportera la paix. Mais, jamais il ne sera la possibilité d’une quelconque impunité pour les criminels, en ce qui concerne les crimes commis. 😆 😆 😆

  17. Cette interview du président de l’AMDH doit servir de leçons à tous ceux qui pensent que la signature de l’accord est le début de l’impunité des présumés auteurs de crimes graves. 😥 😥 😆 😆 😆

  18. Une fois que la stabilité sera de retour, les rebelles criminels et tous ceux qui sont auteurs de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou de génocides auront à faire à la justice sans doute. Ils n’ont aucune porte de sortie. 😆 😆 😆

  19. Mr Moctar Mariko, c’est vrai ce que vous dites. Chaque fois que ces gens sont anéantis, on ne peut plus rien en tirer. Mais sachez que ces gens sont mieux au cimetière qu’en prison. Car tôt ou tard ils retrouveront la liberté. ❓ ❓ 😆 😆 😆

  20. Chacun a son tour chez le coiffeur. Hier était le tour des criminels, et aujourd’hui c’est celui de la justice et des victimes des crimes. Les victimes auront droit à des réparations aussi. 😛 😛 😛 😆 😆

  21. Les victimes des crimes seront dédommagées. Mais si l’Etat n’a pas les moyens de faire face à cette exigence, ils seront ultérieurement mis dans leurs droits. Quel qu’en soit faits, il n’y aura pas d’impunité. 😛 😛 😛 😀 😀 😀

  22. La justice a la bouche ouverte pour avaler les criminels aux cols blancs. Dans peu de temps, ils seront tous démasqués. Et Ils vont tous périr en prison. 😯 😯 😆 😆 😆

  23. Dès que l’accord rentrera totalement en vigueur, tous les responsables des crimes seront interpelés devant la CPI. Un criminel doit être mis hors état de nuire. 😆 😆

  24. Les crimes commis au nord du Mali sont les plus graves : crimes de guerre, crimes contre l’humanité, crimes de génocide crimes sexuels,… En aucun cas l’accord ne pourra amnistier les auteurs de ces violations du Droit de l’Homme. ❗ ❗ 😀 😀 😀

  25. Si les rebelles pensent que la signature de cet accord est synonyme d’impunité, ils se trompent. Aucun criminel n’échappera à la justice. Ils vont tous répondre à leurs actes. 😛 😛 😀 😀 😀

  26. La lumière sera faite sur tous les crimes commis au septentrion malien. Ces crimes sont imprescriptibles. Même après 20 ans, ces auteurs pourront être traduits devant la justice. 😛 😛 😛 😆 😆

  27. Il est dit dans l’article 46 qu’une commission internationale d’enquête sera constituée pour enquêter sur les crimes enfin que la justice soit faite. La mort de Wadoussène est salutaire. Car cela a permis de sauver la vie des innocents qu’il allait encore tuer. 😥 😥 😥 😥

  28. C’est tout à fait juste. La signature de l’accord n’est pas synonyme d’impunité. C’est le contraire. Celui-ci (accord) justifie la poursuite contre les auteurs des différents crimes commis. 😯 😯 🙄 🙄

  29. “Si on pouvait prendre ces gens vivant ” je suis mort de rire. Ce monsieur bien assis dans son bureau soit disant président de l’amdh, crois qu’il suffit de dire aux terroristes: “haut les mains monsieur, vous êtes en état d’arrestation. On doit vous ramener à Bamako. On vous interrogera et ensuite Ibk vous relâcheras”. 😀 😀 😀 😀 . Bon après tout ce monsieur doit justifier son salaire, donc ça ne tue pas de raconter des âneries.

  30. En tuant systématiquement ces assassins, on se met au même niveau qu’eux; des groupuscules spontanés sans foi ni loi, n’ayant que le crime pour idéologie.
    Il faut se comporter en état responsable qui appréhende de dangereux citoyens criminels pour les juger et punir avec fermeté s’ils sont coupables.
    C’est pourquoi l’état ne devait en aucun cas s’asseoir avec eux sur une table pour discuter. Car ils ont des comptes à rendre à la justice de leur pays. 😥

  31. Par rapport à WADOUSSENE Mr Mariko reprend exactement mes propos : n’avons nous pas besoin d’en savoir plus?

    Ca des esprits étroits comme AZAR ne peuvent pas comprendre.

    Si la passion gouverne la raison, là on va directement à sa perte.

    Je pense encore que ce Wadoussene aurait bien pu être pris vivant et cela nous aurait encore mieux servi.

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