Le département de la Femme, de l’Enfant et de la Famille, depuis quelques semaines, ne ménage aucun effort dans la sensibilisation et la formation pour réduire le cercle des victimes (femmes et hommes) de la violence basée sur le genre (VBG). Selon ce département, de 2012 à septembre 2020, les tendances des incidents de VBG n’ont pas cessé de progresser au fil des années, 25.183 cas ont été rapportés dont 4 411 entre janvier et septembre 2020. Aucune localité n’est épargnée, mais les zones d’insécurité sont les plus touchées. Parmi les types de VBG rapportés, les cas de violence sexuelle prédominent suivi des agressions physiques. Pour le 3ème trimestre2020 sur les 2 033 cas de VBG rapportés, 23% sont les viols, 20% les agressions physiques, 20% les violences Physiologiques, 15% agressions sexuelles, 12% de déni de ressources et 10% mariage précoce. Selon la patronne de ce département, Mme Bintou Founé Samaké, que Le Républicain a rencontrée, la pandémie à COVID 19 a impacté, favorisant les violences basées sur le genre dans le sens qu’il y a eu des restrictions, alors qu’il y a les besoins de déplacements. « Les mesures de confinement ont occasionné des violences exercées sur des femmes et des enfants, parce que nous ne sommes pas habitués au confinement ; et aussi il y des hommes qui ne sont pas habitués à rester sur place dans leurs familles. Donc la proximité a été un facteur favorisant la violence basée sur le genre ». Il y a des droits économiques qui ont été affectés par la covid-19, avec les restrictions, notamment avec les femmes qui vendent des produits dans les foires hebdomadaires. Une interview à lire !
Le Républicain : Qu’est ce que la violence basée sur le genre ?
Ministre Bintou Founé Samaké : la violence basée sur le genre, c’est toutes sortes de violences exercées sur une personne, qu’elle soit un homme ou une femme, du fait de son sexe. Ces violences peuvent être d’ordre moral, d’ordre physique, comme ça peut être d’ordre sexuel. Et ces violences peuvent avoir comme conséquence d’empêcher la personne à réaliser ses droits, ou de menacer cette personne pour qu’elle ne puisse pas réaliser ses droits. Donc, il y a le fait mais il y a aussi la menace. C’est une violence qui peut être orientée sur une femme ou sur un homme.
Pouvez-vous nous citer quelques manifestations de la violence basée sur le genre ?
Les violences conjugales exercées sur les femmes comme les coups et blessures, les violences émotionnelles psychologiques qu’on exerce sur les femmes au sein du foyer. Mais, il y a d’autres violences, on parle plus couramment de la violence exercée sur les femmes comme forme de violence basée sur le genre (VBG), parce que ce sont les violences les plus rapportées. Il y a des violences qui sont aussi exercées sur des hommes mais ces cas sont souvent rares et c’est peu rapporté.
Les violences exercées sur les hommes souvent sont plus psychologiques que physiques par exemple notre société a voulu que l’homme soit le chef de famille et à ce titre, il a les charges du ménage qui l’incombe. Mais pour faire face à cette obligation souvent, des violences sont exercées sur les hommes, c’est aussi des violences basées sur le genre. Par exemple il y a des hommes qui ont très peur de rentrer chez eux quand ils n’ont pas le prix des condiments, ils ont peur de quoi ? Ils ont peur de la violence morale qui va s’exercer sur eux quant il n’a pas le prix de condiments. Donc la VBG peut toucher les hommes ainsi que les femmes.
La pandémie de la covid-19 dans laquelle nous vivons depuis plus d’une année, peut-elle être un facteur favorisant les violences basées sur le genre ?
La pandémie à COVID 19 a impacté, dans le sens qu’il y a eu des restrictions, alors qu’il y a les besoins de déplacements. Les mesures de confinement ont fait que des violences ont été exercées sur des femmes et des enfants aussi parce que nous ne sommes pas habitués au confinement ; et aussi il y des hommes qui ne sont pas habitués à rester sur place dans leurs familles. Donc la proximité a été un facteur favorisant la violence basée sur le genre. Auparavant les hommes ne restaient pas à la maison. Ce n’est pas de gaité de cœur qu’ils restent ; c’est pour vous dire que quand vous êtes là malgré vous-mêmes, vos faits et gestes peuvent occasionner des violences.
Pouvez-vous nous parler des droits spécifiques des femmes, qui ont été affectés du fait de la pandémie à virus covid-19 ?
Il y a des droits économiques qui ont été affectés par la covid-19, avec les restrictions : notamment les femmes qui vendent des produits dans les foires hebdomadaires, qui venaient à des moments qui coïncidaient avec le couvre-feu. D’un, certaines de ces femmes ont perdu des produits parce qu’elles ont eu maille à partir avec la police qui surveillait les entrées et les sorties de Bamako. De deux, avec la fermeture des marchés, il y a des femmes, qui ont perdu des ressources, d’autres qui travaillent la nuit, par exemple les gargotiers. Avec le couvre-feu, elles ont perdu leurs ressources. En plus de ça, il faut se le dire, il y a des femmes travailleuses du sexe et qui fréquentaient les hôtels, les chambres de passe. Ces femmes là, avec la fermeture des hôtels, des chambres de passe, ont perdu leurs ressources. Mais en plus de ça aussi, il y a beaucoup de femmes qui travaillaient dans l’hôtellerie; celles qui sont employées ont perdu leurs emplois. Ensuite avec la fermeture des écoles, les femmes devraient quand même prendre beaucoup de dispositions pour pouvoir garder les enfants à domicile. Cela a augmenté leurs tâches, même celles qui sont dans des emplois rémunérés ont eu des difficultés quand les enfants ne vont pas à l’école. Soit il faut les amener quelques part qu’ils soient gardés, soit employer d’autres personnes pour venir rester avec ces enfants à la famille. Donc, la situation a impacté vraiment leurs économies, leurs ressources financières.
On constate le retour de la COVID-19 en force, quel appel avez-vous à lancer ?
L’appel que j’ai à lancer aux femmes c’est vraiment de respecter les mesures barrières, surtout le port du masque. Parce que, Covid-19 ou pas, actuellement, on est dans une période où l’harmattan souffle, il y a le vent froid, il y a la saison froide qui s’installe. Je lance surtout l’appel aux jeunes qui utilisent les motos, de se protéger la bouche et le nez pour ne pas être impacté ou ne pas attraper la Covid-19. Et aussi se protéger pour ne pas avoir à faire face à d’autres maladies respiratoires parce que nous savons qu’on a très peu de route dans la ville de Bamako, la poussière et le vent froid peuvent vraiment entrainer d’autres maladies respiratoires. Donc, il faut rendre obligatoire le port du masque, mais aussi, le lavage des mains. Le lavage des mains a beaucoup diminué les maladies diarrhéiques ; quant les enfants, les grandes personnes se lavent les mains, on fait moins face à ces maladies diarrhéiques ; on respecte la distance réglementaire, parce que nous sommes en face des virus dont on ignore où se trouve ce virus et comment on l’attrape. Donc, il faut que nous puissions respecter la distanciation réglementaire, mais aussi, renforcer l’information et la sensibilisation autour de cette maladie. Nous devons nous protéger. L’appel que j’ai à lancer, c’est le renforcement des mesures barrières pour que chacun de son coté puisse mettre en place un mécanisme afin d’éviter ce virus.
Avez-vous une recommandation pour une meilleure prise en compte des droits de la femme, des droits de l’homme dans la réponse à la covid ?
Pour une meilleure prise en compte, il faut que l’information puisse arriver aux femmes à tous les niveaux, surtout les femmes qui fréquentent le marché. Les femmes qui organisent les cérémonies, donc faite en sorte qu’au cours de ces cérémonies que le port du masque soit une obligation pour toutes les personnes qui viennent à ces cérémonies. Si nous respectons ces consignes, la covid-19 aura moins d’impact sur les droits des femmes. Si nous faisons en sorte que le port du masque rentre dans nos habitudes, dans les habitudes de ces femmes qui fréquentent ces regroupements, qui organisent les mariages, les baptêmes, les cérémonies de décès, nous aurons moins à faire face aux conséquences de la covid-19.
Propos recueillis par B Daou