Me Abdoulaye Sangaré, juriste : « C’est l’union sacrée qu’il faut pour libérer le Nord du Mali ».

0

Dans un entretien qu’il nous a accordé, Me Abdoulaye Sangaré dit Arkass, juriste de son état s’exprime sur la crise que le Mali vit actuellement. Le natif de Bougouni nous propose les solutions de sortie de crise. Interview !

Me Abdoulaye Sangaré dit Arkass

Relais: En tant qu’homme de droit, quelle analyse faites vous de cette crise au Mali?
A. S: la situation actuelle du pays est plus que préoccupante et nous sommes à un tournant décisif de la République.  A la suite du putsch militaire, le régime a été renversé, il y a eu de problèmes. Des groupes  anti et pro-putsch se sont organisés. C’est ce qui a engendré cette situation de quiproquo dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Si ce jour tout le monde avait condamné ce coup d’état, on serait tous ensemble pour sortir le Mali de tout ce problème. Mais, à partir du moment où le pays se trouve divisé entre pour et contre, les problèmes vont continuer. Or, chacun fait son petit calcul politicien. Ce sont des politiciens qui cherchent d’autres intérêts inavoués. Sinon un coup d’Etat est condamnable par conviction mais pas par principe. Il faut condamner le coup d’Etat car, l’autorité militaire doit rester à la solde de l’autorité civile c’est ça le principe de la République. Aujourd’hui, la situation s’est aggravée avec la menace qui pèse sur la République parce qu’on parle de l’application de la charia or, nous sommes une République laïque. A cela s’ajoute la crise alimentaire et la situation des déplacés.
Relais: Quelles solutions proposez vous en tant que juriste?
A S: De prime à bord, je suis malien avant d’être natif de Bougouni et je n’ai pas d’appartenance si ce n’est d’abord malien. Et j’appartiens à un regroupement politique qu’on appelle ADSC (Alliance démocratique pour la sortie de crise) qui regorge plusieurs partis y compris le CNAS Faso Héré dont je suis le secrétaire des questions juridiques et institutionnelles. Nous sommes entrain de réfléchir sur la crise. Nous avons fait un document contenant les solutions de sortie de crise d’une façon pérenne. Mais nous n’avons pas été écoutés et nous ne sommes pas découragés. Nous continuons à discuter et nous avons été clairs : La gestion de la crise n’est pas une préoccupation personnelle, ni une question d’intérêt personnel, ni un problème de poste. Pour nous c’est le Mali d’abord. Nous avons d’une part des points de vue communs avec le FDR avec qui, nous avons eu une série de réunion et nous nous sommes dit qu’il faut revenir aux idéaux du 26 mars1991. On semble oublier des aspects comme la corruption, le chômage endémique, la reconstruction du pays, la laïcisation et un Etat fort. Nous avons fait un mémorandum que nous avons publié dans les journaux  pour que les Maliens se retrouvent dans un congrès extraordinaire et cela nous rappelle nos deux grands dirigeants Modibo Keita et Fily Dabo qui ne se parlaient pas mais, se sont retrouvés pour faire le Mali d’aujourd’hui. Il faut que nous ayons des repères et notre jeunesse semble ne pas comprendre ce que cela veut dire et il faut qu’on se parle. On ne peut pas exclure une partie du peuple malien. Nous pouvons discuter des problèmes  réels de ce pays dans un canevas à l’issu duquel il y aura un gouvernement populaire et consensuel. Il faut que les maliens se retrouvent afin de dégager les éléments à partir d’une feuille de route. Il y a encore des gens qui tirent à boulots rouges sur le gouvernement de Cheick Modibo Diarra qui pourtant, fait de son mieux.
Relais : Concrètement  doit- on  parler de la légitimité ou la légalité de ce gouvernement mis en place après plusieurs tractations ?
AS : Vous savez, on est au stade des actes à poser, qu’on arrête des idioties stériles. Chaque malien doit apporter son soutien à ce gouvernement pour qu’il travaille. Il faut une concertation, ce gouvernement doit procéder à cela, je crois que Cheick Modibo l’a déjà compris depuis le 18 juin dernier. Il a rencontré les partis politiques même s’il n’a consulté aucun parti au moment de la mise en place de son équipe. En son temps, tout le monde a souhaité bon vent à ce gouvernement car, c’est le Mali qu’il faut sauver. Donc, si le gouvernement a des problèmes, il faut l’aider à surmonter ces problèmes.
Relais : A quoi peut-on s’attendre avec la Cédéao  dans cette crise ?
AS : La Cédéao  a toujours piétiné quand il s’agit de la gestion de la crise. Elle n’a même pas de moyens alors que dans le protocole de 99, elle est dans son rôle mais son agenda doit déjà la juger partout où elle a intervenu. Elle a échoué notamment au Liberia, et en  Sierra Léone où finalement c’est le bureau de l’ONU qui a géré. Si la Cédéao envoie ses forces, nos sœurs, nos femmes seront violées et même victimes du sida. C’est une façon d’apprécier comme le disent certains, mais on ne peut pas gérer seul. C’est  pourquoi, il faut qu’on discute et qu’on se comprenne entre nous-mêmes. Sinon la Cédéao sera appelée, elle fera appel à l’ONU.
Il faut qu’au niveau des instances dirigeantes qu’on ait des discussions, même quand la France a été occupée, elle a fait appel aux alliés. Et partout où la communauté internationale  a intervenu, les séquelles sont toujours restées. En cela, il n’y a pas de jurisprudence en la matière lorsqu’il s’agit des forces d’interposition (Cédéao et  communauté internationale) et le malien de nature ne l’accepte pas, car il le considère comme une agression. Nous devons débattre  en pesant le pour et le contre. C’est  vraiment responsable et au sortir de cette crise qu’on ne laisse plus jamais passer les choses comme on l’entend chez nous le « Moussalaka » qu’on travaillera avec la loi et les textes.
Relais : Pourquoi les textes ne sont pas appliqués au Mali ?
A S : les textes sont là, par exemple les textes régissant l’intégration à la fonction publique. Mais aujourd’hui on parle de faux diplômes,  même des ministres ont des faux diplômes en plus des contractuels dans la fonction publique. Pour être recruté comme magistrat, il faut payer 5millions, ce n’est plus sérieux. Donc, il faut vérifier tout.
Relais : Que pensez-vous de la souveraineté du Mali aujourd’hui sur la scène internationale?
A S : La souveraineté n’est autre que de prendre ses propres décisions. Si les irrédentistes demandent leur indépendance, nous n’allons jamais renoncer à notre territoire, nul sacrifice n’est de trop. Mais dans l’exclusion, le Mali ne sera pas construit. C’est vrai qu’il y a des antis et pro putschistes mais laissons tout ça, et mettons nous d’accord et l’on va régler tous ces problèmes réels.
Relais : Vous êtes juriste et également homme politique, si on vous demande votre avis sur la dissolution de ce gouvernement ?
A S : Pourquoi demander la dissolution de ce gouvernement ? Chacun a son avis là-dessus et je respecte l’avis des autres. Mais si ça va permettre aux Maliens de se retrouver, il  faut le faire car  c’est l’union sacrée qu’il faut pour libérer le Nord du Mali.
Relais : Peut-on empêcher des députés d’accéder au siège du Parlement ?
AS : ce problème est un problème d’organisation puisque vous savez que c’est dans une position de trouble que cela s’est produit. Cela peut arriver mais, il faut savoir garder raison. si on ne peut pas  interdire le droit de manifester, on ne doit jamais tomber dans la violence.
Relais : Et votre mot de la fin ?
A S : Seule l’union fait la force comme on le dit en bambara « un seul doigt ne peut pas ramasser la pierre »,il faut qu’on aille dans le même sens que ce qu’a été proposé par l’ADPS qui prône un congrès extraordinaire pour expliquer au peuple malien et la jeunesse qu’il s’agit de s’unir et de se comprendre pour sauver le Mali qui est au dessus de tous.
Propos recueillis par :
Abdoulaye Diarra

Commentaires via Facebook :