A cause de l’action de l’homme et des problèmes environnementaux, la situation de la faune malienne est alarmante. Mais pourtant, le coordinateur national du projet Pnud/Fem/Grm « Extension et renforcement du système des aires protégées au Mali »(Ersap), Mamadou Salif Koné garde toujours espoir. Dans une interview qu’il nous a accordée, il explique explicitement les solutions à entreprendre pour sauver la faune et ses habitats. Suivez son regard !
Le matin : aujourd’hui, où en sommes-nous sur la gestion de la faune au Mali?
Salif Koné : Merci beaucoup pour cette question, dans le cadre du projet
Ersap, nous avons à rénover la faune et ses habitats. C’est dans ce cadre que nous avons initié une concertation nationale à Bamako. Auparavant, nous avons organisé deux (2) ateliers dont un à Kita qui a regroupé les régions de Kayes, Koulikoro, sikasso et le District de Bamako.
La deuxième réunion a eu lieu à Mopti qui a regroupé les régions de Ségou, Mopti, Gao, Tombouctou et Kidal, pour avoir les avis, les recommandations des différents invités que représentent la société civile, les organisations des chasseurs, les services techniques de l’Etat. L’objectif, c’est d’avoir un avis partagé sur certaines insuffisances qui ont été constatées dans la mise en œuvre de la loi 095031 gérant la faune et ses habitats. Il s’agit pour nous de partager avec l’ensemble des représentants des services techniques de l’Etat, la société civile, les organisations non-gouvernementales (Ong) pour avoir des textes consensuels afin de lever certains goulots d’étranglement qui empêchent le développement de la faune au Mali.
Combien de forêts classées compte-t-on au Mali ? Et quelles sont les zones dans lesquelles le capital faunique est très important ?
Présentement, nous avons aujourd’hui au Mali aux alentours de 26 aires protégées qui sont constituées par des parcs nationaux, un sanctuaire de Chimpanzés, les réserves de faune, les zones d’intérêts cynégétiques.
Compte tenu des problèmes de changement climatique de certaines régions, le capital faunique n’est pas beaucoup dense dans la région sud-ouest (c’est-à-dire le sud de la région de Kayes, le sud de la région de sikasso) c’est là qu’il y a de potentiel faunique très important. Mais, n’oublions pas aussi que dans le nord, dans le Talèmestina, par exemple, il y a d’autres espèces de faune qui existent. Dans la zone de Douentza, Gourma Rharous, il y a des éléphants. Dans la zone de Lopène-Bb, il y a d’autres espèces emblématiques de faune. Mais, présentement avec tous les problèmes environnementaux, l’exploitation abusive par les communautés, l’exploitation abusive des bois par certains exploitants véreux, la faune est pratiquement dans son dernier retranchement dans le sud-ouest du Mali, notamment dans les cercles de Kita, Bafoulabé et Kégniéba.
Justement sur ce point, quelles sont les menaces qui entravent la protection de la faune ?
Parlons précisément des trois cercles que sont : Kita, Bafoulabé, Kégniéba, les problèmes qui entravent le développement de la faune sont nombreux.
Le premier problème est l’occupation minière, par rapport aux parcs et aux réserves de faune que nous gérons, il y a des permis miniers qui sont octroyés par l’Etat à des opérateurs privés.
Particulièrement, tous les couloirs de migration de la faune du Sénégal, de la Guinée vers le Mali, sont obstrués par les orpailleurs traditionnels par les sociétés minières. Le deuxième facteur de menace de la faune, c’est la dégradation de l’habitat suite au grand déboisement pour la recherche de terres cultivables, notamment pour le coton, l’arachide…
Des grandes superficies sont déboisées pour le bois d’œuvre, parce qu’il y a des exploitants qui viennent couper de grands pieds de calcédras, de veines. Nous avons aussi le perpétuel problème de feu de brousse qui détruit toutes les herbes. Toute chose qui nuit certains espaces et habitats où la faune doit se réfugier et se nourrir.
Quelles sont les mesures urgentes à prendre pour protéger la faune ?
La situation est alarmante, mais nous pouvons la renverser. Il faut que chacun soit informé de la situation présente sur le terrain. Informer et éduquer, pour changer le comportement de tous les jours. On ne peut pas continuer toujours à déboiser, sans pourtant reboiser. C’est vrai que les communautés sont pauvres. Et c’est la raison principale qu’elles avancent toujours pour justifier le déboisement entrepris. Il s’agit pour l’Etat, pour les projets d’accompagnement, de créer d’autres activités alternatives de revenus pour que les gens se détournent de ces forêts, de ces aires protégées, pour avoir d’autres revenus alternatifs et abandonner l’exploitation abusive des bois de la forêt. il s’agit aussi de développer certaines activités qui permettent de faire revivre le sol. Il s’agit de faire entre autres : des activités de gestion durable des terres, des travaux de reboisement et de lutte anti-rosier et il faut l’encadrement technique de l’Etat pour pouvoir accompagner ces communautés. C’est l’ensemble de ces solutions imaginées, combinées avec l’accompagnement des collectivités de l’Etat, des services techniques, des partenaires au développement qui peuvent nous faire sortir de la situation présente.
Réalisée par Aliou Touré