M. Mahamadou Diaby est le Gouverneur de la Région de Sikasso ; une des régions considérées comme le grenier du Mali. L’agriculture et le commerce sont les activités principales, mais en marge de cela, d’autres secteurs rapportent beaucoup comme l’agropastorale etc. En ces derniers temps, les choses n’évoluent pas à hauteur de souhait dans la zone pour des raisons multiples. Nous l’avons approché, puisque premier responsable de l’Etat, pour en savoir davantage. Des sujets soulevés, la régionalisation est cruciale. Une nouvelle politique de l’Etat qui responsabilisera bientôt les régions en matière de gestion tant des ressources humaines et financières. Il nous en dit plus dans cette interview. Suivez son regard !
Le Pays : Bonjour. Pouvez-vous vous présentez ?
Je m’appelle Mahamadou Diaby, Gouverneur de la Région de Sikasso.
Nous savons que Sikasso est l’un des poumons économiques du Mali. L’agriculture mais aussi le commerce sont les principales activités. Comment se sentent-elles aujourd’hui ?
Mahamadou Diaby : Sikasso c’est une zone d’abord agricole, agropastorale et depuis quelques années nous commençons à être une région d’élevages par la force des choses avec l’insécurité au nord et même les sècheresses dans ces régions ; nous avions beaucoup de cheptels. Mais Sikasso, c’est vrai, c’est une zone d’agriculture. Comme vous le savez depuis l’avènement de la CMDT, elle a beaucoup appuyé l’agriculture dans la région de Sikasso. Au jour d’aujourd’hui c’est vrai qu’en matière de céréales, nous sommes excédentaires ; c’est-à-dire nous produisons plus que nous ne consommons. Ce surplus, est consommé dans le reste du pays et même dans les pays voisins. Pour la campagne passée, nous remercions le Bon Dieu, nous avions fait une très bonne récolte ; une récolte excédentaire que nous cherchions surtout à bien gérer maintenant pour que la région ne soit pas affamée , qu’on n’évacue pas tout, mais qu’on puisse bien garder pour que les producteurs puissent avoir un peu de prix. Par rapport à l’agriculture, Sikasso est aujourd’hui en bonne position.
La famine dont vous parler, est ce que la Région en a connu dans le temps ?
Jusqu’à maintenant, nous, on n’a pas de famine. Mais si on n’est pas prudent, on peut brader la production et finalement avoir les mains vides. C’est-à-dire vendre à vil prix et après aller au marcher pour racheter ; donc il faut éviter cela. C’est vrai qu’aujourd’hui on appuie les paysans dans beaucoup de domaines, ils ont aussi des organisations professionnelles qui les encadrent. Alors avec la cotonculture, on parvient à faire un peu d’économie en matière d’argent pour préserver les céréales, mais comme je l’ai dit il faut toujours conseiller ; encadrer ces paysans, le monde rural d’une manière générale pour que les commerçants ne viennent pas tout acheter et laisser les paysans mains vides ; sinon aujourd’hui on ne peut pas parler de famine dans la région de Sikasso.
La crise ivoirienne est passée par la troisième région. Son impact –négatif- n’est pas aussi à démontrer, puisque la zone est aussi commerciale. Comment les activités évoluent ici après la crise ?
C’est vrai que la crise ivoirienne est passée par là. Pour celui qui a vu Sikasso avant et aujourd’hui, c’est vrai que ce n’est plus la même chose, les choses ont beaucoup changé. Les routes de Zégoua, Hérèmakono etc. en tout cas (avant) il y avait beaucoup de circulations surtout sur l’axe Zégoua, avec la crise, les transporteurs ont pris d’autres destinations entre temps. Bon après la crise beaucoup sont revenus, mais ce n’est toujours pas comme au paravent. Ça beaucoup joué sur le Pays en Général mais Sikasso en particulier parce que c’est une Région de transport aussi. Alors s’il y a des problèmes en matière de transport, s’il y a des diminutions d’échange, la Région naturellement va ressentir. Pour qui connaissait Zégoua et même Sikasso avant la crise, les activités ont repris mais on n’a pas atteint la situation d’avant crise, mais les choses s’améliorent très sincèrement et nous-mêmes, avec les collectivités, nous sommes à pied d’œuvre pour améliorer les échanges avec nos voisins. On a fait beaucoup de rencontres et à Pogo et à Banfora… la dernière rencontre c’était à Sikasso pour voir un peu comment faciliter ces échanges entre les trois Etats et minimiser les tracasseries routières et développer ces échanges de part et d’autres. Donc je pense que le pays est aussi conscient de cette situation pour ne même pas dire la sous-région parce que nous avions même reçu une mission de la CEDEAO qui est en train de sillonner comment faire les postes juxtaposés pour faciliter les échanges et aussi le port de Sanpedro qu’ils veulent que le Mali puisse accéder. Donc je pense que la situation s’améliore au fur et à mesure.
La crise du Nord. A-t-elle eu un impact sur votre Région ?
Oui la crise du nord, c’est vrai que c’est une crise malienne d’abord. Pas verbalement seulement mais à travers les effets, Sikasso a eu son lot de déplacés ici, près de 13.000 ; bon Dieu merci ils ont été bien accueillis et la plus part sont déjà rentrés parce que c’était surtout des gens de Tombouctou et de Gao qui sont venus ici. Mais, même si nous ne sommes pas les régions sur la ligne de front, nous avons senti les conséquences parce que quand il y a la crise, les partenaires suspendent les activités, surtout avec le problème d’insécurité beaucoup de partenaires ont peur de venir. Donc d’une manière générale sur l’ensemble du pays ça avait un peu joué et la région a ressenti en sa manière.
Votre avis au sujet de la Régionalisation
Cette régionalisation c’est par rapport à la politique nationale de la décentralisation. Comme vous le savez, après les accords de Ouagadougou, avec l’arrivée de la nouvelle équipe gouvernementale, on a eu les Etats Généraux de la Décentralisation. Donc on a pensé qu’avec la décentralisation approfondie, ça peut nous aider à résoudre les problèmes, surtout la crise des régions du Nord. Donc lors de ces Etats, le Mali a opté pour une politique de Régionalisation. Ça veut dire qu’on va donner un peu d’envergure aux régions, on va les responsabiliser davantage ; leur donner plus de moyens pour faire face au développement régional et local. Nous pensons que c’est une bonne chose puisque en matière de décentralisation, c’est une question de responsabilisation. C’est aussi une question de transfert de compétences et de ressources ; je veux dire les ressources humaines mais aussi les ressources financières. Donc nous pensons qu’avec la régionalisation, l’Etat et ses partenaires mettront beaucoup de moyens à la disposition des régions pour exécuter des projets précis dans le cadre de ce qu’on appelle les contrats plans Etat-Région. Cela avancera le développement ; nous avons vu qu’avant ça, les collectivités ont fait beaucoup de réalisations avec les financements ANICT et les ONG partenaires. En régionalisant, c’est-à-dire en augmentant aussi la contribution de l’Etat pour le financement des activités de ces collectivités, l’Etat ne pourra que s’en sortir et mieux accélérer le développement.
Qu’est-ce qui vous tient le plus à cœur aujourd’hui pour le développement de la Région de Sikasso ?
Sikasso est d’abord une région d’agriculture. Notre défi est de pouvoir continuer à moderniser cette agriculture avec les acteurs, les organisations professionnelles et le concours de l’Etat. L’Etat fait beaucoup avec la subvention de l’engrais, avec les pluies provoquées qui nous ont beaucoup rapportées l’an passé ; notre grand souhait est qu’on puisse continuer avec ces pluies provoquées puisque Sikasso fait partie des régions considérées réellement comme grenier du pays. Si nous parvenons à produire comme nous le souhaitons, surtout avec cette nouvelle politique en vue qui accompagnera le travail 12/12 mois des agriculteurs, le pari sera gagné.
Boubacar Yalkoué, envoyé spécial à Sikasso