Le 18 juin, Bamako et les rebelles touaregs ont conclu un accord qui prévoit notamment un cessez-le-feu et le retour de l’armée malienne à Kidal.

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Le président  Ibrahim Boubacar Keïta
Le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta (c) Afp

Le problème du Nord est-il résolu ?

Ce qui est sûr, c’est que la souveraineté malienne va de nouveau pouvoir s’exercer sur l’ensemble du territoire. C’était fondamental. D’ailleurs, j’avais dit que je n’irais pas aux élections si la ville demeurait sous le contrôle du MNLA [Mouvement national de libération de l’Azawad]. Mais ce n’est qu’un accord préliminaire, et il appartiendra aux autorités élues de trouver une solution globale. Il faudra notamment ouvrir un dialogue inclusif pour que les Maliens puissent se réconcilier avec eux-mêmes.

 

Comment résoudre durablement le problème du Nord-Mali ?

Nous ne comprenons pas que, de l’extérieur, on veuille faire du Nord un problème supérieur à tous les autres. Il faut que la communauté internationale cesse de donner à penser qu’il y aurait, de notre part, une volonté d’en faire un lieu de violation des droits de l’homme. Pourquoi la France, par exemple, a-t-elle donné l’impression de bloquer la situation en faveur du MNLA ? D’empêcher d’achever la réunification du Mali ? Je ne sais pas, mais j’en suis malheureux, moi dont l’arrière-grand-père est mort pour la France, à Verdun.

 

 

 

 

 

 

 

Nous savons et vous le savez aussi, même si vous faites semblant de l’ignorer, que la population dans sa grande majorité n’approuve pas les décisions du gouvernement concernant la libération des prisonniers rebelles et la levée de mandats d’arrêt.

 Oui je sais bien. Nous avons eu les mains liées par les accords de Ouaga signés, sous l’égide de la communauté internationale et de l’ONU, par l’Etat malien sous la transition dirigée par le Professeur Dioncounda Traoré et par le MNLA. L’Etat étant une continuité, le Mali ne pouvait se dédire. Car dans le cas contraire, les nouvelles autorités maliennes, et votre serviteur par-dessus le marché, seraient apparues peu crédibles, donc indignes de confiance aux yeux du monde entier. Tout le monde nous aurait tourné le dos. Ainsi le remède aurait été pire que la mal.*

Monsieur le président, quelle est la situation à Kidal ?

C’est un peu compliqué, mais je suis confiant. Les locaux du gouvernorat et de l’Ortm ont été libérés, la présence de l’armée a été renforcée dans la ville. Soyez-sûr, il n’y aura pas d’autonomie encore moins d’indépendance. Kidal est une région de Mali et elle restera malienne.

 

 

 

Nos commentaires:

« Nous avons eu les mains liées par les accords de Ouaga… le Mali ne pouvait se dédire… C’est un peu compliqué… ».  

Aveux d’impuissance ? Mais qui avait dit que c’était simple et prétendu que ses prédécesseurs ont trahi ou avaient le choix ? 

 

 

Ses relations avec les putschistes

 Vous avez souvent été accusé d’être proche des putschistes du 21 mars.

C’est parce qu’après le coup d’État le capitaine Sanogo m’a appelé. Il avait déjà reçu la plupart des leaders politiques et il m’a prié de venir le voir à Kati. C’était en fin de journée, le 25 mars 2012. J’y suis allé et j’ai été reçu avec beaucoup de courtoisie. Je lui ai dit ce que je pensais. Je lui ai dit qu’il n’avait pas choisi la bonne méthode et qu’aucun pays au monde n’approuverait un putsch.

 

Pour l’Union africaine, c’est un crime imprescriptible et je suis du même avis. Je lui ai dit aussi qu’il fallait qu’il se plie dans les meilleurs délais à ce que la communauté internationale et la Cedeao [Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest] lui diraient, faute de quoi, dès que les premières sanctions tomberaient, ceux qui l’avaient applaudi allaient se retourner contre lui. Je lui ai rappelé enfin que nous étions dans un temps de justice universelle… Ce jour-là, j’étais entouré d’hommes en armes, mais j’ai dit tout cela à Sanogo. Tous ceux qui sont allés à Kati n’en ont pas fait autant.

 

Reste que vous n’avez pas été inquiété quand d’autres, comme Soumaïla Cissé ou Modibo Sidibé, ont été malmenés, arrêtés…

Parce qu’il n’y avait pas lieu. Pour le reste, je ne suis pas homme à faire la cour aux putschistes, et les militaires le savent.

 

Mais vous les ménagez…

Je ne les ménage pas, je les comprends.

 

 

 

À Bamako, certains murmurent que vous étiez au courant de ce qui se tramait avant le 21 mars…

C’est faux, et je vous le dis en homme d’honneur, les yeux dans les yeux : Sanogo, je ne l’avais jamais vu avant ce 25 mars. C’est parce que j’ai pris mes distances avec le FDR [Front du refus, antiputsch] que j’ai été soupçonné. Si on ajoute à cela le fait que je n’ai subi aucun dommage et que je n’ai pas eu à fuir le pays…

 

 

 

Mais certains de vos militants sont à l’époque allés manifester avec la Copam, la Coordination des organisations patriotiques du Mali, plutôt favorable aux putschistes…

Oui, et je les ai désavoués. Mais cela a écorné mon image. J’ai beau me laver dans du lait de chamelle chaud, comme on dit chez nous, je n’en sors jamais blanchi.

 

 

Pensez-vous que l’on exagère l’influence de la junte ?

Oui. Surtout depuis le retour de Dioncounda Traoré [en juillet 2012], qui a repris de l’autorité, et le début de l’opération Serval, en janvier.

 

 

Que ferez-vous du capitaine Sanogo si vous êtes élu ?

En tant qu’officier de l’armée malienne, il obéira au chef suprême des armées que je serai.

 

 

Dans une interview à l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, le même Sanogo a dit qu’il ne resterait hors jeu que si les élections étaient bien menées. Représente-t-il encore une menace ?

Je ne crois pas. Si je suis élu, il n’y aura pas deux capitaines dans mon bateau. Je n’ai pas vocation à être un président fantoche.

 

Le voyez-vous régulièrement ?

Je l’ai vu à trois reprises, en tout et pour tout, et la dernière fois remonte à presque un an.

 

 

Nous avions convenu avec le Président Dioncounda qu’il était nécessaire d’organiser un conclave. Quand les militaires putschistes m’ont invité à Kati pour que je leur donne des conseils, je leur ai dit : je suis aujourd’hui parmi vous, sachez que vous ne m’impressionnez point. Je ne peux pas vous donner des conseils. 

 

 

 

 Par contre, ce que je puis vous dire, votre solution n’est pas heureuse et elle ne peut point prospérer. Il n’y a aucun chef d’Etat dans ce monde qui pourra vous dire qu’il est d’accord avec vous.

 

 

 Donc, puisque vous me l’avez demandé, je puis vous dire que ce qui est bien pour vous et pour le Mali, c’est de faire revenir dans les meilleurs délais l’ordre constitutionnel. Vous n’avez pas le choix.

 

 

Aujourd’hui, avec le recul, qui a conforté selon vous la division militaire au Mali ?

Quand la Cedeao signe un accord cadre avec la junte, à l’exclusion de toutes les forces politiques et sociales maliennes, et souhaite qu’une loi d’amnistie soit votée pour régir cette junte là, qui, selon vous, a conforté la junte ? En tout cas, ce n’est pas IBK. Le reste, c’est la politique politicienne. Les Maliens savent qui je suis, de même que mes amis dont l’amitié n’est pas de fraîche date.

 

 

 

Permettez nous d’insister, d’un côté, sur la libération des criminels du MNLA, la levée de mandats d’arrêt et de l’autre côté sur la chasse aux sorcières contre les militaires impliqués dans la mutinerie du 30 septembre…

Je vois, vous pouvez me croire, il n’aura pas une justice sélective sous mon mandat. Comme j’ai dit, Nul n’est et ne sera au dessus de la loi. Le jour où la culpabilité de quelqu’un sera établie, il répondra de ses actes.

 

 

 

Même s’il s’agit du Général Amadou Haya Sanogo ?

Mais, le général Sanogo n’est pas au-dessus de la loi. Je ne vous apprends rien sur l’évolution de son dossier. La justice fait son travail, sans aucune interférence.

Est-ce que votre pouvoir ne cherche pas à le protéger contre une éventuelle comparution devant le juge, avec le statut d’ancien président taillé sur mesure ?

 Pas du tout!

 

 

 

Pourquoi c’est maintenant que la décision d’affectation des éléments à la disposition de Sanogo est prise?

C’est une simple coïncidence avec l’évolution de son dossier à la justice.

 

 

 

Sur quoi l’Etat s’est basé pour prendre cette décision d’affectation ?

Je crois que c’est l’accord qui a été signé le 20 mai 2012 entre la CEDEAO, le CNRDRE et les autorités de la transition, qui a motivé le secrétariat général de la présidence a signé ce document.

 

 

Vous n’avez pas reçu de pressions ?

De la part de qui et pour faire quoi ?

 

 

 

 Par exemple des leaders religieux pour octroyer ce statut à Sanogo.

J’ai dit et je répète : personne ne me trimballera. 

 

 

 

Quelle lecture faites-vous des décisions de la réunion du 6 juin 2012 à Lomé et du sommet des chefs d’Etat et du gouvernement de la CEDEAO à Abidjan fin juin 2012, où ils ont récusé tout statut de chef d’Etat ou d’ancien chef d’Etat au Capitaine Sanogo ?

Je crois bien que mon secrétariat général ne parle pas d’ancien chef d’Etat, mais d’ancien président. Si c’est un costume taillé à sa mesure comme vous le disiez tantôt, il faut féliciter dans ce cas la Cedeao. Car elle aura excellé dans la haute couture. Ce que l’opinion ne sait pas, c’est que la seconde mesure des chefs d’Etat de la Communauté concerne uniquement le statut d’ancien chef d’Etat qu’ils ont décidé d’enlever au capitaine Amadou Haya Sanogo. Titre qu’ils ne lui ont jamais donné et qu’il n’a d’ailleurs jamais revendiqué publiquement. Ce qui est actuel et qu’ils ont légitimé à jamais, c’est son statut d’ancien président de la république du Mali.

 

 

Donc, ce statut n’est pas la prime du soutien qu’il vous a apporté lors de la présidentielle passée ?

Que non, c’est le peuple qui m’a soutenu et élu. Le Mali est un pays souverain.

Nos commentaires :

«Pour l’Union africaine, c’est [le coup d’Etat]  un crime imprescriptible et je suis du même avis.

 

 

Faudra-t-il conclure par là que l’amnistie votée par l’Assemblée Nationale au profit des putschistes serait réexaminée ?

« Oui, et je les [les camarades politiques ayant manifesté avec les pro-putschistes] ai désavoués».

 

 

 Ils n’ont cependant pas été sanctionnés conformément aux textes du parti pour indiscipline !

« Je ne peux pas vous donner des conseils !» Bien dit ! Mais il donnera quand même des conseils !  

Question : « Que ferez-vous du capitaine Sanogo si vous êtes élu ? »

Réponse : «En tant qu’officier de l’armée malienne, il obéira au chef suprême des armées que je serai».

 

Selon toute évidence, l’arrestation des putschistes n’était pas prévue à cette date. Etait-elle d’ailleurs prévue au regard du statut d’ancien président et les commodités y afférentes accordés par le pouvoir en place quelques jours après l’investiture? Au regard des incohérences dans l’octroi de ce titre, le cabinet présidentiel pouvait s’abstenir d’enteriner.   Ce qui était par contre annoncé, c’est qu’il n’y aura pas deux commandements dans le bateau après son élection. Cela, nos putschistes l’ignoraient probablement.

 

Sa vision de la gouvernance, de la démocratie

Vous avez derrière vous une longue carrière en politique. N’êtes-vous pas un homme du passé ?

Non, j’ai encore beaucoup à apporter à mon pays. Et le Mali a du pain sur la planche ! Il faut revoir cette démocratie que l’on avait tant vantée mais dont les événements de l’année dernière ont montré le vrai visage. Il faut refonder un État digne de ce nom. À ce sujet, j’ai souvent dit que nous avions tous péché, par paresse intellectuelle ou par manque de courage. Il fallait revoir l’État postcolonial, plutôt que d’enfiler des chaussures faites pour d’autres. Cela nous a valu bien des déboires.

 

 

Serait-vous un Président de transition ou un Chef d’Etat qui, une fois installé pense à un second mandat ?

Non, je suis un Président de transition. Il faut repartir, en associant tout le monde. Je ne suis pas pour un gouvernement d’union nationale. Il y a eu des outrances, des amarres qui ont été rompues. Si les faveurs des urnes m’ont été accordées, l’opposition aura tout le respect dû à son respect. Mais aucune espèce d’ambiguïté.

 

 

 Il y aura une transition qui sera faite avec des femmes et des hommes qui vont nous accompagner dans cette phase cruciale du destin de notre pays.

 

 

 Sans oublier le grand intérêt que la communauté internationale a montré pour le Mali – j’en parle avec émotion – à Bruxelles, sous l’égide de la France, avec un concours financier conséquent. Tout cela ne peut pas être galvaudé. J’ai dit : corruption tolérance zéro. En le disant, je sais très bien que des haches ont été déterrées.

 

 

 En disant ma détermination à combattre tous ces maux, je sais que ma vie a été mise à prix. Pour autant, sans forfanterie, je poursuivrai ma tâche. Je le ferai tranquillement, il n’y a pas d’autre choix. Je suis un homme face à son destin aujourd’hui. Et en toute modestie, c’est une transition vers laquelle nous allons.

 

 

Votre fils Karim est candidat en commune II. Certains voient cela d’un mauvais d’œil.

Karim est mon fils cela vrai, mais c’est un malien comme tous les autres. S’il rempli les conditions de se présenter aux législatives cela ne doit pas constituer un problème.

 

Nos commentaires

–  « Il faut revoir cette démocratie que l’on avait tant vantée mais dont les événements de l’année dernière ont montré le vrai visage… Il fallait revoir l’État postcolonial, plutôt que d’enfiler des chaussures faites pour d’autres » :

S’agirait-il de remettre la démocratie en cause ? Cela a tout l’air !

– « Nous avions tous péché, par paresse intellectuelle ou par manque de courage ». : Le sage dit-on c’est celui qui sait reconnaitre ses torts !

– Bien sûr que Karim est un  malien comme les autres. Mais tout le monde n’est fils de président et ne bénéficie pas d’autant de privilèges que Karim. 

 

 

IBK est-il un homme corrompu ?

Vous avez juré n’avoir jamais détourné un centime de l’État. Faut-il vous croire ?

Absolument. Les Maliens le savent et je m’en félicite. Si j’avais des casseroles, elles seraient déjà sorties et je ne serais pas devant vous aujourd’hui.

 

 

 

Dans votre mandat de Premier ministre, vos critiques vous accusent d’avoir gaspillé de l’argent. Il existerait un rapport d’un inspecteur des finances qui fait état de cela, qu’est-ce que vous répondez ?

J’aimerai voir ce rapport [et le confrère exhibe le journal d’où il a tiré ces informations]. Ce journal est connu ici au Mali pour me tirer dessus à boulets rouges depuis des mois et des mois. Je vais vous dire ceci : si ces faits étaient avérés, connaissant mes rapports avec certains de mes supérieurs d’alors, cela m’aurait conduit en lieu où on n’a pas beaucoup de liberté. En politique, on dit beaucoup de choses, mais la vérité profonde des hommes apparait toujours.

Nos commentaires

Sans commentaire !

 

 

 

Accord d’Alger

Quelle était la position d’IBK lors de la signature des accords d’Alger ?

Quand il y a eu les accords d’Alger, j’ai donné mon sentiment. En toute amitié, l’Algérie connaît mes sentiments vis-à-vis d’elle. J’ai dit que pour autant, une mutinerie dans des garnisons d’un pays comme le Mali, ne sera jamais réglée dans un autre pays, fut-il plus proche de vous, je veux parler de l’Algérie. Ces accords traduisaient l’effondrement total, en tout cas, la déliquescence de l’Etat malien.

 

 

 Et qu’au sortir de cela, qu’il y ait un accord qui nous instruise de libérer notre zone nord, notre point de défense et que dorénavant nous ayons à gérer de manière tripartite la ville de Kidal, j’ai dit non à un tel accord.

 

 

 Les compatriotes, ceux qui gèrent l’Algérie me comprennent sûrement de ce point de vue là. Quelle que soit mon amitié pour un pays, le Mali d’abord. Et dans cette affaire, le Mali n’était pas au mieux de sa forme. Quand on dégarnit un front de défense de son pays, on en paie le prix et on a payé le prix.

 Quand les bandes Jihadistes ont déferlé, nous ne pouvions que faire le constat d’un échec total. Nos points d’appui étaient perdus les uns après les autres.

 

 

 Le pays était en d’autres mains. Il y a eu un coup d’Etat contre un Président régulièrement élu et je l’ai condamné de la manière la plus rigoureuse.

Nos commentaires

Il était président de l’Assemblée lors de la signature de l’accord en question…  Que disait-il déjà ? Ah oui que «Nous avions tous péché, par paresse intellectuelle ou par manque de courage » 

 

 

 

 

Accord de Ouaga

 

 (…) La population dans sa grande majorité n’approuve pas les décisions du gouvernement concernant la libération des prisonniers rebelles et la levée de mandats d’arrêt.

Oui je sais bien. Nous avons eu les mains liées par les accords de Ouaga signés, sous l’égide de la communauté internationale et de l’ONU, par l’Etat malien sous la transition dirigée par le Professeur Dioncounda Traoré et par le MNLA. L’Etat étant une continuité, le Mali ne pouvait se dédire. Car dans le cas contraire, les nouvelles autorités maliennes, et votre serviteur par-dessus le marché, seraient apparues peu crédibles, donc indignes de confiance aux yeux du monde entier. Tout le monde nous aurait tourné le dos. Ainsi le remède aurait été pire que la mal.

Nos commentaires

Ah les contraintes ! On eut dit qu’elles n’ont existé que maintenant !

 

Sa relation avec les chefs d’Etat de la sous-région

Avez-vous le soutien du président ivoirien, Alassane Ouattara, qui vous a longuement reçu à Abidjan début mai ?

C’est vrai qu’il m’a reçu pendant sept heures, mais nous avons des relations de longue date.

 

 

N’est-ce pas plutôt de son prédécesseur, Laurent Gbagbo, que vous étiez proche ?

Gbagbo et moi étions condisciples à la Sorbonne, et c’est un camarade. Alassane Ouattara le sait. Je ne suis pas une toupie. L’honneur, c’est assumer qui on est.

 

 

 

Vous avez aussi été reçu ensuite par Blaise Compaoré, à Ouagadougou.

C’est un ami de longue date. Quand vous êtes opposant en Afrique et que des chefs d’État vous font l’amitié de vous recevoir, les soucis se partagent… En outre, la famille du président Compaoré et la mienne se connaissent. Nous sommes assez liés.

Je suis un rassembleur, je crois en la vertu du dialogue entre les fils du Mali, et en la réconciliation.

 

 

Au cours de votre longue carrière, vous avez été soutenu par beaucoup de chefs d’État, dont Omar Bongo Ondimba.

Mon grand frère bien-aimé… J’étais parmi le cercle restreint pour son enterrement à Franceville, et j’étais récemment au Gabon, où j’ai été longuement reçu par mon cadet, Ali Bongo Ondimba. Je connaissais bien aussi le président Eyadéma. J’ai parfois été un peu acerbe à son égard, mais il m’a conservé son amitié jusqu’à sa disparition.

 

 

Quel sera le premier pays visité dès votre installation ?

J’irai là où mes pas me conduiront et j’aurai les meilleures relations avec les pays du champ (Algérie, Mali, Mauritanie et Niger, ndlr). Et j’ai été dans tous ces pays, sauf un rendez-vous manqué à Nouakchott, parce que le Président Aziz était en déplacement.

Nos commentaires

Alassane Ouattara, Laurent Gbagbo, Blaise Compaoré, Omar Bongo Ondimba : A en croire l’interviewé, tout baigne ! Mais recapitulons : dans son pays  le 1er a destitué le sécond qui n’est autre que l’ami de longue date de l’intervizwé; il (IBK) en veut aujourd’hui au 3ème, instigateur de l’accord (de Ouaga) qu’il prend avec beaucoup de reserves (on parle même d’un conflit latent entre les deux hommes. Pour le 4ème… Enfin, ceci est une histoire de famille.

 

 

Avec la France de Hollande

Vous avez l’étiquette de « candidat de la France ». Est-ce un avantage ou un inconvénient ?

Je suis le candidat de mon peuple.

 

 

François Hollande est tout de même un socialiste, « un camarade »…

C’est vrai. Je suis fier de ce qu’il a fait et, en tant que socialiste, j’ai plaisir à rappeler qu’il a pris un risque et qu’il fallait un courage politique réel pour le faire.

 

Dans certains cercles d’intellectuels, l’on vous présente comme un candidat de la France, du Président Hollande, qu’en dites-vous ?

Certaines personnes ont dit que la France pèse toujours de son poids dans les élections des pays africains. On dit, dans le cas d’espèce, que je suis l’ami de François Hollande. C’est un camarade que je connais depuis le congrès de Brest et qui m’a été présenté par mon ami Jospin. Nous avons été vice-président de l’international socialiste.

 

 

 Hollande est un homme d’Etat pour qui l’éthique et la morale ne sont pas de vains mots. Je le dis : Hollande et moi, nous n’avons jamais parlé de la présidentielle au Mali. Et l’homme que je suis, serait outré qu’il en soit autrement. C’est le peuple malien qui élira son Président, pas autrement.

 

 

 On me dit : oui, la France a des intérêts et le Mali est riche. Ça aussi, c’est une injure. Lorsque nous fûmes sur le point d’être submergés par ces hordes Jihadistes, le pays, l’homme d’Etat qui a eu le courage politique de faire intervenir ses troupes, ne peut pas être éclaboussé de façon aussi légère. Je récuse cela. Pour ce qui concerne l’Etat du Mali, que l’on me fasse confiance pour le défendre.

 

Nos commentaires

Nos respects à la France ! Mais notez que la question (candidat de la France ou pas ?), n’a pas été repondue

 

Ses relations avec Alpha Oumar Konaré

« ***

Dans votre mandat de Premier ministre, vos critiques vous accusent d’avoir gaspillé de l’argent. Il existerait un rapport d’un inspecteur des finances qui fait état de cela, qu’est-ce que vous répondez ?

(…) Si ces faits [présumées corruptions – NDLR] étaient avérés, connaissant mes rapports avec certains de mes supérieurs d’alors, cela m’aurait conduit en lieu où on n’a pas beaucoup de liberté. En politique, on dit beaucoup de choses, mais la vérité profonde des hommes apparait toujours.

 

 

Nos commentaires

Ah bon ! Les rélations d’avec «mes supérieurs d’alors» étaient exécrables ?

 

Ses relations avec ATT…

IBK :   J’ai parlé de l’Etat patrimonial, le Président ATT a dit que j’ai insulté, j’ai dit non. Quand vous inaugurez un tronçon routier on dit que cela est dû à votre générosité. Mais de quelle générosité parle-t-on ? C’est de votre poche que cet argent est sorti ? Je lui ai dit : voilà comment on vous trompe. Il ne faut pas que l’on vous amène dans un culte de la personnalité qui vous fera du tort. Le système de l’Etat patrimonial est le système le plus archaïque, le plus arriéré du monde.

Nos commentaires

«L’Etat patrimonial est le système le plus archaïque, le plus arriéré du monde ! »

La promotion de la famille présidentielle  aussi !  

 

… Dioncounda Traoré

Le Président Dioncounda, dit-on, a sollicité des conseils auprès de votre personne, est-ce vrai ?

Dioncounda m’a appelé pour que je le conseille. Je lui ai dit que certains pourraient vous faire croire, pour des jeux politiciens, qu’IBK est contre vous, qu’il veut votre poste. Il serait stupide, cet IBK là, d’aller à un intérim en sachant qu’il (l’intérim, ndlr) ne lui permettait pas de mettre en œuvre son projet de conduire les destinées du pays. Non, je ne suis pas dans ce petit jeu de calculs.

 

 Mon aîné, je voudrais simplement vous dire que dans le cours de l’intérim auquel vous ne pouvez échapper, faites en sorte de nous réunir dans un conclave pour que nous nous parlions entre Maliens. Je ne souhaite pas que demain, on puisse vous faire un mauvais procès du genre: c’est par Dioncounda que le malheur arrive. Revenus au Mali, à l’hôtel Salam, nous avons remis ça.

 

 

 Dioncounda m’a dit : j’ai réfléchi à ton idée, je la partage désormais. En tous les cas, il y a une chose sur laquelle tout le monde s’était mis d’accord : il fallait une feuille de route.

 

 Il y a eu à Paris, la réunion des protagonistes. A une manifestation organisée à Paris se sont joints des ultras qui ont crié : Dioncounda dehors ! Certains ont même dit : IBK. C’est par un coup de téléphone que Mankeur, ministre des Affaires étrangères du Sénégal qui m’a appelé vers les coups de 23h, heure de Paris, m’a fait part de son émoi et de celui de mon frère, le Président Macky.

 

 

 Je suis tombé des nues. On a dit que c’est IBK, qu’il est en train de jouer. Il est parti à Paris pour revenir maintenant, une fois que les choses sont mises en place.

 

 

Comment avez-vous réagi à l’agression dont a été victime le président de la transition, Dioncounda Traoré, le 21 mai 2012 ?

J’ai eu très mal, et je n’ai pas, contrairement à ce que certains ont dit, de contentieux avec lui, tout comme je n’ai jamais cherché à l’évincer au profit de Sanogo. Jamais un tel schéma ne m’a traversé l’esprit. Je ne suis pas ce sot qui soulève une pierre pour ensuite la laisser tomber sur ses pieds, comme dit le proverbe ! Le coup d’État a été un accident dans l’histoire du Mali ; il faut passer à autre chose. Ce qui est arrivé à mon aîné est odieux, et il est ignoble de dire que j’y étais pour quelque chose.

Nos commentaires

Voilà : Il n’était pas interessé par l’intérim et soutenait Dioncounda, son aîné ! Mais pourquoi diantre n’a-t-il dit mot quand le tout puissant Capitaine Haya Sanogo qu’il conseillait également s’est insurgé contre son protégé et tenté de mettre fin au mandat de la transition: « Pas un jour de plus » 

 

 

 

 

La justice

Guido   19 nov 2013

Permettez nous d’insister, d’un côté, sur la libération des criminels du MNLA, la levée de mandats d’arrêt et de l’autre côté sur la chasse aux sorcières contre les militaires

 Je vois, vous pouvez me croire, il n’aura pas une justice sélective sous mon mandat. Comme j’ai dit, Nul n’est et ne sera au dessus de la loi. Le jour où la culpabilité de quelqu’un sera établie, il répondra de ses actes.

Nos commentaires

Signalons à propos que des suspects déjà  inculpés jouissent aujourd’hui de l’immunité parlementaire par la bénédiction de la mouvance présidentielle. Par contre, ceux ne militant pas au sein du même parti sont appelés à la barre !

 

 

 

Les religieux

Vos détracteurs vous présentent comme un candidat de l’armée et des religieux, n’ont-ils pas raison ?

Quel homme d’Etat ne serait pas au mieux avec les Forces Armées de son pays et qui va gérer en toute sécurité ce grand pays qu’est le Mali ? Cela est une très bonne chose. On est allé jusqu’à me faire le procès comme quoi je suis fâché contre les chrétiens et que j’ai décidé de leur faire le plus grand tort, en fermant des églises, que sais-je encore.

 

 

 J’ai rappelé les relations d’échanges cultuel et spirituel très féconds avec mon Seigneur Jean Zerbo, Archevêque de Bamako. Si vous me fouillez, vous allez sûrement trouver sur moi les paroles de Saint François : paroles de paix, d’apaisement, pourtant je suis musulman convaincu.

 

 

 Je suis un homme de culture, d’ouverture. Je ne bouderais pas mon plaisir d’être soutenu par l’armée malienne et les chefs religieux du Mali. Je ne mens pas. Beaucoup voudraient avoir ce privilège. Moi j’en suis l’heureux bénéficiaire et croyez-moi, ce plaisir je ne le boude pas.

 

 

 

L’intégrisme est-il une menace pour le Mali ?

Je ne crois pas. Nous ne sommes pas des néophytes, et le zèle est souvent le fait des néophytes. Au Mali, nous pratiquons un islam modéré et raisonnable. Pas un islam d’importation.

 

 

Nos commentaires

L’on a comme l’impression que l’ombre du chérif  de Nioro, M. M’Bouyé Haïdara plane ici !

 

 

Rassemblés et commentés par B.S.

 

Encadré

Kidal à l’image de l’armée malienne ?

A en croire l’interviewé, Kidal serait à l’image de l’armée malienne, c’est-à-dire,  dépourvue de tout. Signalons que pareilles images ont outrageusement favorisé les  rebéllions ainsi que  leur soutien et justifié les défaillances de l’armée. Lisez plutôt !

A propos de Kidal …

 «Sans vouloir faire de la démagogie, j’ai crié mon indignation et ma révolte, atterrissant à Kidal et me rendant compte que cette ville n’avait pas bougé du tout. Il y a eu juste quelques projets de l’Agence Française, de la Coopération luxembourgeoise.

 La piste de l’aéroport de Kidal, nous avons eu 20 mn à la retrouver sous le sable, au point que j’ai failli demander à mon pilote de rebrousser chemin avant de mettre la vie des passagers en danger. Croyez-moi, ce sont des choses que nous allons corriger et dans les meilleurs délais»

 

 

 

De l’armée malienne

J’ai dit, le soir même, que j’approuvais cette intervention. La France a permis d’éviter le pire. Toutefois, je trouvais injuste d’entendre répéter que l’armée malienne ne valait rien. Il est vrai qu’elle est sous-équipée, mal formée, que certains de ses chefs étaient corrompus. Mais il faut voir dans quelles conditions misérables vivaient nos soldats et leurs familles dans les casernes… Je leur ai rendu visite quand j’étais Premier ministre, et les larmes me sont venues. J’ai eu honte. La France a donc fait ce qu’elle devait faire, d’autant que les armées de la sous-région, à l’exception de celles du Niger et du Tchad, faisaient de la rodomontade. Quant à la Force africaine en attente, la FAA… Nous, Africains, nous aimons les titres ronflants, mais creux.

Source :  Rassemblés par BS / La Sentinelle

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