Demeuré très critique à l’égard de la politique étrangère de la France, la liberté de ton de ce diplomate embarrassait ses supérieurs. En 2012, ses propos qui prédisaient les événements au Burkina Faso, donc l’effondrement du système Compaoré, lui ont valu son limogeage par le Ministre français des Affaires Etrangères, Laurent Fabius. A l’époque, Bigot était Sous-directeur Afrique Occidentale au Quai d’Orsay. Depuis lors, il a monté le cabinet de consultance Gaskiya.
Pourquoi dénoncez-vous la politique guerrière du Président Hollande et de ses ministres ?
Après le drame des attentats à Paris, la réaction des Français a été digne et sage. L’hystérie sécuritaire de la classe politique est affligeante et inquiétante. Une réponse sécuritaire est nécessaire, mais la rhétorique guerrière de nos dirigeants nous mène dans une impasse. Nous allons sur le terrain de nos adversaires en faisant du « Georges Bush » version française. C’est un concours de virilité dont tout le monde a constaté les effets désastreux post-11 septembre 2001 aux Etats-Unis.
Que pensez-vous de notre politique étrangère ?
Il n’y a plus de politique étrangère. Nous avons subi un camouflet avec la conclusion de l’accord sur le nucléaire avec l’Iran, plusieurs autres sur la Syrie. La France n’a plus aucune influence dans les négociations au Proche-Orient. A ne vouloir faire que de la diplomatie économique, nos dirigeants ont placé l’argent au-dessus de toutes les autres valeurs. Laurent Fabius considère que les contrats commerciaux sont plus importants que la devise de la République, « Liberté, Egalité, Fraternité ». Nous signons des contrats avec l’Arabie Saoudite et le Qatar, ceux-là mêmes qui financent l’obscurantisme religieux voire le terrorisme. Du coup à l’étranger, nos discours sont perçus comme incohérents et pleins de duplicité. La grande erreur de notre diplomatie est d’avoir désigné des bons et des méchants et de ne discuter qu’avec ceux que l’on considère comme les bons. Le principe même de la diplomatie est de parler avec tout le monde, ce qui ne signifie pas bien entendu, soutenir tout le monde. Bachar el-Assad est un tyran, mais ce n’est pas une raison pour soutenir le Front al-Nosra, équipé de missiles français notamment. Notre réponse à la barbarie, c’est soutenir une autre barbarie ?
Mais la France n’a jamais été aussi présente dans ses engagements extérieurs en Afrique…
Le recours à la force est parfois nécessaire, mais notre politique extérieure ne peut se résumer à cela. Les Africains disent que le « ministre de l’Afrique » est Jean-Yves Le Drian. Où sont passés les relais politiques et diplomatiques ? Notre rapport à l’Afrique est uniquement sécuritaire. L’intervention militaire au Mali n’était pas accompagnée d’une stratégie politique. Espérons que cela ne devienne pas un bourbier.
Selon vous, les militaires français ont un droit de « tuer » au Sahel ?
Juridiquement, on peut définir la guerre mais on a du mal à appréhender le terrorisme. Dans nos textes de loi, il s’agit d’une infraction pénale et, dans ce cadre, la réponse ne peut être que judiciaire. Une intervention militaire contre des terroristes est une réponse d’urgence, mais celle-ci est illégitime dans la durée. On a emboîté le pas de la doctrine américaine. Si les militaires ont des informations suffisamment précises pour tuer des personnes, pourquoi ne pas les transmettre à la justice ? S’affranchir si systématiquement de la présomption d’innocence et du droit à un procès juste et équitable, c’est aller contre nos valeurs. In fine, on coupe des têtes mais d’autres repoussent. On n’a tiré aucune leçon de l’Afghanistan ou de l’Irak. Pire, on répète les mêmes erreurs.
Y a-t-il des combattants pakistanais au nord de la Côte d’Ivoire, ce qui attesterait de liens entre les théâtres africains et du Moyen-Orient ?
C’est possible, mais je n’en ai aucune preuve. Le nord du Mali s’est radicalisé, avec l’implantation du mouvement fondamentaliste tabligh dans les années 2000. Des prédicateurs pakistanais ont préparé le terrain à des dérives plus violentes. La liberté de conscience doit être préservée, tout en veillant à ne pas aboutir à des idéologies violentes.
La jeunesse s’entasse dans les banlieues des capitales africaines. Elle est largement désœuvrée, sans perspective. Il faut libérer les énergies si on ne veut pas que le dividende démographique ne devienne une bombe à retardement.
Le nord du Mali n’est-il pas loin d’être stabilisé ?
Seuls les Maliens pourront stabiliser leur pays. Tant qu’il n’y aura pas de sursaut national, on aura beau les y aider, cela sera difficile. Il y a une faillite morale généralisée des élites. Les Maliens n’ont aucun horizon et sont accaparés par la survie quotidienne. Les terroristes et les groupes armés s’implantent là où il y a du vide étatique, là ou personne ne prend en charge l’intérêt général. Les enjeux sont complexes, dont certains sont complètement tus, comme les conflits liés à la question foncière, en particulier entre agriculteurs et pasteurs nomades. Ces conflits font de nombreuses victimes dans toute la bande sahélienne et sont une source importante d’insécurité. Malheureusement, l’attention ne se porte que sur ce qui est médiatique, le terrorisme.
Etes-vous inquiet de la progression de la radicalisation religieuse en Afrique ?
Elle progresse partout en Afrique Occidentale, elle se nourrit des frustrations socio-économiques, notamment de la jeunesse. Une partie des élites participe aussi à cette radicalisation par cupidité, car les sponsors sont généreux, ou par clientélisme politique. Les aspirations de la jeunesse doivent être au centre des politiques publiques africaines. Cette jeunesse s’entasse dans les banlieues des capitales africaines. Elle est largement désœuvrée, sans perspective et éprouve les plus grandes difficultés à se réaliser dans la sphère économique. Dans ces pays, si vous n’êtes pas proche de l’oligarchie, il est difficile de réussir. La cooptation et la corruption sont des leviers bien plus puissants que le mérite. Il faut libérer les énergies si on ne veut pas que le dividende démographique ne devienne une bombe à retardement.
Cette jeunesse francophone a-t-elle des attentes par rapport à la France ?
Elle attend de la France qu’elle défende les droits de l’Homme. Qu’elle soit aux côtés des opprimés et non pas des oppresseurs. Les mouvements citoyens sont désormais beaucoup plus soutenus par les Etats-Unis. Nous perdons aussi la bataille de la langue française qui recule partout en Afrique, conséquence de l’effondrement des systèmes éducatifs. La langue française n’appartient pas à la France, elle appartient à tous ceux qui la parlent et qui partagent des valeurs humanistes. Les mouvements citoyens l’ont bien compris puisqu’ils en ont fait leur langue de combat.
Les Etats prennent-ils la mesure des menaces auxquelles ils sont confrontés au point de vue théologique ?
Le Président sénégalais, Macky Sall, l’a clairement affirmé lors du Forum sur la sécurité de Dakar : l’islam radical n’appartient pas à la culture africaine. Les Etats africains auraient intérêt à mieux contrôler les aides financières en provenance du Qatar et de l’Arabie Saoudite pour la construction des mosquées et des écoles coraniques. Les élites politiques africaines ont démissionné face à la propagation du wahhabisme qui cherche à prendre la place des courants confrériques, d’inspiration Soufi. Principale conséquence, l’éducation des jeunes et la condition des femmes se dégradent. Les politiques de développement doivent remettre la femme au centre du jeu à travers les programmes de microcrédit, d’éducation et de santé. Il est maladroit de parler de planning familial en tant que tel. Cette notion a une connotation trop occidentale et heurte les sensibilités africaines. C’est par l’émancipation éducative, économique et sociale que les femmes conquerront le droit de choisir d’enfanter ou pas. C’est une liberté fondamentale pour les femmes. Dans les pays du Golfe de Guinée, les courants évangélistes sont également en plein essor. Ils disposent de moyens financiers et infiltrent la sphère politique. C’est un danger. Pouvoir politique et religion ne font jamais bon ménage.
L’Afrique va-t-elle devenir une terre de repli pour les djihadistes européens partis en Syrie et en Irak ?
Certains Français d’origine africaine partis se battre au Moyen-Orient auraient été repérés au Sénégal et dans d’autres pays d’Afrique de l’Ouest. En France, l’appareil judiciaire les surveille. Ils pourraient privilégier l’installation sur le continent. Ces combattants aguerris pourraient exercer un pouvoir d’attraction auprès d’une partie de la jeunesse africaine. L’enjeu, c’est de renforcer les capacités de renseignement, notamment dans les grandes villes où l’urbanisme sauvage les rend hermétiques à toute surveillance. Les dirigeants africains doivent également retrouver un discours sur les valeurs car cet islam radical est souvent perçu comme une alternative idéologique crédible face à la faillite de la classe politique.
Entretien réalisé par Pascal Airault
Source : lopinion.fr
Bigot ne représente que lui et de lui même,.
Bigot dit vraiment la vérité. L’occident va chuter avec ses valets des pays sous développés.
Il y a une faillite morale généralisée des élites . Les français n’ont aucun horizon et sont accaparés par la survie quotidienne
Les mouvements sociaux sont révélateurs du désarroi des français . Les français sont complètement dépassés par les évènements , la vie chère , le chômage et la précarité .
Les français doivent d’avantage se préoccuper des problèmes de la France au lieu de jouer aux donneurs de leçons dans les pays africains
quand on sait que les élites sont plus préoccupés d’éplucher leurs comptes bancaires que du développement du Mali ,la situation restera la meme pendant des siècles
Les dirigeants africains sont des apatrides qui n’ont rien à foutre de l’Afrique ils ont la pour leurs propres intérêts
Décidément les Toubab sont plus redoutés que la grippe aviaire chez les Pintades !! 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😛 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😀 😛
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