« L’Afrique ne vient pas mendier ! »

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L’un des points de négociations lors de la conférence de Durban sur les changements climatiques, c’est la mise à la disposition des pays vulnérables de fonds pour l’adaptation.

L’un des points de négociations lors de la conférence de Durban sur les changements climatiques, c’est la mise à la disposition des pays vulnérables de fonds pour l’adaptation. Pour le Ministre malien de l’Environnement, c’est une question de justice et d’équité envers les africains.

Deuxième semaine de la Conférence des Parties à la Convention des Nations Unies sur les changements climatiques. Le segment ministériel des négociations a commencé. Comment l’Afrique vit-elle la COP de Durban ? 
L’Afrique vit très bien cette conférence de Durban car c’est la COP de l’Afrique. Depuis que l’organisation a été confiée à l’Afrique du Sud, tous les ministres se sont mobilisés pour contribuer à sa réussite. La COP 17 s’est également l’occasion après l’échec relatif de Copenhague, l’adoption d’un certain nombre de décisions générales à Cancun de concrétiser un certain nombre d’éléments importants du mécanisme bilatéral de négociations sur les changements climatiques. Il s’agit en clair, ici à Durban, d’implémenter les décisions de Cancun pour ce qui concerne la mise en place du Fonds Vert pour le Climat, le Comité d’adaptation, les mécanismes de transfert de technologies, le financement des activités à mener par les pays en voie de développement pour faire face aux impacts des changements climatiques. Il nous faut également finaliser ce qui avait été décidé à Cancun en ce qui concerne la réduction des émissions dues à la dégradation et à la déforestation, communément appelé REDD+. D’un autre côté, l’Afrique tient à ce que soit consenti par les parties prenantes une seconde période d’engagement au titre du Protocole de Kyoto. Le protocole de Kyoto ki fait l’objet de beaucoup de controverses. Il y a certaines parties à la convention-cadre et au protocole qui disent ne plus être prêtes à continuer. Nous estimons que quoiqu’il arrive, il faut éviter qu’il y ait un vide juridique entre la première période d’engagement qui arrive à échéance le 31 décembre 2012 et la seconde période. Car, un vide juridique sera synonyme d’un anéantissement de tout ce que nous avons comme acquis dans le cadre de la mise en œuvre de la convention et du Protocole de Kyoto.

L’Afrique est en général le parent pauvre quand il s’agit de négocier. Ici, la voix du continent sera-t-elle plus entendue qu’ailleurs ?
C’est l’une des satisfactions majeures du président en exercice de la Conférence des Ministres Africains de l’Environnement (CMAE) que je suis. L’Afrique a du poids dans les négociations, parce qu’elle s’est donné les moyens de peser. L’Afrique désunie, l’Afrique écartelée, en tout cas en ce qui concerne les questions environnementales et du climat, cela appartient au passé. Je peux dire depuis Copenhague, mais surtout depuis Nagoya, en octobre 2010, l’Afrique est décidée à parler d’une seule et même voix. Nous avons aujourd’hui, ici à Durban, une position commune qui a été concoctée par nos experts et que les négociateurs du continent vont porter dans les instances de discussions pour que la parole de l’Afrique soit entendue, mais aussi et surtout prise en compte. Nous savons que les choses ne sont pas faciles. Mais nous devons faire en sorte de préserver les intérêts du continent africain. Notre continent, vous le savez, ne produit presque pas d’émissions responsables du réchauffement climatique, mais il est aujourd’hui le plus vulnérable à ses effets. C’est comme si « d’autres boivent et c’est l’Afrique qui doit trinquer ». Nous estimons que cela n’est pas juste ! C’est cette quête de justice et d’équité que nous menons. L’Afrique ne demande l’aumône de personne, l’Afrique demande simplement aux uns et aux autres d’assumer les responsabilités qui sont liées aux actes qu’ils ont posé par le passé et qui peuvent être de nature à annihiler tous nos efforts de développement.

L’homme de la rue ne se sent pas très concerné par ce qui se passe ici. Ne pensez-vous pas que des actions sur le terrain soient plus efficaces que de grandes conférences comme celle-ci ? 
Disons que tout se tient. Autant on a besoin de grandes rencontres de ce genre parce qu’on a affaire à un phénomène global qui ne saurait avoir de solutions exclusivement locales, autant on a besoin d’agir sur le terrain avec les populations en les accompagnant dans les activités d’adaptation aux effets des changements climatiques. Il ne s’agit donc pas de mettre une cloison entre les grandes rencontres et ce qui se passe sur le terrain, mais les grandes rencontres doivent nourrir ce qui se fait sur le terrain. Par exemple, dans le mécanisme de négociations multilatérales sur le changement climatiques, une bonne place est faite aux questions de financement. Parce que les efforts qui doivent être faits sur le terrain avec toute la bonne volonté dont nous pouvons faire preuve ne nous permettront pas de faire face aux effets néfastes des changements climatiques si un appui conséquent n’est pas donné par ceux là qui ont de la richesse aujourd’hui, accumulée au détriment des plus pauvres. Ce sont donc deux éléments qui se complètent comme on le verra tout au long de cette COP. La délégation malienne va prendre part un ensemble d’activités dont certaines ont pour but de mobiliser les partenaires pour avoir des ressources et appuyer les efforts des populations.

Le sentiment ambiant ici est plutôt le pessimisme. Pensez-vous que l’on puisse s’attendre à de réelles avancées à cette COP17 ?
C’est l’espoir de l’Afrique en tout cas. Nous pensons qu’il ne servira à rien de perdre du temps Il faut qu’en partant de Durban, on est un accord juridiquement contraignant, afin que chacun puisse être mis devant ses responsabilités et s’engager à les assumer. Nous avons encore quelques jours devant nous, j’espère que le bon sens et le réalisme vont prévaloir. En tout état de cause, et ce qui se passe dans le monde nous en donne la leçon, il faut dépasser les égoïsmes pour avoir le courage te l’intelligence de regarder en face ce qui ne nous ratera pas. Il nous faut agir ici et maintenant.

Par Célia D. d’ALMEIDA – 06/12/2011

journaldumali.com

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