La réalisatrice de ” Nafi ” Eugénie Ouattara dite Djuedjuessi à cœur ouvert dans Bamako Hebdo : “Une femme doit être coquette, toujours surprendre son homme par des coiffures, des tenues, des bonnes odeurs”

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Partie de rien,  la célèbre  réalisatrice de la série télévisée ” Nafi ” a su se faire un chemin dans le cinéma africain en devenant aujourd’hui une véritable  icône. La série ” Nafi ” qui porte sa signature a presque fait le tour des chaînes de télévision africaines. Dans ce film, elle  se nomme Hawa et joue le rôle d’épouse préférée de Touré. Après le décès de ce dernier,  son frère  venu du village, a hérité de ses femmes dont Hawa,  la mère de Nafi. Native de Dabakala dans le nord du pays, Eugénie qui fut invitée aux quarante ans d’existence  de TV5, a été la première ivoirienne à présenter à l’occasion un film de 104 épisodes. A 32 ans de carrière aujourd’hui, cette mère de deux grands enfants, fait toujours parler d’elle de par son courage, sa largesse d’esprit et la maîtrise de son corps. Dans une interview qu’elle nous a accordée à cœur ouvert dans sa somptueuse villa de Cocody, elle nous parle de son métier, ses débuts, les difficultés, ses projets et sa vie de couple.

Eugénie Ouattara

Bamako Hebdo : Qui est Djuedjuessi ?

Je suis Eugénie Ouattara à l’état civil née Mme Délaveau. Djuedjuessi est un nom que m’a donné ma grand-mère maternelle, parce que j’étais très bouillante à l’enfance. Djuedjuessi veut tout simplement dire “ la femme chaude “. Quand je suis allée à l’émission ” comment ça va “, chacun devait donner un nom et moi, j’ai pris ce surnom que m’a donné ma mamie. Je suis issue d’un métissage Baoulé- Djoula.

A l’époque, il n’y avait pas d’école, pas de comédie, comment se faisait la formation?

Il  y avait quand même une école des arts en Côte d’Ivoire mais nous, on a appris l’art sur le tas.

Selon vous, quelle est la meilleure école en matière de comédie ?

L’école est indispensable en formation, même si on a du talent, c’est à l’école qu’on apprend les dictions et beaucoup d’autres choses pour devenir meilleur.

Pourtant, ceux qui se sont formés sur le tas ont beaucoup évolué dans la comédie en Côte d’Ivoire, ils sont chefs d’entreprise contrairement à ceux qui sont sortis d’école.

Je pense que dans toute chose de la vie, il faut d’abord aimer ce que tu fais avant tout engagement. Le cinéma pour moi est une passion. Nous avons réussi une formation au sens propre sur le cinéma. On écrivait nous mêmes nos scénarios, pour voir notre capacité. Avec Brodouer, on ne pouvait pas ne pas apprendre, car il donnait la chance à tout un chacun. Ce qui fait aujourd’hui notre force.

Qu’est-ce qui vous motive dans le cinéma ?

Quand je regarde le quotidien, mon entourage, la souffrance de certains qui tentent de réussir par tous les moyens, j’ai envie tout de suite d’écrire un scénario.

Aujourd’hui, qu’est- ce qui décourage dans le cinéma ?

Quand on n’a pas de moyens pour pouvoir réaliser tout dont l’image dans un film.

Comment avez-vous fait pour la réalisation de Nafi ?

Comme je n’avais pas les moyens, j’ai été obligée de prendre un prêt de 200 millions à la banque sous la couverture de quelqu’un. Dieu merci, aujourd’hui, j’ai réussi à le rembourser.

C’était un risque énorme ?

Absolument, mais on a aussi l’habitude d’entendre que ” qui ne risque rien, n’a rien “. Mais ça en valait la peine. Parce que je suis partie de la télé (RTI) avec beaucoup d’amertume, donc, il fallait réussir.

Amertume vous dites, qu’est-ce qui s’est réellement passé ?

Sous Houphouët Boigny, on travaillait à la RTI comme collaborateurs extérieurs. Sur ordre du président, on était les comédiens de l’Etat. Quand Broudouer est parti, George Aboquet a créé “ Il faut pas fâcher” mais eux, ils étaient payés par  tournage. Ainsi, Aboquet a dit qu’on ne va pas continuer comme fonctionnaire,  qu’il fallait changer de statut. J’ai alors dit que si nous devons être traités sur le  même pied d’égalité que les autres compte tenu du temps qu’on a fait à la télé, qu’on paye nos droits et nous recommencerons à zéro. Ce qu’il n’a pas apprécié, il nous a renvoyés et j’ai pris un avocat. Quand Mme Fatoumata Diop à la tête de la RCI est venue, elle nous a demandé de sursoir au jugement et de reprendre le contrat comme tel. Le jour de la signature du contrat, Aboquet est venu avec des militaires pour chasser la bonne dame.

Les autres membres du groupe ont demandé de faire un sit-in à ce niveau, je me suis réservée parce que je suis Ouattara, ça a coïncidé à l’époque avec le début de la tension dans le pays. Alors, bonjour la galère. Je me débrouillais pour pouvoir subvenir à mes besoins. Quand Yacouba Kébé est venu, il a payé nos droits et demandé à ce qu’on lui propose quelque chose pour continuer la collaboration.

Qu’avez-vous fait de cet argent ?

C’est ce que j’ai utilisé pour faire les 5 premiers épisodes de Nafi. Ensuite, j’ai fait un prêt pour reprendre et retravailler le scénario, ça a commencé à créer des jalousies, des clans qui se formaient entre les personnages du film. Par exemple, Touré, le père de Nafi n’était pas prévu dans le film pour mourir. J’ai tout fait pour qu’il reste,  finalement, j’ai cassé le tournage pendant une semaine.  La solution a été de filmer un enterrement, pour dire qu’il est mort et de le faire remplacer par quelqu’un qui est devenu son frère.

Aujourd’hui, quel regard portez-vous sur le cinéma africain, sur quoi, vous-vous êtes  inspirée pour faire Nafi ?

Nafi est le fruit d’une nouvelle de 5 pages d’Isaïe, Biton Coulibaly, que j’ai transformé en scénario.

Pour vous, quelle est la meilleure stratégie pour avoir un financement ?

Je pense que l’Etait doit aider les cinéastes crédibles qui le rembourseront après, d’ailleurs, on a fait une réunion au Mali avec le Burkina pour que les chefs d’Etat donnent de l’argent pour que l’UEMOA nous finance sous forme de prêt.

Quels sont vos projets ?

Je suis sur un film que j’ai intitulé “ charme et chagrin “. Je vous promets d’apporter un produit à hauteur de souhait. Dès que je finis, j’envisage un long métrage avec le Burkina.

De quoi parle ” charme et chagrin ” ?

J’ai tenté de montrer l’argent et ses conséquences. Les femmes qui s’enrichissent sur le dos des hommes. Celles qui ne se marient pas par amour mais par intérêt. La femme est tellement  belle que l’homme pour l’avoir est prêt  à tout donner. Au finish, il  ne sera pas heureux.

J’envisage d’aller au Fespaco avec cinq épisodes de ce film.

C’est quel genre de film ?

Là aussi, je vais faire une série de 104 épisodes mais un film de fiction.

A quand la sortie de la série ?

Très bientôt, je suis à la recherche de crédit à la banque.

A combien estimez-vous le budget de ce film ?

A plus de 200 millions de FCFA. Les comédiens demandent un peu plus, je les comprend parce que c’est aussi difficile pour eux.

Que pensez-vous de la piraterie ?

C’est un système qui nuit aux réalisateurs. Il suffit de mettre sur les chaînes de télévision, le lendemain, la contrefaçon est disponible. Finalement, on préfère vendre en DVD avant que ça ne passe sur les chaînes de télé.  Pour cela il faut que les autorités prennent garde.

Vous êtes une femme apparemment très soignée, quel est votre secret ?

Mon secret est que je me mets à la hauteur de la jeunesse, parce que je ne veux pas vieillir moi. En plus, Dieu a fait que je sois mariée à un français, ce qui fait que je donne beaucoup de soins à mon corps tout en valorisant ma féminité. Une femme doit être coquette, toujours surprendre son homme par des coiffures, des tenues, des bonnes odeurs. Mais, quand il y a un laisser aller, l’homme  va courir au dehors. Moi, je ne me laisse pas faire, il m’arrive de porter des culottes à la maison pour séduire mon mari. Je sais qu’il n’aime pas les cheveux courts, je suis toujours là à me tisser pour lui et à sa convenance.

Vous parlez de féminité, êtes-vous féministe ?

Beaucoup, il est temps que les femmes se réveillent, nous pouvons faire des miracles.

Quel est votre couleur de dessous préféré ?

Le noir

Faites-vous de la cuisine pour monsieur Délaveau ?

Bien-sûr, je prépare avec joie pour lui. Je suis un cordon bleu.

Ah oui, quel est votre plat préféré ?

Je raffole du riz à la sauce tomate avec du Soubala. Et comme il se trouve que ça soigne la tension, c’est encore mieux. Même quand je vais en France je le mets dans mes affaires, même si mon mari trouve que ça ne sent pas bon.

Qu’est-ce Djuedjuessi déteste au monde ?

Oh là là l’hypocrisie.

Et qu’est ce que vous aimez chez un homme ?

La confiance, qu’il ne me prenne pas ma liberté. C’est pourquoi, je m’entends bien avec mon mari.

Est-ce la raison qui fait que vous ne portez pas d’alliance ?

Non pas du tout. C’est pour éviter le contact avec les produits cosmétiques. Mais quand je sors, je la porte.

Votre mari, comment l’avez-vous connu ?

Je l’ai connu en France à Toulouse, j’avais plein de bagages, seuls les handicapés ont droit à une aide pour aider à transporter les bagages. Je partais à Paris, et c’est lui qui était au guichet ce jour là, il a demandé aux transporteurs d’handicapés de m’accompagner dans le train. Entre temps, on a fait la présentation et échangé les numéros. Quand je suis rentrée en Côte d’Ivoire, je l’ai appelé une fois pour lui dire que je suis bien arrivée. Depuis,  de temps en temps, on s’appelle, jusqu’à un jour où il me demande en mariage puisqu’il venait de divorcer. Je ne le prenais pas au sérieux au départ. Quand, j’ai informé mes parents, ils m’ont accompagné de leur bénédiction. C’est en plein tournage de Nafi que je me suis mariée et il a beaucoup  de familles, ce qui est une chance pour moi.

Quel est le degré de votre amour présentement ?

Il est à dix degrés et ça monte chaque jour qui passe.

Des enfants sont au programme ?

Je ne peux plus en faire mais on veut adopter.

Quels sont vos rapports avec  Akissi Delta ?

Akissi, c’est ma grande sœur, puisque nous venons toutes les deux de Denokro.

Il parait qu’elle a failli se suicider  à cause de vous ?

J’étais en France quand les rumeurs ont circulé pour dire qu’Akissi, très jalouse est allée à la RTI pour demander qu’on suspende ma série Nafi. Un jour, on m’a appelée qu’elle a voulu mettre fin à ses jours à cause des rumeurs.

Dieu merci, il y a eu plus de peur que de mal. A l’hôpital, elle m’a expliqué que les gens en veulent à notre amitié. Heureusement, je ne suis pas du genre à croire les ” on dits “. Aujourd’hui, on fait tout ensemble. Je la prépare et son chauffeur vient la chercher quand elle a envie de manger quelque chose.

Pour terminer que diriez-vous à vos fans du Mali ?

Je dis merci à tous ceux qui m’ont aimé et qui continuent de m’aimer. Je leur dirai de m’accompagner de leur bénédiction et je continuerai à leur préparer de très bonnes surprises. Alors à bientôt dans ” charme et chagrin “.

Réalisé par Fatoumata Mah Thiam KONE

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4 COMMENTAIRES

  1. N’Importe quoi. Tu as interret a reprendre le chemin de la mosque et de t’habiller correctement. Une belle femme est celle qui obeit a son mari et montre un bon exemple. L’homme aussi doit obeir la femme car cest la source de la vie.

  2. Avec des femmes comme ça (qui n’ont pas d’autres préoccupations que ça) l’Afrique ne se développera jamais.

  3. c,est ça on appelle femme pas comme notre lobo qui faisait la charite avec de l,argent mal acquit…

  4. J’ai été séduite par cette série aussi prenante du début à la fin.
    J’ai adoré!
    Merci à vous!

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