L’Ambassadeur des Etats-Unis au Mali, Terrence McCully au Républicain

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"Bahanga et Fagaga ne sont pas des terroristes mais au Nord – Mali il y a des terroristes affiliés à AL QAÏDA, des trafiquants, des bandits…"

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Deuxième personnalité reçue dans le cadre de « l’invité de la rédaction », l’ambassadeur des Etats-Unis au Mali Terrence McCully aborde sans fard les divers aspects des relations entre son pays et le Mali : la lutte contre le terrorisme, la rébellion touarègue, la concurrence entre les puissances …

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Le Républicain : Excellence, parlez-nous des domaines de Coopération entre le Mali et votre pays .

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Terrence McCully : Nous avons un programme de Coopération solide, très robuste avec le Mali. Avec l’avènement du Millenium Challenge Account et l’avènement de l’initiative présidentielle pour la lutte contre le paludisme, cette coopération vieille déjà de quelques décennies a pris des formes diverses et se chiffre à environ 150 millions de dollars américain par an, soit 70 milliards de francs Cfa. 

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En outre en dehors des activités que je viens de mentionner, notamment le compte de Millenium challenge, nous avons un programme dirigé par l’USAID qui est dirigé vers le secteur de la santé, de l’éducation, de la croissance économique notamment dans le secteur agricole, aussi bien que dans le secteur de la communication et de la bonne gouvernance. Nous accompagnons aussi le Mali dans un ambitieux et très louable processus de décentralisation.

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Pour ce qui concerne le Millenium Challenge, nous comptons mener des activités dans la zone de l’Office du Niger par la mise en valeur de 16 mille hectares pour la production du riz, l’aménagement de l’aéroport de Bamako Sénou et la construction d’une zone industrielle autour de cet aéroport.

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 Nous avons aussi la mission du Corps de la Paix. Il s’agit de 150 jeunes américains qui travaillent à la base, dans les villages, dans les villes du Mali, aux côtés du peuple malien pour le développement du pays.

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 L”aide américaine au Mali s”éleve à 70 milliards de francs Cfa par an

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R : Le Millenium Challenge Account est perçu en Afrique comme une prime à la bonne gouvernance et le Mali en est bénéficiaire. Mais avec le rapport du Vérificateur général, quelle analyse faites-vous de l’état de la bonne gouvernance au Mali ?

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T. M : Le Mali a rempli les critères du Millenium Challenge Account, et continue de remplir les critères en ce qui concerne la bonne gouvernance. Je me félicite du fait que le 17 septembre de cette année on est passé au niveau de la mise en vigueur du compte du Millenium Challenge. Ce qui veut dire que nous sommes entièrement satisfaits de l’état de notre coopération dans ce domaine avec le Mali.

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R : Pourtant le rapport du Vérificateur général a décelé des détournements de plusieurs milliards?

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T. M : Je crois qu’il a été salutaire que les autorités maliennes aient créé le Bureau du Vérificateur Général, un office très important pour contrôler les services de l’Etat. Je crois que le Vérificateur a fait son devoir. Nous attendons que son rapport soit pris en compte par le gouvernement malien qui, après tout, l”a institué.

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R : Existe-t-il une Coopération militaire entre le Mali et les Etats-Unis ? Si oui, comment se manifeste t-elle? 

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T. M : Oui, tout à fait. Depuis 1961, les Etats-Unis coopèrent avec le Mali dans les domaines de la défense, de la sécurité. Nous avons un accord de Coopération qui date de 1961.

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Ces dernières années, on peut dire que cette Coopération s”est renforcée. Elle se caractérise par des exercices conjoints, puisque nous croyons qu’il est important d’accompagner nos partenaires maliens afin de renforcer la capacité des forces armées et d”aider à sécuriser le pays y compris cette zone Nord , aussi vaste que la France, et sur laquelle plane toutes sortes de menaces. Menaces contre la souveraineté, contre la sécurité du Mali…

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On est en train depuis longtemps de mener des exercices conjoints, d”organiser des formations avec le partenaire malien pour renforcer la capacité de l’armée malienne, sécuriser le Nord-Mali contre le terrorisme , contre les trafiquants de drogue, de cigarettes, bref contre les menaces vivant la sécurité et qui empêchent franchement le développement des régions Nord du pays.

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 Des exercices contre le terrorisme, les trafiquants de drogue et de cigarettes.

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R : Les Etats-Unis dans ce souci entretiennent ils des troupes au sol au Mali ?

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T. M : Dans le sens propre du terme, non. Evidemment nous avons des éléments qui viennent pour les exercices conjoints que nous menons. Récemment par exemple au mois d’août, on a travaillé aux côtés de nos partenaires maliens dans l’exercice « Flintlock », un grand exercice multinational qui a rassemblé les participants de 14 pays différents et il y a, évidemment , une participation américaine ici à Bamako.

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Depuis 2003, nous menons des exercices conjoints avec le partenaire malien à Gao, à Tombouctou , récemment à Tessalit. Mais ce sont des éléments qui vont de 10 à 30 personnes dans chaque ville pour travailler aux côtés des militaires maliens dans les exercices de formation. En dehors de mon attaché de défense qui fait partie de la mission diplomatique à Bamako, nous n’avons pas de force armée américaine basée au Mali. No éléments viennent pour des exercices et regagnent leur commandant basé en Europe une fois leur mission terminée.

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R : Toujours en rapport avec la question, est-ce que vous utilisez la base de Tessalit actuellement ?

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T. M : Non ! Je ne peux pas dire qu’on n’utilise une base malienne et nous ne sommes pas présents à Tessalit en ce moment. On est venu au mois de juin- juillet pour faire un exercice conjoint avec l’armée malienne. L’exercice terminé, nos éléments sont partis. L’exercice à Tombouctou aussi s”est terminé il y a peu . Il y avait 10 à 12 soldats américains qui travaillaient encore avec leurs frères d”arme maliens à Tombouctou et l’exercice a eu lieu à la « Base » malienne à Tombouctou. Encore une fois l’exercice terminé nos éléments sont partis.

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R: Récemment, un avion américain a essuyé des tirs des troupes de Bahanga. Est-ce que vous pouvez nous en dire plus ? D’où est venu cet avion ? Où est-ce qu’il s’est posé ?

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T. M : Tout à fait! Nous avons profité de la présence de cet avion ici à Bamako, venu dans le cadre de l’exercice « Flintlock » dont je viens de parler et qui a eu lieu à Bamako entre août et septembre. C’était un exercice qui visait à monter un Etat Major multinational pour répondre à un scénario de crise dans la sous région. Un scénario et j’insiste sur ce mot.

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L’avion est venu d’une base américaine au Royaume-Uni, pour la clôture de l’exercice où il y avait un exercice de parachutisme avec le 33e bataillon de parachutistes de Kati. On a profité de la présence de cet avion pour répondre à une demande de nos amis maliens d’approvisionner en vivres la garnison à Tinzawaten .

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Donc on était content d’avoir cet avion ici pour répondre à cette demande humanitaire d’approvisionner en aliments les militaires et civils maliens encerclés à Tinzawaten. Ce que nous avons fait. L’avion a décollé de Bamako, il a fait deux passages sur Tinzawaten pour larguer les vivres, et l est retourné atterrir ici à Bamako. C”est vrai il a essuyé mais personne n’a été blessé et aucun dommage n”a été constaté.

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R : Si on vous demandait de qualifier le tandem Bahanga-Fagaga, quelle qualification donneriez vous d”eux vous ? Est-ce "un groupe de terroristes"? Des "trafiquants de drogues "? Des "combattants de la liberté"? Ou tout simplement des "rebelles dont la cause est défendable" ?

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T. M : Le cas de Bahanga et Fagaga est un peu difficile et un peu délicat. Moi, je ne dirai pas qu’il s’agit de terroristes, ce sont des gens qui ont décidé de ne pas respecter les accords d’Alger.

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Des accords qui ont été conclus avec la facilitation du gouvernement algérien il y a un peu plus d’un an (au mois de juillet 2006) et qui a défini les termes de la fin de la rébellion éclatée à Ménaka et à Kidal au mois de mai 2006. Ces accords ont conduit à la pacification , à la fin de la rébellion et au forum de Kidal au mois de mars 2007. Ce forum a mis l’accent sur l’importance de la sécurité dans cette zone pour assurer un meilleur avenir pour les populations du Nord.

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Si je dois les qualifier je dirai qu’ils n’ont pas respecté les accords et qu’il est important qu’ils retournent aux principes des accords d’Alger.

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R : S’agit-il de rebelles ?

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T. M : Evidemment! ils sont contre les accords d’Alger. Ils ont des armes contre un gouvernement ami, un gouvernement légitime. Vous pouvez en tirez des conclusions.

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R : Sur une radio internationale, récemment, vous avez déclaré que l’armée américaine menait au Nord des activités dans le cadre de la lutte contre le trafic de drogue et de la cigarettes . Pouvez vous nous en dire plus ?

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T. M : Oui, j’avais parlé des actions que nous menions dans ce secteur qui consistaient à monter des exercices conjoints avec l’armée malienne pour le renforcement de sa capacité de défense et de sécurisation du territoire. L”allusion que vous venez de faire est vraie . Dans cette zone qu” est le Nord du Mali, il y a toutes sortes de menaces : des terroristes affiliés à Al Qaïda, des trafiquants, des bandits, des criminels.

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Puisque que le Mali, pays démocratique, partenaire privilégiés des Etats-Unis nous a demandé de mener une coopération solide avec ses forces armées nous sommes contents et très fiers d’être à la hauteur de la tâche pour monter un programme d’exercices qui va dans le sens du renforcement de la capacité des forces armées maliennes. Voilà le contexte de notre coopération.

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Nous ne menons pas des actions contre les menaces citées. Nous appuyons le Mali et les forces armées maliennes à mieux gérer cette zone. Et nous sommes fiers d’être des partenaires privilégiés du Mali dans ce domaine.

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              Bahanga et Fagaga ne sont pas des terroristes!

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R : Depuis quelques temps des pays africains sont devenus des points de transit pour narco-trafiquants. Que compter vous faire pour les soutenir à lutter contre ce fléau ?

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T. M : C’est une question régionale et sous régionale comme vous le dites . Pour ce qui concerne le Mali, le trafic de drogue est un danger très préoccupant. Les efforts que nous menons avec les forces de sécurité maliennes vont en direction du renforcement des capacités de ces forces pour leur permettre de sécuriser le territoire y compris les frontières.

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Mais nous avons aussi d’autres programmes comme par exemple avec les services de police , programme mené par mon chef régional de sécurité qui parraine des cours pour les policiers. Il s’agit de renforcer la capacité de la police pour s’occuper de ce programme. Le trafic de drogue est un fléau qu’il faut combattre. Nous sommes engagés aux côtés de nos amis maliens à travers les deux programmes que je viens de mentionner.

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R : La lutte que mène le gouvernement des Etats-Unis contre le terrorisme a pris souvent des allures de croisades anti-islamiques. Quel message avez-vous pour les musulmans du Mali en cette fin de mois sacré du ramadan ?

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T. M : C’est une très bonne question. La lutte mondiale contre un fléau mondial qu”est le terrorisme n’a rien à avoir avec l’islam. Surtout en cette période de fin de ramadan. J’aimerais souligner le respect que nous avons pour l’islam, une religion ouverte, tolérante et qui prône le dialogue n’à rien avoir avec les terroristes qui tuent les innocents. Je dirai que la lutte mondiale que nous menons, dans laquelle nous comptons le Mali et bien d’autres pays comme un bons partenaires, vise à éliminer le terrorisme. Mais nous ne considérons pas qu’il y a un lien quelconque entre la sainte religion de l’islam et le terrorisme.

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R : En présentant les domaines de coopération avec le Mali, vous avez fait allusion à l’initiative présidentielle pour la lutte contre le paludisme. Où en êtes-vous aujourd’hui dans l’exécution de ce programme ?

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Nous allons travailler de très près avec les autorités maliennes dans la mise en œuvre de ce programme et notamment avec le ministère de la Santé. C’est un ministère avec lequel nous avons de très bons rapports puisque nous sommes actifs dans le secteur santé depuis longtemps. L’initiative présidentielle de lutte contre le paludisme a été annoncée au mois de décembre dernier et les études de faisabilité qui ont fini d”être conduite cette année.

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Nous sommes sur le point de commencer les activités. C’est une enveloppe budgétaire qui va durer trois ans et s”élève entre 15 à 18 millions de dollars américain pour l’achat de matériels sanitaires, de moustiquaires, de médicaments qui seront distribués gratuitement partout dans le pays pour lutter contre ce fléau qu”est le paludisme.

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 Les activités proprement dites vont commencer dans un très proche avenir.

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R : Monsieur l’Ambassadeur, il y a un pays émergent qui intervient beaucoup au Mali : c’est la Chine. La Chine constitue-t-elle une menace pour les Etats-Unis en Afrique ?

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T. M : Pas du tout! Au contraire nous sommes très contents qu’un pays comme le Mali ait divers Partenaires Techniques et Financiers. La Chine est très active dans la sous région et au Mali, c”est à saluer.

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Il est salutaire aussi qu’une puissance émergente comme la Chine décide d’intervenir pour appuyer le peuple et le gouvernement malien. Les Etats-Unis, pour ce qui les concerne, souhaitent la bienvenue à tout le monde, à tous les partenaires qui souhaitent engager leurs efforts dans le sens du développement de ce pays qui est un pays phare pour nous.

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R : Voulez-vous dire que la concurrence sera menée dans les règles de l’art ?

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T. M : Si concurrence il y a, ce sera une concurrence amicale comme sur un terrain de sport!

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R : Vous avez salué la bonne tenue des élections générales au Mali pourtant même le Président de Cour constitutionnelle a affirmé qu”elles ont été  «  marquées par une fraude généralisée installée à demeure »! Qu”en dites vous?

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T. M : Tout le monde a constaté qu’il y avait des manquements ici et là mais, en générale, toute la communauté internationale et la classe politique malienne se sont rendus compte que les élections maliennes se sont déroulées dans de bonnes conditions. Je dirai qu’au Mali, vous avez une pratique démocratique datant d’une quinzaine d’années et le constat a été fait qu”après chaque scrutin qu”il y a eu une amélioration de la qualité de la conduite des élections. Je crois qu’en matière de démocratie il faut saluer le Mali, y compris avec ces élections qui viennent de se dérouler.

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Propos recueillis par : El Moctar Kounta dit sydell

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                                          Boukary Daou

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                                    Kassim Traoré (Radio Klédu)

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