La nomination du Colonel Abdoulaye Maïga en tant que Premier ministre par intérim a créé une avalanche de réactions au sein de la population, mais aussi de la classe politique. Si certains louent son sens de l’écoute et du compromis, pour les autres, c’est un militaire et le militaire ne connait que les armes. Pourquoi autant de réactions sur l’homme ? Kadidia Fofana, Présidente du mouvement « antè an sèn boala » livre son analyse. Entretien.
Mali Tribune : Quel bilan dressez-vous après deux ans de Transition ?
Kadidia Fafona : en dépit de la rectification de la trajectoire du processus transitoire dont le Premier ministre avait fixé les priorités à savoir les réformes politiques et institutionnelles ; la sécurité ; la promotion de la bonne gouvernance et l’organisation des élections. Deux ans après tout n’est pas rose. D’abord sur le plan sécuritaire certes, beaucoup de Maliens se réjouissent de l’acquisition des aéronefs pour renforcer notre défense nationale. C’est une très bonne chose parce que ça fait remonter le moral des troupes qui sont au front. Mais le retour de la sécurité et de la stabilité devrait être une question d’honneur pour les autorités de cette Transition composée essentiellement de militaires.
Le Mali n’a pas besoin d’Hommes forts mais des Institutions fortes. Concrètement, sur le plan de la promotion de la bonne gouvernance, il y a beaucoup à faire.
Quant à l’organisation des futures élections générales, il y a une hausse d’espoir. Déjà, il y a eu la création et la mise en place de l’Organe unique de gestion des élections via un tirage au sort. La promulgation de la loi électorale. Sur ce plan, il y a une lueur d’espoir et une volonté politique des autorités en place.
Mali Tribune : En tant que présidente du mouvement « an t’an sen boala », quelle est votre réaction après la nomination d’Abdoulaye Maïga comme Premier ministre par intérim ?
- F.: Ce que je ne comprends pas, c’est le décret qui a été lu pour nommer Abdoulaye Maïga en tant que Premier ministre par intérim. Parce qu’après la mise en place du gouvernement normalement, il y a ce qu’on appelle les intérims en cas de vacances, les ministres peuvent assurer l’intérim. Mais cette nomination du Colonel Maïga n’est pas une mauvaise chose étant donné que l’Etat est une continuité si Choguel Maïga est dans l’incapacité à assurer cette tâche pour des raisons de fatigue c’est normal qu’il y ait quelqu’un d’autre. Mais force est de reconnaître que le Premier ministre par intérim fait l’objet de consensus même si c’est un militaire même si j’ai des réserves. C’est un rassembleur, un homme de dialogue, il a pu amener toutes les parties politiques autour de la table pour les informer des dates des élections à avenir.
Mali Tribune : Le Mali a déposé une plainte contre la France pour violation de son espace aérien et d’avoir soutenu les groupes djihadistes. Comment vous analysez cette situation ?
- F.: Bon, si le gouvernement estime qu’il a à sa possession des preuves contre qui que ce soit, il est de son devoir de porter plainte pour éclaircir la lanterne de tous. Si vraiment elles ont des preuves, je les soutiens à 100 % dans cette plainte. Et nous attendions la réaction du Conseil de sécurité.
Mali Tribune : Selon vous, qu’est-ce qu’il faut faire pour libérer les 49 militaires ivoiriens arrêtés à Bamako il y a deux mois ?
- F.: Le Mali et la Côte d’Ivoire sont des pays frères. Ces pays, non seulement sont liés par l’histoire ; l’économie ; la politique et le social. Il est très difficile de diviser ces deux pays. Comme j’ai l’habitude de dire, si vous tirez sur 100 personnes à Abidjan dites-vous que vous avez tiré sur au moins 50 Maliens.
Parce que nous avons plus de 4 millions de Maliens sur le territoire ivoirien. Et des Ivoiriens, nous les avons comme amis et voisins au Mali. Certaines situations doivent être gérées de façon diplomatique entre Etat à Etat. Ce qui est déconcertant dans cette affaire, c’est la façon dont les pseudos influenceurs sur les réseaux sociaux essayent d’attiser le feu. Je crois qu’il faut jouer à d’apaisement et régler cette situation de façon diplomatique.
Mali Tribune : Visiblement la grande famille du mouvement « an t’an sen boala » s’agrandit avec de nouvelles adhésions. Est-ce que vous serez à la conquête des futures élections générales ?
- F.: Effectivement la famille du mouvement « an t’an sen boala » s’agrandit. Nous avons repris la conquête du terrain. Nous avons notre manière d’aborder les gens. Pour nous, qu’on soit politique ou pas nous n’avons pas pour rôle de distribuer les poissons mais d’apprendre les gens comment pêcher. Le mouvement « an t’an sen boala » se porte bien et au moment venu, on verra bien s’il faut aller aux élections ou s’il faut accompagner une candidate.
Propos recueillis par
Ousmane Mahamane