Interview presque imaginaire – Me Mountaga Tall, député élu de Ségou : “Plus roublard que ATT, tu meurs”

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La Nouvelle République : Cela fait longtemps qu’on ne vous a pas entendu.

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Me Tall : Il y a un temps pour parler et un temps pour se taire. J’ai choisi une sorte d’exil intérieur face aux difficultés auxquelles je ne m’attendais pas.

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La Nouvelle République : Intérieur ou extérieur, il semble que le mot exil vous est familier.

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Me Tall : C’est vrai que comme feu Maribatrou l’avait maladroitement rappelé, chez nous on sait ce que le mot exil veut dire. On le tient de famille, de grand-père à petit fils. Face aux difficultés on ne peut s’empêcher d’aller au loin. Ce n’est pas à vous que je rappellerai ma peu glorieuse fuite à Dakar quand ça chauffait en 1991. Bon, c’est de l’histoire ancienne. J’ai envie de mettre fin à la spirale et d’affronter mes démons.

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La Nouvelle République : Comme problème, vous voulez parler de votre défaite à l’élection pour la présidence de l’Assemblée nationale ?

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Me Tall : Oh ! Vous savez, ça ce n’était que le coup de grâce. C’était la cerise sur le gâteau. Pourtant j’aurais dû me méfier de ATT et savoir qu’il allait me liquider publiquement.

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La Nouvelle République : Il vous a pourtant soutenu.

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Me Tall : Et comment qu’il m’a soutenu ! C’était comme le soutien de la corde au pendu. Imaginez que quand je lui ai annoncé que je serais candidat s’il m’adoubait, il m’a presque embrassé. Ce n’est que plus tard que j’ai compris que c’était pour mieux m’étouffer. Il m’a même filé un peu d’argent. Et puis patatras ! Le jour de l’élection, sachant très bien que l’ORTM serait présent pour la retransmission en direct, c’est certainement lui qui a dû demander à Sidiki d’envoyer ses éléments, il m’a lâché. Ce qui m’a fait dire sur le coup qu’il m’a exécuté en direct.

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La Nouvelle République : Mais vous saviez que vous n’étiez pas en situation de force pour gagner.

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Me Tall : La situation pour gagner était d’avoir ATT avec soi. J’étais tellement obnubilé par le perchoir, j’avais une ambition tellement forte qu’elle a fini par me dévorer parce que je n’étais plus lucide.

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La Nouvelle République : Et pourtant il nous est revenu qu’en 2002 vous étiez le seul au sein du COPPO à s’être fait tirer les oreilles pour le soutenir.

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Me Tall : Je m’étais fait copieusement ramassé par une bande de revanchards qui ne comprenaient rien au cours de l’Histoire. IBK voulait en découdre avec l’Adéma et Choguel poursuivait son vieux rêve de réhabiliter l’UDPM. Quels naïfs ! Et ATT a compris que pour mieux régner, il fallait nous diviser. Il a cassé le COPPO en détachant le RPM du groupe ; quant à nous autres, il nous faisait miroiter à l’un et à l’autre que nous étions ses fidèles. A tel point que nous ne nous étions pas rendus compte qu’il avait entrepris de nous noyauter dans nos partis respectifs. Résultats, non seulement on n’a pas pu se présenter à l’élection présidentielle alors que ce n’était pas l’envie qui nous manquait, mais il a réussi à nous transformer en parfaits griots. Pour quel résultat ? Hein, je vous le demande, pour quel résultat ? Il nous décapite. Choguel apprend par la télévision qu’il n’est plus ministre et moi il organise ma mort en direct à la télévision. Plus roublard que lui, tu meurs.

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La Nouvelle République : Qu’allez-vous faire maintenant ?

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Me Tall : Continuer à faire semblant. Mon avenir politique est certainement compromis mais j’hypothéquerai son dernier mandat.

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La Nouvelle République : En quoi faisant ?

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Me Tall : Lui, il connaît les coups d’Etat ; moi, je suis spécialiste des coups d’éclats et vous allez voir.

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La Nouvelle République : La dernière question porte sur votre présence à l’Assemblée nationale.

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Me Tall : Vous voulez parler de mon absence. Moi je ne suis pas le genre à aimer ce que j’ai faute d’avoir ce que j’aime. De manière triviale, je dirais que je ne suis pas le genre à téter ma grand-mère à défaut de ma mère. Je voulais le perchoir, je l’ai raté ; donc je n’ai plus rien à faire à l’Assemblée dès lors que je peux voter par procuration.

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23 novembre 2007

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