Interview : Modibo Mao Makalou : « Pour intégrer leurs économies, les pays de l’AES devraient réduire les obstacles aux échanges commerciaux et à l’investissement »

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Le Mali, le Burkina Faso et le Niger, réunis au sein de la Confédération des Etats du Sahel, ont décidé de la création d’une banque publique d’investissement. Afin de comprendre les enjeux de sa création, le journal Le Wagadu s’est entretenu avec Modibo Mao Makalou.

Selon l’économiste et ancien sherpa de la Commission de l’Union africaine et du Nepad, la mise en place des banques publiques d’investissement vise en premier à orienter les investissements vers des infrastructures ou des secteurs économiques considérés par l’État comme prioritaires.

Le Wagadu : le Mali, le Burkina Faso et le Niger réunis au sein de la Confédération des Etats du Sahel ont décidé de la création d’une banque publique d’investissement. Quels peuvent être les avantages pour trois Etats ?

Modibo Mao Makalou : Les banques publiques d’investissement ou de développement, qui investissent dans divers secteurs économiques et dans les infrastructures socio-économiques, sont cruciales pour la croissance économique forte, durable et inclusive.

La mise en place des banques publiques d’investissement vise en premier lieu à orienter les investissements vers des infrastructures ou des secteurs économiques considérés par l’État comme prioritaires. Ensuite, en deuxième lieu, elle vise aussi à pallier les imperfections du marché en intervenant dans des domaines jugés peu ou pas rentables par les investisseurs privés, bien qu’ils soient essentiels pour la cohésion sociale et la bonne marche de l’économie.

On pourrait par exemple citer les services sociaux de base comme l’éducation ou la santé, mais aussi l’habitat social, l’assainissement et l’agriculture familiale, qui par ailleurs constitue une source de revenus essentielle pour la majorité de la population des trois pays membres de l’Alliance des Etats du Sahel (AES).

Le Wagadu : Sa création peut-elle favoriser le décollage des Etats de l’AES confrontés à des déficits d’investissement notamment économiques et infrastructurels ?

Modibo Mao Makalou : Pour intégrer leurs économies, les pays de l’AES devraient réduire les obstacles aux échanges commerciaux et à l’investissement et relier leurs réseaux d’infrastructure. Ils devraient axer leurs efforts sur la libéralisation des échanges de biens et de services et celle des marchés financiers et des marchés du travail.

La levée progressive des obstacles aux échanges intra régionaux, la construction d’infrastructures régionales, l’amélioration du climat des affaires, et l’utilisation d’une monnaie commune ou unique qui réduirait les coûts de transaction stimuleraient les échanges commerciaux au sein de l’AES, mais aussi entre l’AES et les autres organisations d’intégration économique sous-régionales. Ce qui permettrait d’intégrer davantage les chaînes de valeur mondiales et renforcer l’activité économique.

L’intégration commerciale au sein de l’AES pourrait constituer une étape vers la mise en œuvre intégrale de la Zone de Libre Echange Continentale Africaine (ZLECAF) qui regroupe environ 1,5 milliard de consommateurs africains. De plus, une intégration plus poussée au sein de l’AES pourrait amortir l’impact éventuel de la montée des tensions commerciales aux niveaux sous-régional, régional et mondial.

Si le protectionnisme devait s’intensifier sur les marchés traditionnels, les pays de l’AES pourraient partiellement en compenser les effets négatifs sur leurs exportations et leur croissance en augmentant leurs échanges intra régionaux ; ce qui leur permettrait de préserver les bienfaits, pour leurs économies malgré les turbulences géopolitique et géostratégique qui pourraient affecter le commerce mondial, en attendant éventuellement la reprise économique mondiale.

Le Wagadu : En quoi, cette banque d’investissement sera différente des autres banques d’investissement ?

Modibo Mao Makalou : Les quatre principaux domaines de la banque d’investissement comprennent la gestion d’actifs, les services de conseil, le trading et le marché des capitaux. L’investissement public ne doit pas se substituer à l’investissement privé mais doit posséder un effet d’entraînement et donc de renforcer la complémentarité avec l’investissement privé.

Il s’agirait essentiellement d’accorder des prêts et garanties pour le financement du développement durable des États membres, de mobiliser les ressources financières, humaines et techniques pour la réalisation des projets et programmes d’investissement et de promouvoir où mener toute activité économique, commerciale, et financière pour améliorer les conditions de vie des populations des États membres de l’AES

Entretien réalisé par Abdrahamane SISSOKO

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